On a vécu un samedi pas très ordinaire dans la mesure où une certaine caste, sous couvert d’une pseudo-coordination nationale de défense du Coran, de la Constitution et du développement, avait décidé de s’exprimer et de crier fort son opposition au rapport de la COLIBE et son rejet de son contenu qu’elle considère totalement en contradiction avec la religion et la constitution, destructeur de la famille et en opposition avec l’identité tunisienne.
Ceux qui avaient défilé de la place du Bardo jusque devant l’assemblée des représentants du peuple ont choisi le même parcours suivi par des milliers de tunisiennes, toutes franges, toutes catégories et toutes appartenances confondues, un certain 13 août 2013 pour rejeter toutes les formes d’obscurantismes et toute possibilité de retour en arrière dans ce que la Tunisie a réalisé comme acquis au profit de la femme. Elles étaient des milliers ce jour-là à manifester, samedi, elles n’étaient que quelques centaines noyées dans une marée d’hommes venus faire obstacle à toute avancée en faveur de la femme. C’est du moins ce qui a été constaté sur place et que les vidéos circulant sur les réseaux sociaux montraient.
Il est vrai que la manifestation comptait de « grands cheikhs« , des imams, des hommes de religion et des hommes tout court, tous rassemblés autour de Noureddine Khadmi, ancien ministre des affaires religieuses sous le gouvernement Hamadi Jebali.
On garde un pied dans le pouvoir en soutenant le gouvernement contre son propre camp et on renforce l’opposition radicale pour bloquer tout ce qui peut nuire à son idéologie rejetée par la majorité des tunisiens car n’ayant rien à voir avec l’Islam de la tolérance et de la modération.
Ennahdha commence depuis un certain temps à faire sortir ses griffes et à dévoiler son vrai visage. Les déclarations modestement modérées de certains de ces dirigeants prônant l’ouverture au dialogue ne sont que de la poudre aux yeux.
Dans sa dernière déclaration à l’agence turque Anadolu, Rached Ghannouchi est allé jusqu’à qualifier la révolution tunisienne d’islamique, qu’elle avait été portée par des valeurs islamiques et humaines intimement liées. Si cela ne s’appelle pas voler la révolution des jeunes tunisiens qui s’étaient élevés contre la dictature sans rien avoir ce que Ghannouchi avance aujourd’hui pour faire plaisir aux frères auxquels son parti appartient, ce serait une façon de dire, à tous, que question pouvoir, ils y sont et comptent bien y rester et s’y maintenir.
Le choix du lieu a sa portée symbolique en ce sens que cette avenue est le symbole de la révolution de la liberté, de la dignité nationale. « Horrya, khobz Karama watanya », un rappel à ceux qui semblent l’avoir oublié par reconnaissance aux jeunes tombés en martyrs pour ces valeurs si simples, si importants.
Demain, l’avenue Bourguiba sera l’écho des voix venus défendre, la liberté acquise, la dignité retrouvée, et les acquis à préserver.
Combien seront-ils pour faire entendre leurs voix ? Demain sera, peut être, un autre jour. Il ne s’agira pas de défendre le contenu d’un rapport, c’est bien plus que cela, il s’agit de défendre l’identité tunisienne.
F.B