L’année écoulée n’a pas été meilleure au niveau politique. En dépit de la défaite de Donald Trump et la victoire de Biden aux élections américaines, l’influence du populisme est encore forte dans le monde. D’ailleurs, les chances de l’ancien président américain de revenir aux affaires lors des prochaines élections restent importantes. Par ailleurs, la plupart des pays européens ont connu le maintien des forces populistes, particulièrement celles de droite à un niveau élevé et qui vont peser sur les prochaines échéances électorales particulièrement en Europe au cours de cette année.
Les pays africains ont également connu un recul des régimes démocratiques avec les coups d’Etat au Mali et en Guinée qui ont renversé les pouvoirs en place et ramené au pouvoir des militaires populistes et aventuriers.
Le monde arabe a également connu les mêmes reculs des régimes démocratiques avec le retour des régimes politiques forts et autoritaires.
Probablement l’un des événements les plus importants de l’année passée a été le retour des Talibans au pouvoir en Afghanistan vingt ans après leur fuite. D’ailleurs, les images de la lutte des populations le 15 août 2021 à l’aéroport de Kaboul pour trouver une place dans les avions qui quittaient le pays et qui ont fait le tour du monde nous ont rappelé les images que nous avons connues avec la chute de Saigon dans les mains des Viêt-Cong le 30 avril 1975 et la fuite des Américains et de leurs suppôts locaux.
Ainsi, en dépit des espoirs que nous avons connus au début de l’année 2021, l’espace politique a continué son inscription dans une longue trajectoire populiste, entamée depuis le début de la décennie écoulée et la marginalisation des forces démocratiques et la volonté de construire des régimes autoritaires et forts pour défendre les populations face aux grandes peurs et pour restaurer la sécurité.
L’élargissement des inégalités sociales
La question des inégalités et de leur approfondissement a constitué depuis plusieurs années l’un des plus grands défis aux démocraties et au monde libéral. Cette question est devenue au fil de la décennie passée une grande préoccupation pour les gouvernements à travers le monde et pour les grandes institutions internationales. Mais, en dépit des engagements par les différents gouvernements, le trend des inégalités n’a fait que se renforcer et se développer dans le monde.
A ce niveau, le dernier rapport du Laboratoire sur les inégalités mondiales, publié en décembre 2021, a insisté sur leur accentuation dans la plupart des pays du monde. Ce rapport indique que les 10% les plus riches perçoivent 52% du revenu global alors que les 50% les plus pauvres ne reçoivent que 8,5%. Il a aussi souligné que les 10% les plus riches s’accaparent 76% de la richesse globale alors les 50% les plus pauvres ne disposent que de 2%. En matière de changement climatique, ce rapport a indiqué que les 10% les plus riches sont à l’origine de 48% des émissions de carbone alors que les 50% les plus pauvres ne participent qu’à 12%.
Ce rapport met l’accent sur les inégalités qui touchent le genre et souligne que les femmes n’ont perçu en 2020 que 35% des revenus du travail.
En dépit des engagements pris par les gouvernements et les organisations internationales, les inégalités se sont élargies, ce qui renforcera la colère et le sentiment de révolte et pèsera par conséquent sur la stabilité politique globale.
La lutte contre le changement climatique et les résultats décevants de Glasgow
La question de la lutte contre le changement climatique et la diminution des émissions de carbone constitue l’un des plus grands défis de la planète.
Le Sommet de Glasgow, tenu au mois de novembre 2021, a été une importante occasion et a porté tous les espoirs en ce début d’année pour des avancées réelles en matière de protection de la planète et des générations futures. Mais, ses résultats ont été très décevants. Ainsi, les analyses indiquent que si l’ensemble des pays respectent les engagements pris lors de ce sommet, notre monde se dirigera vers un réchauffement estimé à +2,7 degrés, ce qui est loin du +1,5 degré considéré par tous comme une ligne rouge qu’il ne faut pas dépasser.
Le refus du wokisme et de toutes les théories de la différence
Les théories du wokisme et toutes les théories d’émancipation et de libération et de défense de la diversité cherchent à mettre fin au regard occidental sur le monde qui a dominé les théories de la modernité et qui en a fait l’un des fondements de l’universalisme. Ces théories ont commencé avec des expressions variées en partant des travaux de Edward Saïd sur la critique de l’orientalisme et de la défense d’un regard décentré sur le monde.
Ces idées et le wokisme en général ont connu un développement rapide dans l’espace public et dans les milieux universitaires au cours des dernières années. Mais, l’année 2021 sera celle d’une contre-offensive des forces conservatrices contre ces idées et ces théories pour défendre l’universalité du modèle occidental et sa suprématie.
Ces dynamiques montrent qu’en dépit de quelques promesses, l’année 2021 s’est inscrite dans la trajectoire ouverte lors de la décennie écoulée, particulièrement les grandes peurs, l’enfermement sur soi, le refus de l’autre et le rejet de la diversité. Ce sont probablement cet échec et cette faillite dans l’ouverture d’un nouveau monde qui ont poussé Marc Zuckerberg, le patron de Facebook, le réseau social le plus populaire, à construire un nouveau monde virtuel en 2021, le monde de la « metaverse » pour échapper aux désillusions de notre univers.
La question que nous devons nous poser au début de cette année concerne les conditions afin qu’elle soit un point d’inflexion et de rupture avec les grandes peurs et l’enfermement sur soi de la décennie passée.