Aida Borgi, réanimatrice pédiatre à l’hôpital d’enfants de Bab Saadoun, a publié une lettre qui a secoué les réseaux sociaux, dans laquelle elle pleure la mort de sa patiente de deux ans, faute de matériel. Réalités Online publie la lettre telle qu’elle a été écrite par ladite pédiatre et partagée par son confrère Riadh Barouni.
« Tu n’es pas le premier ange qui part sous nos yeux.
Mais tu es la fille à qui j’ai décidé d’écrire cette lettre. Tu as réuni en toi seule tous les échecs de notre « révolution » appelée par certains printemps arabe! Dignité égalité!
Le peu de temps que tu as passé dans le service, nous a marqué et nous a rappelé qu’ en 2017 il n’y a pas encore de SMUR pédiatrique!!! . Tu es venue de si loin dans des conditions déplorables, accompagnée par des personnes aux regards aussi perdus que le tien.
Nous avions eu juste le temps de vivre avec toi tes derniers moments. Ton cœur a lâché, si vite et de façon si prévisible… pour nous. Je devais voir tes parents pour la première fois pour les accompagner..les préparer pour ton départ. Ta mère m’a dit qu’ elle était diplômée et sans travail.. une parmi tant d’autres qui peinent à vivre, avec ton père, lui même accablé, par la vie et moi… cherchant les mots pour dire que tu partais ou que tu vas partir … ta mère m’ a dit qu’elle comprenait et qu’ elle le savait: « elle était bleue sous oxygène et les marques de mes doigts restaient longtemps, depuis hier « . Elle aurait pu me dire : elle était en état de choc réfractaire ?? C’est Ça?! Elle est restée à ton chevet, te tenant la main toute une nuit, dans un hôpital périphérique, oublié par l’Etat ou âme morte probablement ne te voyait pas, ne voyait pas la mort s’approcher de toi.
Et pour achever ce qui restait de mon self contrôle, ta mère t’a embrassé pour te dire, être chez le bon Dieu serait mieux de vivre Ici-Bas. Tout le peuple et tous les ministres de la Santé ainsi que le chef du gouvernement devraient te demander pardon à toi et à tous ceux que la Tunisie a piétiné au passage…Repose en paix l’ange. Tout le monde saura que tu représente la gifle qui manquait à tous les politiciens du pays. »
Espérons juste que ces mots poignants et ce cri déchirant de cette doctoresse aient un effet sur la sourde oreille des politiques.
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