Sans surprise, le Président américain Donald Trump a annoncé le retrait de son pays de l’accord sur le nucléaire iranien intitulé le « Joint Comprehensive Plan of Action » signé le 14 juillet 2015 entre l’Iran et six puissances mondiales, les Etats-Unis, la Chine, la Russie, la France, le Royaume Uni et l’Allemagne, après d’âpres négociations qui avaient duré près de deux ans. Cette décision n’est pas surprenante. En effet, le futur Président américain avait annoncé au cours de sa campagne électorale sa volonté de mettre fin à la participation américaine à cet accord qui donne la part belle à l’Iran.
Donald Trump a avancé plusieurs arguments pour expliquer sa décision de retrait. Le premier est la reprise des arguments israéliens sur le fait que l’Iran ne respecte pas les termes de l’accord et poursuit son programme nucléaire au nez et à la barbe de la communauté internationale. D’ailleurs, le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, s’est efforcé il y a quelques jours dans une conférence de presse, de développer cet argument. Mais, un argument qui ne convainc pas les autres signataires de l’accord qui estiment que l’Iran respecte les engagements pris au sein de cet accord.
Deux autres arguments sont à l’origine de ce rejet. Il est question du délai d’application de cet accord ou la « sunset clause ». En effet, les signataires avaient prévu que les engagements iraniens se terminent en 2025. Or, pour le Président américain, cette période est courte et les Iraniens pourraient aisément remettre en place leur programme nucléaire militaire. La seconde critique adressée par le Président américain concerne sa portée limitée, dans la mesure où l’accord est concentré sur l’arme nucléaire et laisse la porte ouverte à l’Iran pour développer ses missiles balistiques à longue portée et pour intervenir sur la scène régionale, comme il le fait aujourd’hui en Syrie, ou en appuyant les Houthis au Yémen.
Mais, les arguments les plus importants concernent le repositionnement stratégique des Etats-Unis au Moyen-Orient. En effet, la politique étrangère américaine est en train de faire un revirement radical avec un alignement sur les positions israéliennes et saoudiennes et se démarque des positions de l’ancienne administration démocrate et des choix stratégiques du Président Barack Obama.
Les partenaires européens du Président américain ont essayé de le dissuader de se retirer de cet accord. Le Président français Emmanuel Macron a fait de cette question un point important dans ses échanges avec son homologue américain. D’autres dirigeants américains ont fait de même. Mais, rien n’y fait et tous ces efforts n’ont pas empêché le Président américain d’annoncer il y a quelques jours sa décision qui ne se limitait pas à quitter l’accord mais aussi à rétablir l’embargo sur l’Iran. Une décision lourde de conséquences, non seulement pour les entreprises américaines mais aussi pour bon nombre d’entreprises européennes obligées de reporter leurs contrats avec l’Iran.
La décision de Donald Trump a soulevé un grand nombre de critiques, à commencer par celles de son prédécesseur qui est sorti de sa réserve habituelle et lui a adressé une série de critiques tout comme celles des pays signataires de l’accord. Cette décision aura des conséquences majeures sur la scène politique et économique internationale et dans la région. La première des conséquences est l’accroissement des tensions politiques au niveau régional qui ont donné lieu à une manifestation de force entre Israël et les forces iraniennes basées en Syrie ces derniers jours, avec des bombardements de part et d’autre. Ces tensions héritées de la décision de retrait de l’accord du nucléaire sont venues s’ajouter à celles liées à l’autre décision de transférer le siège de l’ambassade américaine à Jérusalem mettant la région au bord de l’explosion.
Ces tensions politiques et l’instabilité croissante au Moyen-Orient ont eu des conséquences économiques immédiates, dont la plus importante concerne la hausse rapide des cours du pétrole sur les marchés mondiaux qui ne sont pas éloignés aujourd’hui des 80 $ pour le baril.
Ces développements économiques auront des conséquences importantes sur notre économie. Il faut rappeler que la loi de Finances 2018 a été construite sur la base d’une hypothèse de 54 $. Nous avons beau insister pour expliquer le caractère irréaliste de cette hypothèse, comme celle d’ailleurs du taux de change du dollar par rapport aux devises étrangères. Rien n’y fait là aussi et la loi de Finances 2018 a été adoptée avec des hypothèses qui renforceront les difficultés à venir. Le gouvernement devrait ajuster ses choix dans les prochains jours et ceci se fera à travers l’application du mécanisme de l’ajustement automatique des prix qui se traduira par une plus grande hausse des prix du carburant, renforçant les difficultés des classes moyennes et un plus grand déficit budgétaire, ce qui augmentera la dérive de nos finances publiques.
La décision du Président Trump ne fera que renforcer les tensions internationales. Ces inquiétudes et les peurs mondiales pèseront lourdement sur nos difficultés économiques et exigeront de nos pouvoirs publics des réponses appropriées pour aider notre économie à digérer ses effets négatifs.
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