Le Forum de la Mer a été l’événement-phare organisé en apothéose lors de la clôture de la Saison bleue. Celle-ci s’est déroulée durant quatre mois dans les différentes villes côtières du pays de Tabarka à Zarzis et a comporté plus de 120 évènements à caractère culturel, touristique et socio-économique, destinés aux jeunes et moins jeunes, en attendant la deuxième édition, étendue à d’autres pays participants et améliorée, prévue en 2019 pour revêtir la forme d’un Davos de la Mer. Le partenariat tuniso-français devrait conserver le leadership de l’organisation et de l’animation de ce Forum.
Afin de justifier le choix de la ville de Bizerte pour être un point focal de la promotion des zones littorales en Méditerranée, s’il en était besoin, cela mérite des précisions.
D’abord, une position stratégique au Nord-Est de l’Afrique, point de jonction entre les bassins occidental et oriental de la Méditerranée, passage très fréquenté par les navires qui desservent l’Asie du Sud-Est et l’Europe occidentale. Un port très actif, une ville à tradition industrielle et une zone franche appréciée par les investisseurs extérieurs. Plusieurs grands projets sont entamés pour transformer la ville : le pont fixe et l’assainissement du lac. Mais aussi, un arrière-pays agricole riche en cultures intensives.
Les atouts majeurs sont certes connus, mais méritent d’être renforcés et mis en valeur. Malgré 200 km de côtes, on ne peut pas dire que Bizerte ait connu un développement touristique et hôtelier rapide tel que celui de mise à Hammamet ou à Sousse, alors que les plages sont magnifiques, outre la diversité des paysages naturels. Les ressources halieutiques sont riches, mais sont-elles exploitées rationnellement ?
Il y a là une opportunité de relance des implantations hôtelières et des activités touristiques à favoriser et à organiser dans les meilleures conditions en tenant compte des nouvelles attentes de la clientèle en impliquant des investissements appropriés. Mais, les risques, les fragilités et les défis ne manquent pas.
Il y a d’abord la pollution et l’érosion marines qui sont responsables de dégâts importants dont la raréfaction des produits de la pêche, outre le dégradation de la santé de la population, et impliquent des solutions urgentes.
Il y a ensuite l’engorgement et l’exiguïté des zones industrielles, la vétusté et l’insuffisance des infrastructures de communication comme le pont mobile.
L’exiguïté du port constitue aussi un obstacle au développement des échanges commerciaux, ce qui implique des investissements coûteux pour l’extension des quais et des docks.
Le gouvernorat de Bizerte abrite des industries lourdes et polluantes comme l’aciérie d’El Fouladh et les chantiers navals de Menzel-Bourguiba, ainsi que la raffinerie de pétrole de la STIR.
Toutes ces activités sont vétustes et peu rentables, mais abritent un potentiel d’emploi et de compétences considérable, elles méritent d’être recapitalisées et rénovées.
Cependant, un volet qui nous semble particulièrement sensible mériterait d’être pris en compte à l’avenir, celui du développement régional.
En effet, renforcer le développement des villes et des régions littorales risque d’aggraver la disparité de croissance économique qui existe entre le littoral et les régions défavorisées de l’intérieur et d’accélérer l’exode rural, donc de souligner le clivage socioéconomique villes-campagnes. C’est pourquoi, il importe de faire des villes littorales des plates-formes d’échanges commerciaux et industriels, des courroies de transmission de la croissance économique et du progrès social entre le littoral et l’intérieur du pays.
D’où l’intérêt de réaliser des infrastructures modernes d’échanges transversaux entre villes littorales et arrière-pays continental.
Cela nous ramène à la nécessité de concevoir des districts économiques permettant aux régions intérieures du pays d’avoir accès à des débouchés littoraux et de bénéficier de liens économiques étroits avec des villes côtières et portuaires qui joueraient le rôle de locomotive pour entraîner la croissance des zones continentales limitrophes.
Tout cela mérite la mise au point d’une stratégie appropriée avec un programme d’investissement, un financement précis et d’un plan d’action impliquant la mobilisation de la coopération internationale et la participation des bailleurs de fonds internationaux.
Une initiative opportune, un concept pertinent, une manifestation bien préparée et rondement menée, qui mérite d’être poursuivie et développée pour déboucher sur des résultats concrets et de grande portée.
L’évolution vers une sorte de Davos de la Méditerranée, une opportunité que l’Union des pays de la Méditerranée devrait saisir pour lui apporter un soutien significatif aux côtés de la Tunisie et de la France, parrains de l’initiative.
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