Le Conseil d’analyses économiques présidé par Afif Chelbi, a conçu une démarche pertinente et rigoureuse, susceptible non seulement de sauver l’économie tunisienne d’un effondrement certain, mais aussi d’amorcer une stratégie de croissance économique basée sur une démarche rationnelle.
Le sursaut national peut démarrer avec un choc positif destiné à rétablir la confiance. Les trois étapes successives du projet étant l’élaboration d’un bon diagnostic, la définition d’une vision et enfin, l’adoption de pactes pour le développement économique et l’équité sociale.
Plusieurs lacunes structurelles ont engendré au cours des années écoulées un effondrement de plusieurs secteurs vitaux : les phosphates et la production énergétique, notamment.
Le processus de désindustrialisation a été largement entamé : la production industrielle a régressé de 3,5% en 2019 et les intentions d’investissements ont baissé de 20%.
La perte de croissance durant les neuf ans a été de 2,8% par an et la perte cumulée du PIB annuel pourrait atteindre 80 milliards de dinars.
La vision de la Tunisie du futur, qui ne manquera pas de faire sinon l’unanimité des forces vives de la nation, du moins de la majorité de la population, serait celle de la mise en place d’un Etat de droit, engagé dans une œuvre de développement, mais aussi attaché à son rôle social. Il s’agit de combattre la désindustrialisation, de promouvoir la production et la création de la valeur. Cela implique la mise en place de stratégies publiques sectorielles et de filières, mais aussi, la mise en œuvre d’un écosystème incitatif pour les investisseurs privés.
Les objectifs sont certes particulièrement ambitieux mais réalisables s’il y a la volonté, la célérité et la bonne gouvernance de la part de toutes les parties prenantes, avec notamment l’implication effective de l’Administration.
Il y a cinq objectifs principaux à l’horizon 2025, dont un taux de croissance de 4,5% du PIB en 2025, et des exportations de l’ordre de 90 milliards de dinars contre 47 MD en 2018.
Le taux d’investissement public et privé passerait à 24% du PIB en 2025, soit 47 milliards de dinars contre 20 MD en 2018.
En matière de création d’emplois, on passerait à 84.000 emplois par an, contre 28.000 en 2018.
Le CAE propose un nouveau mode opératoire plus participatif, celui des pactes pour le développement économique et l’équité sociale, afin de faire porter par l’ensemble des parties prenantes, le projet de redressement de l’économie nationale.
Il s’agit de concevoir et de mettre en œuvre des politiques de développement contractuelles dans le cadre du plan de développement 2021-2025, tout en bénéficiant des synergies entre pouvoirs publics et partenaires sociaux.
Il est clair que l’UTICA, l’UTAP et l’UGTT doivent adhérer à ce processus et adopter des comportements positifs, voire des attitudes de compromis pour favoriser le sauvetage du pays.
Une panoplie de mesures et d’engagements sont nécessaires. Ils sont présentés sous forme de 87 mesures : 53 à la charge de l’Etat et 34 à la charge des partenaires sociaux, déclinés en 6 piliers de compétitivité.
Un programme, certes difficile à réaliser, mais combien salutaire pour l’avenir du pays.
Il s’agit en fait d’un nouveau pacte social à conclure par toutes les forces vives de la nation. Cela implique des incitations financières, des dégrèvements pour bénéfices réinvestis, des délais stricts pour le règlement des marchés publics, des infrastructures technologiques et logistiques à réaliser, un financement à trouver pour les PME de 1 milliard de dinars par an durant cinq ans, avec bonification des taux d’intérêt.
Les pactes de filières concernent les secteurs productifs : phosphates, TIC, textile-habillement, industries des composants-autos, industries pharmaceutiques, huile d’olive, BTP, énergies renouvelables, logistique-transport, etc.
Les auteurs du projet sont conscients que la réussite de cette initiative dépend de l’adoption d’une gouvernance rigoureuse avec un comité de pilotage, une définition des responsabilités et une adoption d’un plan d’action avec un calendrier précis.
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