L’homme qui avait affirmé un certain jour que « si Tripoli tombe, Tunis et Alger tomberont à leur tour», Fathi Bashagha, ministre de l’intérieur, a été suspendu vendredi dernier par le chef du Gouvernement libyen d’union nationale (GNA) Fayez Al Sarraj. Si cette décision a été annoncée comme étant provisoire, elle n’en cache pas moins un réel conflit entre ces deux hommes forts du pouvoir de Tripoli. Conflit qui a été approfondi par les incidents survenus lors des manifestations qui ont eu lieu à Tripoli la semaine dernière.
Aux dernières nouvelles, le ministre de l’Intérieur fait l’objet d’une «enquête administrative» suite à ces incidents. Autre info venant de Libye, Sarraj aurait également démi le ministre de la défense et le chef d’état major interarmes.
Fathi Bachagha sera, pour sa part, interrogé sur les autorisations et les permis délivrés aux manifestants, les mesures de sécurité que son ministère a fournies pour protéger les manifestants mais aussi les violations commises lors des manifestations.
Rappelons que les milices des ministères de l’Intérieur et de la Défense relevant du GNA avaient tenté de reprendre le contrôle de la capitale suite aux mouvements de protestations appelant au limogeage du gouvernement en place. Mouvements qui avaient été violemment contrées par les milices.
En effet, des véhicules relevant du ministère de l’intérieur avaient été clairement vus tirer sur des manifestants avec des mitrailleuses alors que les milices neutralisaient toutes les caméras de circulation et coupaient l’électricité.
Le ministre suspendu, Fathi Bashagha était rentré précipitamment de Turquie après une visite de 10 jours au cours de laquelle il avait rencontré à Ankara les principaux responsables des services de renseignement.
Selon des sources sur place, Ankara aurait voulu précipiter la chute de Sarraj mais qu’elle avait arrêté les conditions de mise en œuvre de ce que certains libyens appellent « un coup d’Etat » avec Bashaaga. Sauf que Sarraj aurait eu vent de cela et a pris tout le monde de vitesse en procédant aux récents limogeages. Il a également annulé la visite qu’il devait effectuer en Turquie.
Il faut rappeler aussi que le Conseil des Cheikhs et Notables de Warshefana ainsi que les directions de sécurité des villes de Tripolitaine avaient établi le principe de la désobéissance civile contre toutes instructions venant du «soi-disant Ministre de l’Intérieur Bashagha» après avoir donné l’ordre aux mercenaires syriens, Somoud et la milice Radaa de tirer sur les manifestants à Tripoli.
Les Conseils et Directions des villes de Tripolitaine avaient exigé le retrait immédiat de tous les mercenaires syriens de Libye.

Les milices encerclant la Place des Martyrs à Tripoli. Des 4×4 armés avaient été placés sur et aux abords de la place pour dissuader les manifestants
Rappelons que des centaines de Libyens avaient manifesté la semaine dernière pendant plusieurs jours à Tripoli au siège du GNA, reconnu par l’ONU et qui s’oppose au maréchal Khalifa Haftar, contre la corruption et la détérioration de leurs conditions de vie. Dès dimanche dernier, des hommes armés avaient tiré à balles réelles pour disperser les manifestants, blessant plusieurs d’entre eux alors que d’autres ont été arrêtés. Ces incidents se sont répétés lundi et mercredi derniers.