Depuis le premier cas d’infection au coronavirus détecté le 2 mars 2020, les autorités tunisiennes ont recouru à un cadre juridique ordinaire, afin de limiter le risque d’épidémie.
Cette première approche ciblait les personnes infectées ou suspectées d’être infectées par le nouveau coronavirus (Covid-19) qui ne respecteraient pas les mesures d’auto-isolement auxquelles elles sont soumises.
Par la suite, au vu de l’augmentation du nombre de personnes infectées et à l’instar d’autres pays, la Tunisie a opté pour un « confinement sanitaire total » afin de lutter contre la propagation de l’épidémie de la Covid-1. Cette approche a nécessité la mise place d’un cadre juridique d’exception tout en recourant à un autre mécanisme constitutionnel permettant au chef du gouvernement de légiférer rapidement à la place du Parlement.
La note d’information réalisée par Democraty Reporting International propose une analyse des principales questions soulevées par le cadre juridique qui a été mis en place comme le confinement sanitaire total et les prérogatives exceptionnelles accordées à l’ancien Chef du Gouvernement.
Selon l’analyse, les acteurs institutionnels ne semblent pas avoir cherché à contrebalancer l’hégémonie du pouvoir exécutif durant l’état d’exception et seule la société civile a eu une attitude plus critique vis-à-vis du dispositif juridique qui a été appliqué et s’est mobilisée beaucoup plus pour contester certaines mesures et pratiques durant la période du confinement.
La saisine de la Cour constitutionnelle par le pouvoir législatif sur l’état d’exception est un contre-pouvoir important consacré par la Constitution pour faire face aux risques d’abus du pouvoir exécutif dans de telles situations exceptionnelles et qui n’a pu être garanti faute de mise en place de la Cour.
La note met également doigt sur un problème majeur relevé durant cette période de crise : Un bicéphalisme du pouvoir exécutif. En effet, on assiste à une double intervention du président de la République et du chef du gouvernement dans le cadre de la gestion de la crise liée à l’épidémie de covid_19, sur la base deux fondements constitutionnels différents.
La proclamation de l‘état d’exception, jugée floue, ne semble pas avoir été appréciée par certains acteurs politiques, dans la mesure où elle donne les pleins pouvoirs au président de la République. Ils lui ont préféré une habilitation sur la base de l’article 70 de la Constitution, plus maîtrisée du côté du pouvoir législatif, au profit du chef du gouvernement.
Selon le rapport, cet épisode montre, une nouvelle fois, qu’en en cas de désaccords profonds, personnels ou politiques, entre le président de la République et le chef du gouvernement, la répartition des compétences entre les deux têtes de l’exécutif est potentiellement source d’instabilité institutionnelle et politique, notamment en l’absence d’une Cour constitutionnelle pour trancher les éventuels conflits de compétence.
En conclusion, cette double intervention des deux têtes de l’exécutif dans le domaine législatif semble avoir introduit une confusion dans le paysage constitutionnel du pays.