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A l’aube de l’année 2022, le virus continue de galoper, poussé par le variant Omicron, particulièrement contagieux et désormais majoritaire. Presque tous les soirs, les autorités sanitaires françaises ont enregistré cette semaine des records de contaminations quotidiens, dépassant encore les 210 000 cas samedi soir.
Néanmoins, l’Omicron semble provoquer moins de formes graves que le variant Delta, à l’origine de cette cinquième vague qui touche la France et toute l’Europe. C’est pourquoi, le ministre français de la Santé a adopté un ton optimiste mais prudent ce dimanche, dans les colonnes du Journal du dimanche : « Cette cinquième vague sera peut-être la dernière », a-t-il déclaré. Selon lui, le variant détecté en Afrique du Sud mi-octobre est tellement contagieux qu’il « va entraîner une immunité renforcée » dans le monde. Vaccination massive, immunité collective plus rapidement atteinte… Quels sont les motifs d’espoir face à l’épidémie de Covid-19 ?
*Vers une immunité mondiale ?
En effet, les chiffres sont sans appel. Les données observées par Santé publique France montrent à quel point l’Omicron est contagieux. En fin de semaine, on comptait un Français sur 100 contaminé par le Covid-19, un record absolu en France. Tandis que le taux d’incidence s’envole pour atteindre, ce dimanche, 1333 cas pour 100 000 habitants, selon Covid Tracker, alors que le taux d’alerte était fixé cet été à 50 cas pour 100 000 habitants.
Des chiffres qui se vérifient au niveau européen. Première région concernée, l’Europe – épicentre actuel de la pandémie – fait en effet face à des niveaux de contaminations inédits : plus de 4,9 millions d’infections ont été enregistrées ces sept derniers jours, soit 59% de plus que la semaine précédente, selon un comptage de l’AFP samedi.
Le chef de l’Organisation mondiale de la santé a une nouvelle fois tiré la sonnette d’alarme : « je suis très préoccupé par le fait qu’Omicron, plus transmissible, circulant en même temps que Delta, entraîne un tsunami de cas. Cela exerce et continuera d’exercer une immense pression sur un personnel de santé épuisé et des systèmes de santé au bord de l’effondrement ».
Dans le monde, plus de 935 000 cas de Covid-19 en moyenne ont été détectés chaque jour entre le 22 et le 28 décembre, un nombre encore jamais atteint depuis le début de la pandémie fin 2019, qui représente une hausse de 37% par rapport à la semaine précédente.
*Moins de formes graves avec Omicron
Plus contagieux, l’Omicron engendre toutefois moins de cas graves, ce qui permet aux hôpitaux de souffler. Le pic du nombre de cas de Covid-19 « devrait culminer mi-janvier », a indiqué au Journal du Dimanche l’épidémiologiste Arnaud Fontanet.
« Le pic du nombre de cas devrait culminer mi-janvier ; le pic hospitalier pourrait avoir lieu une semaine plus tard (…) l’Île-de-France sera la première touchée », a indiqué ce membre du Conseil scientifique. Dans « un hôpital déjà très éprouvé par 22 mois de crise sanitaire », il dit s’attendre « à un immense défi logistique et organisationnel ».
L’épidémiologiste a toutefois indiqué que « le recours accru au télétravail va jouer un rôle important » pour réduire le niveau de ce pic, de même que « les efforts d’aération ou de ventilation » des classes et des cantines. Il a préconisé de cesser pour l’heure les cours de gym et les chorales en intérieur. Le pic aura « une durée limitée » car les patients atteints de ce variant ont un besoin moindre de ventilation mécanique et séjournent moins longtemps à l’hôpital, selon le spécialiste.
Olivier Véran a également déclaré que selon les données britanniques, « il y a trois fois moins de formes graves de la maladie avec Omicron qu’avec Delta. « Des centaines de milliers de Français pourraient être infectés quotidiennement en janvier, dans la grande majorité des cas avec des symptômes légers », prédit de son côté l’Institut Pasteur.
*Des traitements en 2022
Arnaud Fontanet a par ailleurs assuré que 2022 allait apporter de nouveaux outils de lutte, comme les vaccins qui seront administrés par voie intranasale et l’arrivée prochaine de l’antiviral Paxlovid qui permettra le traitement des personnes à risque de formes graves. Pris chez soi, ce traitement a été approuvé dans l’Union européenne et aux Etats-Unis.
Ce médicament permet de réduire le risque d’hospitalisations de 90%, selon des essais cliniques, et soulève moins d’inquiétudes quant aux effets secondaires. « Plus le temps passe, moins les vagues seront douloureuses », a encore souligné l’épidémiologiste qui se veut un peu moins optimiste que le ministre de la Santé.
Le Royaume-Uni, premier pays à approuver la pilule anti-Covid du laboratoire Merck en novembre, a ainsi donné vendredi son feu vert à l’utilisation des comprimés antiviraux de Pfizer.
*La vaccination avance
Enfin, la dose de rappel du vaccin permet également de contenir la vague d’hospitalisations. Arnaud Fontanet rappelle ainsi que la protection contre les formes sévères « est très bien conservée » avec le vaccin, « de l’ordre de 80-90% après une dose de rappel ». « A terme, il y a de l’espoir » et « le Sars-CoV-2 rejoindra les autres coronavirus saisonniers humains qui nous donnent des rhumes et des angines chaque hiver », a-t-il avancé.
En France, malgré les réticences d’une frange de la population, la vaccination avance à grand pas, et déjà 78,7% de la population totale a reçu une primo-vaccination complète, selon les données de Santé publique France. 43,7% des 18 ans et plus ont pour leur part reçu une dose de rappel (et 80,7% parmi les personnes éligibles).
« Nous n’y sommes pas encore. On peut s’attendre à ce que de nouveaux variants émergent mais, notre immunité se renforçant avec le temps, soit par infection naturelle, soit avec des doses de rappel du vaccin, leur capacité à donner des formes sévères va diminuer », espère Arnaud Fontanet.
*Le risque d’un nouveau variant
Comme le rappelle l’épidémiologiste, si le risque diminue grâce à la vaccination, de nouveaux variants plus résistants aux différents vaccins pourraient voir le jour. Ils se développent principalement chez des personnes non-vaccinées et/ou immunodéprimées. Et si la France affiche de bons chiffres sur sa campagne vaccinale, de nombreux pays, notamment les pays les plus pauvres, peinent à avoir suffisamment de doses pour leur population, notamment en Afrique où, selon Our World In Data, seulement 8,68% de la population a reçu un schéma vaccinal complet au 22 décembre.
Par ailleurs, si Omicron est désormais majoritaire en France, va-t-il le rester ? C’est une question qui taraude les scientifiques et chercheurs qui travaillent sur la question. « Pour l’instant, la vague Delta n’est pas terminée. Nous sommes sur la partie descendante après avoir atteint le sommet il y a une semaine. Les deux vont cohabiter et circuler pendant un petit moment », nuance Etienne Decroly interrogé par LCI. Cependant, selon le virologue et directeur de recherche au CNRS, « Omicron va prendre le dessus pour deux raisons : d’abord, il est plus contagieux. Aussi, l’immunité établie dans les populations par la vaccination avec deux doses ou par une précédente rencontre avec le virus est peu efficace contre lui. En conséquence, cela lui donne un espace pour se propager rapidement. »
(L’Express)