Chaque nouvelle année est l’occasion pour les Tunisiens de se faire des promesses à eux-mêmes ou à leur entourage. Des résolutions annoncées le plus sincèrement du monde, mais qui sont rarement tenues… Nous avons demandé à bon nombre de nos concitoyens de nous confier leurs résolutions pour l’année 2015 et leurs réponses valent le détour.
Précision importante : il ne s’agit pas de leurs attentes ou de leurs espoirs pour la nouvelle année, mais de leurs objectifs personnels…
Ah, ces maudites cigarettes !
Les bonnes résolutions sont une coutume qui consiste à prendre un ou plusieurs engagements envers soi-même pour améliorer son comportement à l’occasion de la nouvelle année. Améliorer son bien-être physique, manger sainement, perdre du poids, se remettre en forme, boire moins d’alcool, arrêter de fumer sont les résolutions les plus fréquentes. On a même trouvé une jeune demoiselle qui se promettait de ne plus se ronger les ongles !
Mais la plus fréquente des résolutions reste celle d’arrêter de fumer, une dépendance qui empoisonne la vie de milliers d’hommes et de femmes sans qu’ils puissent y mettre un terme. C’est le cas de Fahmi, un commerçant de trente six ans qui est esclave du tabac depuis son adolescence. Il raconte son malaise : « lorsque j’étais jeune, je fumais pour montrer à mes copains que j’étais un homme. Grâce à ce geste je me sentais viril chaque fois que j’allumais une cigarette et que je tirais dessus avec assurance. Depuis, j’ai appris que c’était un poison sournois qui me tue à petit feu… »
Autre lieu, autre problème : ce couple de jeunes parents a décidé de faire du sport car, nous confie la dame « ma ligne a été fortement déformée par une grossesse difficile avec un bébé qui pesait plus de quatre kilos. Quant à mon cher mari, il est victime de sa gourmandise et de diverses boissons gazeuses. Il a un ventre presque aussi gros que le mien quand j’étais au 9e mois ! »
Son mari rigole, mais il a bien conscience de s’être laissé aller : « j’étais un sportif de haut niveau, mais la sédentarité et les longues heures passées au bureau m’ont fait prendre du bide doucement, lentement… Et un beau jour j’ai vu mon image de profil dans le grand miroir et là j’ai été effrayé par son volume. Alors c’est décidé : ma femme et moi on va s’encourager pour retrouver la forme et nos formes ! »
Économiser de l’argent, ou tout au moins surveiller ses dépenses, revient souvent dans les résolutions pour la nouvelle année. Noura, une enseignante dans un lycée de la capitale en fait le vœu : « ce n’est pas que je sois un panier percé, mais je n’arrive pas à équilibrer mes finances, à payer mes dettes et encore moins à économiser de l’argent. Mon mari et moi payons un loyer assez cher et chaque visite au supermarché se termine avec une scène de ménage ! Il faut que ça change… »
Pour les personnes les plus aisées que nous avons interrogées, réaliser des objectifs importants, construire une nouvelle maison, créer des projets rentables sont les résolutions qui reviennent le plus souvent. Hamed, la cinquantaine, avait une usine de textile dans le sahel. Son entreprise s’est arrêtée depuis la Révolution faute de commandes et il vit sur ses économies.
Il nous a assuré que, depuis quelques semaines, il a « repris espoir suite à l’amélioration de la situation sécuritaire dans le pays et aux espoirs que suscite le futur gouvernement. Je vais remettre la production en marche et reprendre contact avec mes anciens commanditaires européens. J’espère que l’année 2015 me permettra de renflouer mes caisses qui sont presque vides. » Chacun ses problèmes !
Trouver un mari !
Pour plusieurs jeunes femmes, les résolutions se résument à améliorer leur bien-être affectif et mental. L’une d’elles, la trentaine, vivant toujours chez ses parents se confie : « il faut que je me concentre sur des pensées positives, que je retrouve mes rires d’avant, lorsque j’étais adolescente. Je veux profiter de la vie, réduire mon stress et surtout trouver un homme qui m’aime et que j’aime… » On peut rêver !
Pour nombre de nos interlocuteurs, leur nouvelle lubie consiste à s’engager politiquement. Lamine, qui se dit informaticien, mais qui tient une boutique de réparation d’ordinateurs, passe son temps libre dans les réunions d’un des plus importants partis politiques du moment. Une lubie qu’il explique en ces termes : « j’ai été très déçu par le niveau de certains députés dans l’ancienne ANC et j’ai donc décidé de m’engager pour tenter d’améliorer cette situation. » Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il désire également améliorer sa situation personnelle !
Les autres résolutions que nous avons pu découvrir sont très variées, parfois inattendues. Il y a celle de ne plus « grignoter entre les repas et maigrir de plusieurs kilos » pour cette lycéenne aux formes généreuses. Pour son frère, maigre et très nerveux, il s’agit de « ne plus me mettre en colère pour la moindre contrariété ». Faire un voyage aux lieux saints et soigner sa santé sont les résolutions qui reviennent souvent chez les personnes âgées.
Et puis il y a les résolutions loufoques : « enrichir ma garde robe » pour cette jeune fille riche, « ne plus remettre à demain ce que je peux faire aujourd’hui et jouer moins avec la console de jeu vidéo » pour ce lycéen plus attiré par les matches de foot virtuels que par les problèmes de maths. Nous avons eu également des réponses « culturelles », avec cette dame bousculée par sa vie de famille « lire un livre au moins chaque mois »
La palme revient à ce jeune marié qui s’entend mal avec sa belle mère, trop envahissante à son goût : « ma principale résolution pour la nouvelle année c’est de me forcer à appeler mes beaux-parents de temps en temps, mais pas trop souvent, il ne faut pas exagérer non plus ! » Petite hésitation, et il ajoute : « et conduire de façon plus cool en mettant la musique moins fort ! »
Nous avons eu des réponses pleines d’humour comme « arrêter de faire des jeux de mot qui ne font rire que moi » ou « ne plus regarder les émissions idiotes de la téléréalité. », « ne plus dire de mal de ce collègue idiot, car c’est pas sa faute » et finalement « arrêter de faire des résolutions en début d’année que je ne pourrais pas tenir. »
La plus originale des résolutions, mais aussi la plus triste, est celle annoncée par une dame de quarante ans qui a fait le vœu, pour cette nouvelle année de se débarrasser de son époux, alcoolique et violent : « cela fait plus de dix huit ans que je supporte ses crises et ses lubies. Chaque soir, il rentre ivre et tente de me faire l’amour, ou plutôt de me violer, ce qu’il réussit rarement car l’alcool l’empêche d’avoir une érection suffisante ! »
Le plus marrant dans tout ça est qu’année après année, ce sont toujours les mêmes résolutions qui ressortent encore et toujours. Ne vous blâmez pas, vous n’êtes pas seul, le phénomène est universel !
Yasser Maârouf