Pour sa dernière conférence de presse, avant de quitter le ministère du Tourisme, Amel Karboul, a essayé, vaille que vaille, de justifier d’un bilan « positif ». Une rencontre où, les deux corporations professionnelles, ont été aux abonnés absents. Ce qui témoigne de la relation tendue, entre la ministre et les deux Fédérations professionnelles.
Amel Karboul ne voulait pas quitter le gouvernement en silence. Elle a présenté son bilan, d’un an, environ, à la tête du département, rappelé les objectifs fixés au départ consistant à améliorer l’image de la Tunisie et à engager les réformes nécessaires. Sauf que, un an est insuffisant pour recueillir les fruits des réformes. Mais, il faut bien commencer, comme l’affirme la ministre. Il fallait promouvoir le tourisme qui, a accusé un sérieux coup après le 14 janvier 2011 et peine toujours à retrouver son rythme de croisière. En tous cas, Amel Karboul n’a pas sauvé la saison. Elle a tenté, comme elle l’a affirmé de « sauver l’avenir du secteur». D’où, sa concentration sur la stratégie et la réforme du secteur, entamée mais dont on attend les fruits aujourd’hui. La raison est évidente. D’abord les réformes structurelles prennent du temps. Ensuite, parce que les professionnels ont boycotté l’Administration, conflits avec la ministre oblige. Or, une stratégie de réformes ne peut réussir qu’avec les professionnels. Mme Karboul a engagé la vision « 3+1 » (2015-2017). A ce titre, elle a indiqué qu’en 2015, une enveloppe de 1,5 million de dinars a été allouée à l’exécution d’environ 60% des 40 projets de réformes prévus par la stratégie
La stratégie est axée sur la diversification de l’offre touristique, le renforcement des produits provenant des régions de l’intérieur, l’identification des spécificités de chaque région et l’amélioration de la qualité de service. Il est question aussi d’améliorer l’image de la Tunisie sur les marchés touristiques et moderniser le secteur.
Poursuivre les réformes
Le couac est que la stratégie souffre d’un manque de communication interne et internationale. Sa mise en œuvre exige des fonds qu’il faudrait chercher ailleurs, et non dans le budget de l’Etat. D’où, l’impératif d’engager des experts en communication et de se focaliser sur un lobbying porteur, notamment des bailleurs de fonds via les réseaux de la coopération internationale.
De toute évidence, la situation du tourisme tunisien, exige une réforme soutenue qui devrait être poursuivie par le prochain gouvernement. Pour Mme Karboul, «il est impératif de poursuivre les efforts de réformes du secteur afin qu’il puisse relever les défis».
La qualité du produit a beaucoup perdu de sa vigueur et rigueur, au cours des quatre dernières années. C’est dans ce cadre, que les opérations de contrôle des structures et unités touristiques ont été accentuées. En 2014, les opérations effectuées par les équipes de contrôle technique ont augmenté de 57% par rapport à 2013. Sur les 106 hôtels passés au crible, 46 ne correspondent plus au nombre d’étoiles qu’ils portent. A cet effet, la ministre a annoncé le démarrage d’un nouveau programme de mise à niveau du secteur touristique et la création d’un observatoire du tourisme chargé d’enrichir le système d’information.
A la tête du ministère depuis un an, Mme Karboul estime que les projets accomplis au cours de ce laps de temps se résument au lancement de la vision 3+1, pour une enveloppe de 1,5 MD ; la consolidation et la reprise de certains marchés ; la création d’un Conseil national des ports de plaisance; de la Fédération tunisienne des restaurants touristiques. Dans le même registre, il a été procédé au démarchage de nouvelles compagnies aériennes « lowcoast » et l’octroi d’autorisations pour de nouvelles compagnies aériennes internationales.
D’autres projets restent dans le pipe, il s’agit essentiellement de l’ouverture de la Marina de Bizerte et de Gamamarth … Malgré tout cet effort, le dossier de l’endettement du secteur n’a connu aucune évolution significative, le nouveau ministre désigné aura-il les coudées franches pour solutionner ce lourd fardeau qui ne cesse de hanter et les banques et les professionnels ?
A la recherche du temps perdu
Quatre ans après la Révolution, le tourisme tunisien à la recherche du temps perdu. Aucun ministre n’a réussi à redresser la barre pour que le secteur retrouve son régime de l’année 2010. Pour cela, 2014 n’a pas dérogé à la règle. La Tunisie a accueilli moins de touristes que 2013, soit quelques six millions de touristes (-3,2%, que l’année passée, et – 12,1%, qu’en 2010). Sur ce total, 2,8 millions seulement sont Européens, soit 46,3%. La Tunisie aurait ainsi, enregistré une baisse de 3%, par rapport à l’année écoulée, en terme de touristes européens, et 26%, par rapport, à l’année de référence, 2010.
Le marché français, jadis, premier fournisseur de clients, poursuit une forte régression : 6,1% en 2014, soit 720.175 touristes contre 1,385 million en 2010. Le marché allemand a observé une lente croissance de 0,3%, avec 430.000 touristes.
Les satisfactions sont venues des marchés italien, (+9%) et britannique (+4%).
3,1 millions de Maghrébins ont visité la Tunisie, soit 51,1% de l’ensemble des non résidents. La palme revient au marché algérien avec une croissance de 35%.
29 millions de nuitées ont été enregistrés, soit une baisse de 3%. En tête de liste on retrouve les zones touristiques de Djerba, Sousse, Hammamet et Monastir. En revanche, les recettes en devises, nerf de guerre du tourisme, ont enregistré une hausse d’environ 11%. Le secteur a drainé 3575 MD, contre 3221 MD, en 2013. Néanmoins en comparaison avec l’année 2010 les recettes touristiques accusent un gap de -14,5%. Il faut rappeler à ce propos que si le cours du dinar par rapport à l’euro a baissé de 4,3%, en 2014, en quatre ans la baisse est évaluée à 18,8%.
Nada Fatnassi