Dans une lettre adressée au peuple tunisien publiée ce dimanche 3 juillet, le doyen Sadok Belaïd, président-coordinateur de l’Instance nationale consultative pour une nouvelle République chargée de rédiger une Constitution, a dénoncé la version publiée le 30 juin par le président de la République au Journal officiel.
Pour Belaïd, le projet présenté par le président Kaïs Saïed n’a rien à voir avec la version qui lui a été présentée par sa commission : « ça n’appartient en rien à celui que nous avons élaboré et présenté au Président », précise Belaïd, qui déclare dans cette lettre également, et après avoir consulté son ami, le juriste Amine Mahfoudh, que « avec regret, et en toute conscience de la responsabilité vis-à-vis du peuple tunisien détenteur de la dernière décision, la Commission est totalement innocente du texte présenté par le président de la République au référendum national ».
Pour appuyer ses propos, Sadok Balaïd, actuellement sous traitement médical, a, à travers le journal Assabah, révélé l’intégralité du texte initial du projet élaboré par sa commission et qui comprend outre un bref préambule, 142 articles, répartis en 11 chapitres.
Dans la lettre de Belaïd, le doyen considère que « le texte émanant de la présidence de la République renferme des risques et des défaillances de taille qu’il est de mon devoir de dénoncer ».
Parmi ces risques et défaillance qui ont marqué cette version soumise au référendum le 25 juillet, le président-coordinateur de l’Instance nationale consultative pour une nouvelle République a cité :
– Effacement et dénaturation de l’identité nationale,
– Retour surprenant à l’article 80 de la constitution de 2014 en rapport avec le « péril imminent », garantissant ainsi au chef de l’Etat des pouvoirs très larges, dans des conditions qu’il est le seul à même d’en juger, ce qui pourrait ouvrir la voie à un régime dictatorial,
– La non-responsabilité politique du président de la République,
– Un régime de régions et de districts suspect, flou, augurant de mauvaises surprises à l’avenir,
– Une organisation incomplète et arbitraire de la Cour constitutionnelle et de ses attributions, comme par la limitation de ses membres au corps judiciaire, à la faveur d’un système de nomination qui réduit de son indépendance,
– Absence de la dimension économique, sociale et environnementale dans le projet officiellement publié… »
M.A.B.S