Depuis le 25 juillet au soir avec l'annonce des résultats préliminaires des élections, une vague d'interrogations et de remise en question de ces résultats a submergé l'ISIE. Déjà que, à la fin de l'annonce des résultats, Farouk Bouasker et compagnie n'ont même pas daigné laisser l'opportunité aux journalistes présents de poser leurs questions en s'éclipsant illico presto comme s'ils avaient quelque chose à cacher. S'ajoutent à cela les divisions qui ont marqué le cours des travaux de cette instance dénoncée depuis son installation et l'empêchement de l'un de ses membres de vaquer à sa mission n'ont fait qu'amplifier sa remise en cause.
Et comme il n'y a jamais de fumée sans feu, les déboires dont est entachée l'Instance vont peser lourd et discréditer les résultats du référendum ce qui n'a pas manqué de profiter aux opposants au président et à son projet.
Et pour cause. Depuis deux jours, la question des gros écarts entre les chiffres livrés par les INRIE's et le résultat officiel global annoncé par l'ISIE est au centre de toutes les polémiques à l'intérieur du pays et n'a pas manqué d'alimenter les suspicions à l'étranger.
En effet, le fait que les résultats régionaux ne concordent pas avec les résultats affichés sur le nombre d'électeurs inscrits par région a suscité indignation et colère au sein des opposants à Kaïs Saïed qui n'attendaient que cela pour se remettre en selle. La réaction de l'instance suite aux dénonciations de ces incohérences en retirant les résultats des votes de sa page Facebook pour invoquer ensuite un problème d'actualisation de ces résultats a été mal interprétée la considérant comme étant une volonté de camoufler la vérité d'autant que les documents rendus publics montrent que les résultats avaient été validés par le président de l'instance puisqu'ils portent sa signature, avant leur publication.
L'attitude du président de l'Isie, Farouk Bouasker, qui n'est pas paru très à l'aise lors de ses dernières sorties médiatiques, paraissant excédé, stressé et sur ses nerfs voire même agressif par moments, n'était pas pour dissiper les doutes de certains, bien au contraire. La décision de limogeage, jeudi 28 juillet 2022, du directeur exécutif de l'instance, Amor Bousetta, est venue rajouter une tranche à ces suspicions.
Des membres de la salle des opérations auraient été également écartés en plus du chef de cabinet de l’Instance. Boucs émissaires ou responsables de ce scandale? Là n'est pas le problème.
Quelle va être la réaction du président de la république face à cette polémique? Pour l'heure il semble ne pas accorder de l'importance à cela en tournant le dos à ses détracteurs et en passant à autre chose. La préparation des décrets sur la loi électorale, la création du conseil des régions et des districts et du conseil constitutionnel semblent le préoccuper plus qu'autre chose.
Les défaillances relevées de l'instance, l'incohérence des chiffres présentés qualifiés de douteux, l'accusation d'avoir trafiqué les résultats pour imposer le "oui" et être dans les bonnes grâces du président, les écarts entre les chiffres régionaux et le résultat officiel global de l’Isie… autant de points et d'autres encore qui attendent éclairage. Bouasker et son équipe ont beaucoup de points à éclaircir et cela au plus vite. Cela concerne tout le processus engagé par le président de la république et par conséquent l'avenir du pays.
Bouasker ne cesse de dire que tous ceux qui ont des doutes sur les résultats peuvent s'adresser à la justice. Mal lui en prit, plusieurs personnes évoquent justement le recours à la justice pour empêcher l'adoption de la nouvelle constitution, et bien plus encore, ils comptent poursuivre les membres de l'Isie en justice.
Sauf que, et il faut le rappeler, le décret-loi n°2022-22 du 21 avril 2022 portant modification et complétant certaines dispositions de la loi organique n° 2012-23 du 20 décembre 2012, relative à l'Instance supérieure indépendante pour les élections et promulgué par le président de la République, Kaïs Saïed, accorde une immunité totale au président de l'Instance et aux membres du conseil.
L'article 14 de ce décret-loi dispose que « Ni le président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections, ni l’un des membres de son conseil ne peuvent être poursuivis ou arrêtés en raison des faits se rapportant à leurs travaux ou à l’exercice de leur mission ».
Les jours à venir ne vont pas être très gais…pour tout le monde.
F.B