Deux ans après l’assassinat de Chokri Belaid, Secrétaire général du parti des patriotes démocrates unifiés et leader de la gauche tunisienne, devant son domicile, le mystère reste entier. La question relative à démasquer les instigateurs de ce crime demeure sans réponse convaincante. Elucider ce meurtre qui, le 6 février 2013, a été ressenti comme un tremblement de terre, participe au renforcement de la démocratie et de l’Etat de droit dans notre pays.
l est vrai que les autorités ont annoncé la mort de Kamel Gadhgadhi, assassin présumé, du leader Chokri Belaid, dans une opération antiterroriste.
Il est vrai aussi, que le juge d’instruction, du 13e bureau au tribunal de première instance de Tunis, a décidé de clore l’enquête du meurtre de Belaid. Cependant, la clôture de l’enquête n’apporte pas de réponses claires, non uniquement pour la famille du martyr, mais pour la Tunisie toute entière. Une Tunisie qui attend, depuis deux ans, que la lumière, toute la lumière soit apportée sur ce premier assassinat politique après la Révolution qui a jeté la stupeur sur tout un pays et suscité questionnements lancinants.
En effet, il ne suffit pas de savoir qui est l’auteur de ce meurtre, ou l’identité de la personne qui a appuyé sur la gâchette. Toute la question est de découvrir qui a réfléchi, planifié et commandité l’assassinat d’un leader, dont les idées et la parole dérangeaient.
Deux ans après la disparition de Belaid, la Tunisie se souvient toujours de cette journée noire qui a failli plonger le pays dans une violence aveugle. La Tunisie n’oubliera pas et ne baissera pas les bras jusqu’à ce que la vérité soit établie. Si l’enquête sur l’exécution du leader de gauche a permis d’établir l’identité du tueur, certaines zones d’ombre persistent encore. Selon les enquêteurs, c’est l’organisation, aujourd’hui classée terroriste, « Ansar Chariâ » qui a planifié et commandité le meurtre de Chokri Belaïd. La clôture de l’enquête a représenté un séisme sur la scène politique et judiciaire tunisienne. En effet, le 21 mars 2014, le juge du 13e bureau au tribunal de première instance de Tunis, a décidé de clore l’enquête concernant le meurtre de Chokri Belaïd.
Une clôture prématurée, selon Hamma Hammami, porte-parole du Front populaire.
La quête de la vérité
«Notre problème n’est pas de savoir qui a appuyé sur la gâchette, qui a exécuté, mais de connaitre les parties qui sont derrière cet assassinat, ceux qui en ont eu l’idée, l’ont commandité et qui ont donné l’ordre», a ajouté le porte-parole du Front populaire.
C’est que pour lui, «Si nous ne connaissons pas toute la vérité sur les assassinats politiques, la tension politique ne pourra pas redescendre ».
La famille de Belaid, meurtrie par la douleur et rongée par le doute, a adopté la même position de principe. Elle réclame la vérité sur l’assassinat de Chokri,
«Nous voulons connaître la vérité entière. Gadhgadhi n’était pas seul. Il y a d’autres parties impliquées et nous espérons qu’elles seront capturées pour que la vérité soit connue», déclarait Abdelmajid Belaïd, frère du défunt.
Une vérité réclamée par tous, mais qui tarde à venir. Est-ce que le président élu, récemment, aux commandes de la Tunisie, réussirait à établir cette vérité ? C’est l’avenir qui nous le dira.
Même s’il en a fait l’un de ses arguments de campagne électorale, même s’il s’est engagé solennellement à tout faire pour élucider cette affaire, le Président Essebsi aurait-il les moyens et, surtout, les compétences, pour aller jusqu’au bout de la promesse qu’il a, à plusieurs reprises, répétée ?
Entre-temps, la famille Belaid a été reçue, par Beji Caid Essebsi, quelques jours seulement après son investiture à Carthage, mais au delà de la symbolique, peut-on légitimement s’attendre à de grands rebondissements dans cette affaire ?
L’affaire est certes compliquée et exige du temps pour que la vérité soit dévoilée. Prendra-t-elle une nouvelle tournure avec la formation du gouvernement Essid? Il faut espérer et attendre des évolutions concrètes pour pouvoir juger.
Du nouveau ?
Basma Khalfaoui, veuve de Chokri Belaid, affirme, à chaque occasion que l’affaire de l’assassinat de son mari connait de nouveaux rebondissements surtout avec la requête adressée par la chambre de mise en accusation au juge d’instruction, pour inculper des personnalités, des responsables et des sécuritaires ayant bénéficié d’une couverture du temps de la Troïka au pouvoir.
Pour Me Khalfaoui, l’inculpation de ces parties constitue un tournant dans l’affaire du fait que leur interrogatoire apporterait de nouveaux éléments.
Parmi les responsables visés par l’enquête, figurent l’ancien chef du gouvernement, Ali Larayedh, et l’ancien directeur général de la sûreté nationale, Ouahid Toujani qui, selon l’épouse du défunt, avait dissimulé les résultats de l’analyse balistique qui devaient être versés au dossier.
N.F