Au cœur des marchés financiers mondiaux, une ombre grandissante menace la stabilité économique des nations les plus fragiles. Le dernier rapport de la Banque mondiale ouvre une fenêtre sur ces réalités souvent méconnues, révélant les mécanismes complexes de la dette internationale et offrant un aperçu visionnaire pour anticiper et prévenir les crises financières à venir.
Dans un contexte mondial où la détresse financière touche de plus en plus les pays à revenu faible et intermédiaire, la Banque mondiale se positionne en pionnière de la transparence et de la prévention grâce à son dernier rapport intitulé « International Debt Report ». Cet exposé approfondi, basé sur la base de données des Statistiques de la dette internationale, offre une lumière inédite sur les risques émergents et les solutions potentielles pour atténuer les conséquences dévastatrices de la crise financière.
En effet, la détresse financière sévit malheureusement parmi les pays à revenu faible ou intermédiaire (PRFI) de nos jours. Face à ces événements, la capacité d’identifier et de prédire leur probabilité devient essentielle. Les Statistiques sur la dette internationale (IDS) de la Banque mondiale fournissent des informations cruciales permettant aux décideurs d’adopter des mesures proactives pour prévenir ou atténuer ces événements et leurs répercussions dévastatrices.
Aujourd’hui, la Banque mondiale collecte des données sur 122 pays, comprenant plus de 45.000 prêts actifs (avec 2.500 à 3.000 nouveaux prêts ajoutés chaque année), les modalités et conditions de chaque prêt, les stocks et flux annuels pour chaque prêt, et des séries historiques. Elle dispose également de données de pipeline pour les paiements planifiés au titre du service de la dette sur les prêts existants jusqu’en 2030. Cette collecte annuelle de données détaillées offre une mine d’informations aux chercheurs et décideurs, cruciale pour éclairer les politiques et les actions à entreprendre.
Les risques de détresse financière augmentent
Au cours de la dernière décennie, les risques de détresse financière ont augmenté, en particulier parmi les pays les plus pauvres du monde. Près de 60 % des pays éligibles aux ressources de l’Association internationale de développement (IDA) sont actuellement en détresse financière ou à haut risque, marquant une hausse significative par rapport à il y a 10 ans. Face à cette réalité, la communauté mondiale peut prendre des mesures telles qu’augmenter le financement pour les pays à faible revenu, accélérer la restructuration de la dette, et intensifier les efforts en faveur de l’agenda de réforme.
“Améliorer la précision des prédictions de détresse financière dans les PRFI serait également d’une aide énorme, car les pays peuvent souvent prendre des mesures avant un éventuel événement de détresse pour l’éviter ou atténuer ses conséquences. Des recherches récentes menées par un groupe d’économistes de la Banque mondiale combinent les données de la dette IDS avec un volume d’autres données macroéconomiques pour créer un modèle permettant de prédire les difficultés de service de la dette extérieure (« détresse souveraine de la dette ») dans les pays à faible revenu. Au cœur de la recherche se trouve un modèle empirique qui lie le risque de détresse financière aux indicateurs du fardeau de la dette et de la capacité à porter la dette. Les séries de données dans la base de données IDS jouent des rôles cruciaux des deux côtés de ce modèle, en identifiant les événements de détresse financière et en construisant des variables adaptées qui peuvent les prédire avec précision”, souligne le document.
La prévention, maître des mots
Des recherches récentes, combinant les données de la dette IDS avec d’autres données macroéconomiques, ont permis de créer un modèle prédictif des difficultés de service de la dette extérieure dans les pays à faible revenu. Ces travaux montrent l’importance cruciale des données IDS pour identifier les événements de détresse financière et construire des variables prédictives.
“Des données détaillées et systématiques sur les paiements manqués (défauts) sont disponibles pour les détenteurs d’obligations externes, et ces données sont suivies méticuleusement par les agences de notation, les chercheurs universitaires et la presse financière. Cependant, aucune donnée systématique n’est disponible sur l’incidence et l’ampleur des défauts de paiement envers les créanciers privés non obligataires et bilatéraux externes. Étant donné que les détenteurs d’obligations représentent environ 15 % de la Dette publique et garantie (DPG) (Public and Publicly Guaranteed Debt [PPG]) dans les pays éligibles à l’IDA, les événements de défaut non observés représentent une lacune majeure dans les données pour la surveillance des pays et l’analyse de la viabilité de la dette… En l’absence de données détaillées sur les défauts, les séries de données IDS sur l’accumulation de retards de principal et d’intérêts offrent une mesure proxy indispensable pour la chronologie et l’ampleur des défauts de paiement”, précise encore le document.
Pour conclure, le rapport souligne qu’identifier les événements de détresse financière dans les PRFI a toujours été un défi en raison du manque de données systématiques sur les défauts de paiement. Les données IDS comblent cette lacune en offrant des informations détaillées sur l’accumulation de retards de principal et d’intérêts, fournissant ainsi une mesure proxy essentielle pour la chronologie et l’ampleur des défauts de paiement.
L’utilisation de données de retard IDS permet d’identifier les événements de détresse financière. Des seuils d’accumulation de retards définis dans la littérature académique sont utilisés pour signaler la détresse financière souveraine externe. Actuellement, plus d’une douzaine de pays éligibles à l’IDA se trouvent en détresse financière souveraine externe, soulignant les défis étendus auxquels sont confrontés les pays les plus pauvres du monde.
Les données IDS jouent également un rôle clé dans la prédiction des événements de détresse financière. Un algorithme développé par la Banque mondiale évalue la performance prédictive de plus de 600.000 modèles linéaires, mettant en lumière l’importance des données granulaires sur les modalités individuelles de prêt pour prédire les épisodes de détresse financière externe.
En conclusion, le rapport de la Banque mondiale sur la dette internationale met en évidence le rôle crucial des données IDS dans la prévention et la prédiction de la détresse financière. Ces informations s’avèrent être une ressource inestimable pour guider les actions visant à atténuer les impacts croissants des charges de la dette dans les PRFI.
M.BB