Le 10 janvier 2024, le gouvernement libyen dirigé par Dbeibah a annoncé la décision de restructurer la subvention des carburants, une mesure visant à contrer la contrebande excessive et les pertes financières considérables subies par la Libye. Cette résolution, révélée dans une note récente de l’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE), aura des implications majeures sur la Tunisie.
Dans le contexte actuel, le prix du diesel en Libye s’élève à 0,031 dollar américain par litre, soit environ 960 millimes tunisiens, positionnant ainsi la Libye comme le deuxième pays proposant les tarifs de carburants les plus avantageux au monde, juste après l’Iran. Cette politique de subvention a longtemps alimenté la contrebande transfrontalière, créant une dépendance tunisienne à hauteur de 17% vis-à-vis des approvisionnements en carburants libyens.
La mise en vigueur de la décision libyenne devrait entraîner une augmentation substantielle de la demande de carburants tunisiens, en particulier dans les zones frontalières où de nombreux Tunisiens pourraient se tourner vers la consommation locale. Cette augmentation de la demande pourrait, d’une part, accroître les recettes fiscales de l’État, étant donné que ce secteur est sous le monopole de l’État à travers la STIR (Société Tunisienne des Industries de Raffinage). D’autre part, elle générera une hausse des importations de carburants, mettant à rude épreuve les réserves en devises de la Tunisie, actuellement à 118 jours d’importation.
Les implications économiques s’étendent également aux coûts des subventions du pays, accentuant les défis auxquels la Tunisie est déjà confrontée pour équilibrer ses finances publiques. Outre ces considérations économiques, les répercussions sociales de cette décision ne peuvent être sous-estimées. Les Tunisiens vivant près des zones frontalières du Sud-Est, souvent engagés dans des activités informelles, pourraient faire face à des situations difficiles. Il existe également un risque de tensions sociales dans la région du sud.
La décision libyenne rappelle la dépendance énergétique de la Tunisie et souligne la nécessité d’agir rapidement pour mettre en place des dispositions relatives aux énergies renouvelables. Actuellement, la Tunisie dépend à hauteur d’environ 17% des carburants libyens, une dépendance qui nécessite une réflexion approfondie sur de nouvelles stratégies économiques.
La fin anticipée de la contrebande représente un défi économique complexe du côté tunisien. Cette activité, prospère dans les régions frontalières du sud, a longtemps été une bouée de sauvetage pour les habitants de ces zones, confrontés à des taux de pauvreté de 17,8% et un taux de chômage de 24,8%.
Pour atténuer les impacts économiques, la Tunisie doit évaluer la nature unique de sa dépendance envers les carburants libyens, représentant environ 17% de sa consommation nationale. Les autorités tunisiennes pourraient envisager des partenariats renforcés avec d’autres fournisseurs ou la diversification des sources d’approvisionnement pour atténuer l’impact potentiel de la fin des subventions libyennes.
Cependant, cette transition pourrait également ouvrir des opportunités pour la Tunisie dans le secteur de l’énergie. En développant des partenariats stratégiques avec des acteurs régionaux ou en investissant dans des sources d’énergie alternatives, la Tunisie pourrait non seulement compenser la perte anticipée de carburants libyens subventionnés, mais aussi renforcer sa résilience énergétique.
En anticipant des ajustements socioéconomiques, la Tunisie pourrait envisager des programmes de transition économique, créant des emplois dans des secteurs alternatifs et renforçant les capacités locales pour minimiser les chocs sociaux. Un dialogue ouvert avec la Libye sur les implications transfrontalières de cette décision est également crucial, incitant peut-être à explorer des accords bilatéraux pour atténuer les perturbations économiques et sociales.
M.BB