Le billet vert vacille. Ce lundi, le dollar a poursuivi son effondrement face aux principales monnaies mondiales, alimenté par les craintes d’une récession américaine et l’escalade des tensions commerciales. Un vent de panique semble se pérenniser sur les marchés, remettant en question le statut de valeur refuge de la devise américaine.
Un tarissement historique
La monnaie américaine a touché des creux inédits : son plus bas niveau en dix ans face au franc suisse et en trois ans contre l’euro. Pour la première fois depuis le début de la guerre en Ukraine, un euro s’échangeait à 1,14 dollar, soit 88 cents pour un euro. Une dégringolade spectaculaire, symptôme d’un désamour croissant des investisseurs.
La journée a commencé en fanfare avec une nouvelle salve de la guerre commerciale sino-américaine. En réponse aux droits de douane américains de 145 %, Pékin a imposé des taxes de 125 % sur les produits venant des États-Unis. Une escalade qui a immédiatement pesé sur le dollar, déjà fragilisé par les doutes sur la santé économique américaine.
Les raisons du krach
« Le rapatriement massif des capitaux européens explique cette chute », analyse Peter Kinsella, stratège forex à l’Union Bancaire Privée (UBP), dont les propos ont été relayés par Reuters. Les investisseurs vendent en urgence leurs actifs libellés en dollars pour se réfugier dans l’euro. « Le dollar et les Treasuries sont devenus des actifs à haut risque », renchérit Frantisek Taborsky, d’ING, dans une note publiée aujourd’hui.
La méfiance est telle qu’une « crise de confiance » est désormais en cours, selon lui. Preuve en est : la chute conjointe des actions américaines et des obligations du Trésor, malgré des indicateurs économiques décevants.
Interrogé par l’agence de presse britannique, Greg Meier, économiste chez Allianz, alerte : « Les droits de douane pourraient freiner la croissance américaine, d’autant que les marges de manœuvre fiscales sont réduites par rapport à 2018. » Pire encore, il évoque un scénario cauchemardesque : la dédollarisation. « Si les institutions américaines perdent en crédibilité, les capitaux fuiront ailleurs, sapant le statut de monnaie de réserve mondiale du dollar. »
Le reflux du dollar profite, au demeurant, à d’autres devises. Le franc suisse, le yen et même l’euro attirent les investisseurs en quête de sécurité. ING estime que l’EUR/USD est surévalué de 4 %, mais table sur un objectif à 1,15 à court terme. Peter Kinsella, plus optimiste, envisage même un bond à 1,20 d’ici 2026.