Par Dr Sami Ayari*
“In a city stitched from a thousand shores, I learned to chase the spark where minds and cosmos collide.”
« Dans une ville cousue de mille rivages, j’ai appris à traquer l’étincelle où les esprits rencontrent le cosmos.» Demis Hassabis, entretien à Londres, 2024
Un été brûlant de 1976, Londres s’ouvre comme une mer. Demis Hassabis naît, son cri primal résonne dans un foyer où les exils s’entrelacent comme des vagues. Son père, Chypriote grec de Nicosie, porte les cicatrices de 1974, quand les bombes déchiraient son île. Musicien et enseignant, il s’échappe avec un bouzouki et des rêves, bâtissant à Finchley un refuge où les chansons grecques murmurent la nostalgie. Sa mère, Singapourienne d’ascendance chinoise, traverse les océans dans les années 1960, une commerçante au cœur d’acier, défiant l’ombre coloniale pour un horizon anglais. Ensemble, ils élèvent Demis, aîné d’un frère et d’une sœur, dans une maison où les proverbes chinois dansent avec les vers d’Homère, où les échecs sont une méditation et les livres, un rempart contre la pluie.
Demis est une tempête. À quatre ans, il renverse l’échiquier de son père, un pion terrassé comme une étoile filante. À huit ans, il commande des joueurs barbus, un général aux yeux d’obsidienne. À 17 ans, il code Theme Park, un sortilège numérique qui ensorcelle des millions, ses doigts dansant au rythme des cordes du bouzouki paternel. « Je suis né de vagabonds, alors j’ai bâti des mondes », confie-t-il à The Straits Times en 2025. Les rues de Londres s’effacent ; dans son âme, il sculpte des galaxies où l’intelligence respire. Sa mère lui murmure le Dao De Jing au crépuscule, des haïkus de sagesse qu’il reçoit comme des énigmes. Déjà, le monde est un code à percer.
Les premières tempêtes : un astre dans la tourmente
À l’école, Demis est un spectre, un Chypriote-Singapourien égaré dans un monde anglais qui le dévisage. Les autres courent après des ballons ; lui, il traque les lois du chaos, un échiquier dans la poche. À 13 ans, il est maître aux échecs, deuxième mondial de son âge, mais la gloire est un ouragan. Les tournois l’usent, les attentes l’enserrent. «Les échecs m’ont sculpté, ils m’ont appris à casser avant de construire », souffle-t-il à Fortune en 2024. Il délaisse les plateaux, cherchant un jeu plus vaste : l’esprit humain.
Son sang d’exil bouillonne. Les récits de son père – Nicosie en flammes, une île tranchée comme une veine – et les silences de sa mère, hantée par les quais salés de Singapour, gravent une vérité : le monde est une ruine, mais l’intelligence peut le réparer. Cette solitude est une lame : elle tranche, mais elle forge. Dans les nuits fiévreuses de Londres, il lit Gödel, Laozi, Sagan, et joue aux échecs avec des ombres. Il ne veut pas gagner, il veut comprendre.
Une chute dans l’abîme, un envol vers les cieux : Cambridge et l’éveil
Cambridge est un colisée, mais Demis, admis à 16 ans, deux ans d’avance, y entre comme un étranger. Étudiant en informatique, il étouffe dans des cours trop lents pour son esprit météore. Il code Theme Park dans des nuits blanches, un triomphe mondial, mais la gloire est un murmure vide. « Je voyais des jeux, mais j’avais faim d’esprits », avoue-t-il à Axios en 2025. À 21 ans, il s’effondre, rongé par une question : que vaut un pion si l’échiquier est le cosmos ?
Une crise d’âme. Les studios de jeux offrent des trônes ; il refuse, s’isolant dans un café crasseux de Bloomsbury, griffonnant des neurones sur des serviettes volées. Puis, l’envol : un doctorat en neurosciences à UCL, où il plonge dans le cerveau comme un plongeur dans l’abîme. « On m’a dit que j’étais trop joueur pour la science. J’ai répondu : c’est en jouant que naissent les étoiles. » Il explore la mémoire, les rêves, les synapses, bercé par Miles Davis, endormi sur des équations. Il ne veut pas voir le monde, il veut l’épouser.
Un voyage parmi les astres : DeepMind et le Nobel
Demis allume DeepMind avec Shane Legg et Mustafa Suleyman, une flamme pour percer l’âme des machines. À 34 ans, il est un oracle, un fils d’exilés voyant des constellations où d’autres voient des bits. DeepMind explose : AlphaGo, 2016, bat Lee Sedol avec le « Move 37 », un coup si étrange qu’il semble voler les cieux. « Ce coup était un éclat d’éternité », déclare-t-il à The Guardian. Le monde s’arrête, hypnotisé.
Google rachète DeepMind en 2014 pour 400 millions de livres. Demis, anobli Sir Demis en 2023, reste le guide. AlphaFold, 2020, déchiffre les protéines, un mystère vieux de décennies. Octobre 2024: le Nobel de chimie couronne Demis, John Jumper et David Baker. Il est chez lui, à Finchley, jouant aux échecs avec son fils, quand Stockholm appelle. Il rit, une farce ? – puis s’effondre, larmes silencieuses, un immigré devenu alchimiste. « Le Nobel n’est pas à moi, c’est une étincelle pour chaque esprit traquant la vérité », proclame-t-il à Stockholm.
À Paris, février 2025, il ajoute : « Ce prix est un miroir, reflétant ce que les humains peuvent faire quand ils osent rêver au-delà des frontières.» Dans un moment intime, partagé à Londres, il murmure : « Cette couronne est lourde, mais elle éclaire les errances de mes parents. »
Un passeur de mondes : la science, les cultures, l’éternel
Demis ne code pas des machines, il tisse des galaxies entre les cœurs et l’infini. Novembre 2024, Singapour : au championnat mondial d’échecs, il parle d’une IA qui guérit, liant son sang chypriote et singapourien à un rêve universel. « L’IA est notre odyssée commune, elle peut élever tous les rivages », clame-t-il à The Straits Times. Sa voix, née des exils de Nicosie et Singapour, résonne comme un phare.
Février 2025, Paris, Sommet de l’IA. Demis défie les titans : « L’IA doit s’incliner devant la vie, pas l’or. » Il évoque AlphaFold, qui sauve des vies, et un futur où l’IA sculpte des énergies infinies, des remèdes pour tous. Ce n’est pas un discours, c’est une prière, un écho des luttes migrantes de ses parents pour un monde plus vaste. Davos, janvier 2025. Il prophétise l’AGI d’ici trois ans, mais avertit : « Façonnez-la avec soin, ou elle nous façonnera dans le feu. » Demis, fils de diasporas, unit science et âme, prouvant que les exilés peuvent réécrire les cieux.
Un fils des vagues, un cœur sans fin
À 48 ans, Demis vit à Londres, marié à une biologiste – une flamme discrète rencontrée à Cambridge – et père de deux enfants, des rieurs qu’il défie aux échecs, perdant parfois exprès avec un clin d’œil. Il retourne à Chypre, où les oliviers murmurent les chansons de son père, et à Singapour, où les vagues chantent les contes de sa mère. « La famille est mon étoile polaire, aucun prix ne l’éclipse », confie-t-il à Fortune en 2024.
Il médite à l’aube, lit Rumi, Feynman, Laozi, savoure des baklavas envoyés par sa tante chypriote. Son bureau est un chaos sacré : un échiquier ébréché, un modèle de neurone, une photo de ses parents dansant à Nicosie en 1973, sous un ciel d’étoiles. Un sablier hurle : le temps est un dieu.
L’héritage d’un alchimiste
Il a fait d’un pion chypriote une quête cosmique.
Il a bâti DeepMind, une étoile qui éclaire l’humanité, l’âme rivée à l’exil.
Il unit les mondes, prouvant que les rêves d’un enfant migrant rugissent en océans.
Demis Hassabis n’est pas un conquérant. Il est un sculpteur d’étoiles, un poète de l’IA qui fuit trônes et éclats, pour un monde où les machines, comme les vagues de Chypre, murmurent avant d’embraser.
*Cofondateur et coordinateur général du Tunisia CyberShield,
Cofondateur et coordinateur général de la Tunisian AI Society