La Tunisie figure parmi les principaux bénéficiaires des versements du géant pétrolier italien Eni en Afrique, avec 154 millions de dollars perçus en 2024, selon le dernier rapport de transparence du groupe. Un montant qui s’inscrit dans une enveloppe globale de 5,7 milliards de dollars injectés par la compagnie sur le continent, soit 61 % de ses paiements mondiaux. Des chiffres qui confirment l’ancrage stratégique d’Eni en Afrique, malgré un léger recul par rapport à 2023.
La Tunisie trouve sa place dans le paysage énergétique africain
Avec ses 154 millions de dollars, la Tunisie se positionne comme l’un des neuf pays africains bénéficiaires des activités de la major italienne, loin derrière les poids lourds que sont la Libye (2,1 milliards), l’Algérie (1,2 milliard) et l’Égypte (826 millions). Ces trois géants captent à eux seuls près de la moitié des flux financiers du groupe à l’échelle mondiale. Le Nigeria (566 millions), le Congo (413 millions), le Ghana (345 millions) et la Côte d’Ivoire (175 millions) complètent ce tableau.
Ces versements, soumis aux exigences de transparence européenne, incluent impôts sur les bénéfices, redevances, primes contractuelles et même des compensations en nature converties en valeur monétaire. Une manne financière cruciale pour les économies locales, mais qui soulève aussi des questions sur leur gestion et leur impact à long terme.
En 2024, Eni, dont l’emblème est un chien à six pattes, a distribué 9,1 milliards de dollars aux États où il opère, contre 9,7 milliards en 2023 – une baisse de 6,5 %. Malgré ce recul, l’Afrique conserve son statut de pivot, grâce à des coûts d’exploitation avantageux et des contrats de partage de production avec des partenaires publics comme Sonatrach (Algérie), EGAS (Égypte) ou la NNPC (Nigeria).
Ces accords, souvent liés à des gisements matures et rentables, garantissent à Eni une stabilité financière, même face à une fiscalité élevée. Mais ils entretiennent aussi une dépendance mutuelle : les États africains comptent sur ces revenus, tandis que le groupe italien mise sur leurs ressources.
Transparence européenne, défis locaux
La publication de ces données, imposée par Bruxelles, offre une lueur de clarté sur les flux financiers dans un secteur souvent opaque. Pourtant, elle met en lumière un paradoxe : alors qu’Eni affiche des ambitions vertes, son modèle reste largement accro aux hydrocarbures africains.
Un dilemme qui interpelle, à l’heure où le continent, très exposé au changement climatique, doit concilier développement économique et transition énergétique. Pour la Tunisie, comme pour ses voisins, la question reste entière : comment optimiser ces revenus sans perpétuer une économie carbonée ?
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