La Tunisie connaît depuis quelques années une grave crise économique. En effet, la Révolution, même si elle a eu des dividendes, a eu un coût important suite à la grande instabilité politique et sociale que notre pays a connue depuis 2011. Cette instabilité a créé une grande incertitude sur l’avenir et a été à l’origine d’importantes inquiétudes qui n’ont pas favorisé l’investissement et la croissance économique.
Notre économie a connu une forte baisse de la croissance et une dégradation sans précédent des grands équilibres macroéconomiques avec un creusement du déficit public suite à l’accroissement rapide des dépenses au moment où les recettes n’ont pas suivi le même rythme de progression. En même temps, le recul de la production a été à l’origine d’une forte progression des importations et un recul des exportations, ce qui a causé un accroissement rapide du déficit de la balance courante.
Cette dégradation de la situation économique a été à l’origine d’un recours important à l’endettement pour permettre à l’Etat d’honorer ses engagements durant les dernières années. La croissance de l’endettement a été forte et la situation de notre pays s’est nettement dégradée au cours des dernières années. Plusieurs indicateurs sont significatifs de cette évolution de la dette et de son caractère de plus en plus préoccupant non seulement pour l’opinion publique mais aussi auprès des responsables politiques et des acteurs économiques. Le premier critère concerne le volume global de la dette qui passera de 24 milliards à 30 milliards de $ entre 2012 et 2017 selon les projections du FMI. Un autre indicateur qui est aussi significatif de la dégradation de la situation de l’endettement concerne la montée de la dette externe dans le PIB qui est passée de 52,9% en 2012 à 71,4% selon les dernières projections du FMI pour l’année en cours. Il faut aussi mentionner la croissance rapide du service de la dette qui passera de 12,1% en 2012 à 16,7% en 2017, ce qui ne manquera pas de renforcer les pressions sur nos finances publiques. Cette progression rapide de notre endettement a suscité des inquiétudes voire même des craintes et des appréhensions quant à l’avenir de notre économie et de la souveraineté de notre pays.
Est-ce pour autant que la situation de notre endettement est inquiétante ? Et, sommes-nous à la veille d’une grande crise de la dette dans notre pays ? Ces questions sont aujourd’hui au centre du débat public et les avis sont particulièrement tranchés. En effet, pour certains, nous sommes en voie de connaître la crise grecque et de perdre notre souveraineté. D’autres soulignent que notre situation est très éloignée de la situation grecque dans la mesure où le taux d’endettement de ce pays est aujourd’hui autour de 176% du PIB.
Certes, il est difficile de comparer la situation de notre économie à celle de l’économie grecque mais la question de l’endettement de notre économie doit attirer notre attention et nous devons faire preuve d’une plus grande précaution. Trois raisons au moins doivent nous inviter à un suivi prudent de la question de la dette. Le premier est relatif au rythme de progression de notre endettement qui a atteint des rythmes importants particulièrement depuis 2012 et qui pourrait renforcer le poids de la dette dans notre économie et pourrait nous mettre sur une pente forte.
La seconde raison est relative à l’accroissement rapide du service de la dette qui commence à se rapprocher du seuil dangereux des 20% qui constitue une ligne rouge et qui pourrait entrainer des pressions supplémentaires sur les finances publiques. La troisième source d’inquiétude devant la montée de l’endettement est relative à l’utilisation de cet endettement vers les dépenses courantes et non pas vers les dépenses d’investissement qui peuvent créer les revenus nécessaires à son remboursement.
La progression rapide de l’endettement et les inquiétudes qu’elle suscite, exigent une gestion plus rigoureuse et plus attentive des aspects financiers du budget de l’Etat. Plusieurs idées ont été suggérées à ce niveau dont la création d’une agence de la gestion de la dette et dont l’objectif est la gestion dynamique de la dette afin de réduire ses effets sur les finances publiques. Or, en dépit de son importance cette idée n’a toujours pas vu le jour et nous devons accélérer son exécution afin de sortir d’une gestion passive de la dette et rentrer dans une nouvelle ère qui prend en considération les nouveaux outils et les nouveaux instruments financiers afin de nous aider à sortir de cette crise.
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