Ce qui n’était qu’une promesse électorale est maintenant une réalité. Donald Trump vient d’annoncer le retrait américain de l’accord conclu lors de la COP 21 à Paris en décembre 2015. Lors d’un discours prononcé le 1er juin le Président américain a annoncé : « l’accord de Paris compromettrait notre économie, briserait nos travailleurs, affaiblirait notre souveraineté, imposerait des risques juridiques inacceptables et nous mettrait en situation de faiblesse permanente par rapport aux autres pays du monde ». La cause est entendue et désormais le second plus grand pollueur de la planète ne fait plus partie de l’effort global de la planète pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et sauver ainsi la planète. Une décision qui n’est pas une surprise tellement elle a martelé par un Donald Trump qui a fait preuve lors de sa campagne électorale d’une grande virulence non seulement vis-à-vis de cet accord mais également de toutes les formes de coopération bilatérale.
Certes, il ne s’agit pas du premier retrait américain d’un accord global sur le climat. En effet, les Etats-Unis avaient signé l’accord de Kyoto pour la limitation des émissions de gaz à effet de serre. Mais, quelques années plus tard le Président Georges W. Bush a décidé de se retirer de cet accord. Ce retrait a d’ailleurs, ouvert la porte à d’autres pays qui ont annoncé dans la foulée leur défection, dont le Canada, la Nouvelle Zélande, le Japon et la Russie. Mais, le retrait actuel a provoqué un large émoi étant donné que l’accord de Paris avait créé un large espoir et l’engagement américain un grand engouement. Certes, le Président américain a annoncé sa disponibilité pour de nouvelles négociations afin d’aménager les intérêts américains. Mais, cette invitation a reçu une fin cinglante de non-recevoir de la part de beaucoup de pays dont l’Allemagne, la Russie et le Président français fraichement élu n’a pas hésité à dire qu’il n’y avait pas un plan B pour le climat.
La question qui se pose alors est de savoir quel impact ce retrait aura-t-il sur cet accord ? En d’autres termes le monde pourra-t-il tenir les promesses de sauvegarde de la planète après la défection américaine. Une question pour laquelle la réponse est évidente tellement le poids des Etats-Unis est important dans les émissions de gaz à effet de serre. Ce retrait touchera sans nul doute l’accord de Paris sur plusieurs aspects et le fragilisera encore plus.
Le premier aspect qui sera touché par cette défection américaine concerne le respect du seuil des 2 degrés de réchauffement climatique par rapport à l’ère préindustrielle. Plusieurs experts avaient émis un doute sur ce seuil et la capacité de l’accord de Paris à y parvenir. Or, le retrait américain et par conséquent la poursuite de la pollution américaine rendrait le respect de ce seuil impossible.
Le retrait américain aura également un impact sur le volet financier de l’accord de Paris et se traduira par une importante baisse des ressources financières que la communauté internationale a décidé de mobiliser pour la mise en œuvre de cet accord. Rappelons que les pays en développement avaient exigé la mise en place d’un important fonds alimenté par les grands pays développés afin d’aider le monde en développement à s’adapter aux transitions nécessaires pour le développement durable. Les Etats-Unis s’étaient engagés au moment de la signature de l’accord à apporter leur contribution financière à cet effort et avait déjà versé 3 milliards de $ sur les 10 promis pour le démarrage du Fonds vert. L’impact financier du retrait américain ne se limitera pas à ce Fonds mais touchera également l’organe de négociation, le CNUCC, dont la contribution américaine a assuré le quart de son budget. Le retrait américain entraînera une forte diminution des ressources financières mises en place pour assurer la transition énergétique ce qui pourrait remettre en cause l’accord et l’adhésion des pays en développement. L’Inde et l’Indonésie avaient déjà annoncé qu’ils réviseront leurs engagements dans le cadre de l’accord de Paris en cas de non-respect des engagements financiers pris par les pays développés.
Enfin, le retrait américain pourrait encourager d’autres pays à se désengager de cet accord qu’ils considèrent contraignant. La Chine, le premier pollueur de la planète et le premier émetteur de gaz à effet de serre, a déclaré à qui veut bien l’entendre qu’elle poursuivra ses efforts de développement et c’est aux pays développés de faire des efforts supplémentaires pour lutter contre le réchauffement climatique.
Au-delà de l’accord sur le climat, la décision américaine est un coup majeur apporté au multilatéralisme. En effet, les nationalismes en vogue dans beaucoup de pays n’ont eu de cesse de critiquer les tentatives de mise en place d’une gouvernance ouverte et solidaire de la globalisation. Ainsi, les accords de libre-échange sont dénoncés, les accords sur le climat sont critiqués et le rôle des institutions multilatérales comme l’Union européenne est contesté au nom de la défense des intérêts nationaux. Il s’agit d’une perspective inquiétante car elle ouvre notre monde sur l’inconnu et les risques d’une compétition qui n’est pas sans nous rappeler des aventures qui ont failli conduire l’humain à sa propre négation.
Mais, en dépit de ses échecs et de la montée du populisme, nous devons poursuivre nos efforts et notre engagement pour construire un monde meilleur et permettre à nos enfants d’hériter une autre planète. Nous devons ici comme ailleurs poursuivre notre engagement pour assurer une transition énergétique qui nous permettrait de réduire les affres du réchauffement climatique. Un engagement qui est une responsabilité vis-à-vis de notre civilisation et des générations futures.
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