La semaine passée n’a pas été celle des bonnes nouvelles pour notre économie nationale. On a vécu une semaine au rythme des mauvaises annonces qui confirment la fragilité de la situation de notre économie nationale. En effet, la sortie du cycle baissier que nous avons espéré rapide après un premier trimestre 2017 prometteur, sera plus lente et douloureuse.
La première mauvaise nouvelle est venue de la Banque centrale qui a annoncé le 14 août que nos avoirs en devises ne couvrent plus que 90 jours d’importation et qu’ils se situent aujourd’hui à 11 672 millions de dinars. Notre balance est largement passée en dessous du seuil de sécurité qui se situe à 110 jours d’importations. Cette dégradation de notre position externe s’explique par un creusement de notre balance externe qui s’est établi à 8,6 milliards de dinars pour les sept premiers mois de l’année, soit une baisse de 26% par rapport à son niveau à la même période en 2016. Ce creusement s’explique par une poursuite de la hausse des importations (18,8%) qui n’est pas couverte par les exportations même si elles connaissent une progression notable lors de la même période (15,9%). Une grande partie de ce déficit provient de trois partenaires commerciaux : la Chine (2,3 milliards de dinars), l’Italie (1,1 milliard) et la Turquie (1,01 milliard de dinars). Par ailleurs, une grande partie de ce déficit provient en grande partie de celui de la balance énergétique qui était de 2,1 milliards de dinars et représente 24,6% du déficit total. L’ampleur de ce déficit et son aggravation expliquent les appels à l’usage de la clause de sauvegarde de l’OMC par certains experts afin de réduire les importations de certains pays. Je reviendrai sur cette question dans une prochaine chronique et j’expliquerai que l’usage de cette procédure n’est pas une simple affaire. Mais, les résultats de la balance courante lors du premier semestre sont significatifs de la dégradation continue de nos échanges extérieurs et du risque grandissant qui pèse sur notre économie.
La deuxième mauvaise nouvelle est venue du côté de la croissance avec la publication des résultats pour le second trimestre de l’année par l’Institut national des statistiques avec des chiffres nettement en dessous des attentes. Pourtant, les résultats du premier trimestre ont constitué une bonne nouvelle et nous ont permis d’espérer un retournement du cycle récessif qui dure depuis deux ans. Or, les résultats du second trimestre annoncent l’essoufflement de ce trend. En effet, la croissance se situera autour de 1,8% en glissement annuel par rapport à l’année passée. Mais, surtout il n’a été que 0,1% par rapport au 0,8% du premier trimestre. Parallèlement à la croissance globale, il faut indiquer que ce trend est porté par le secteur agricole et surtout nous confirme la panne qui se poursuit dans le secteur manufacturier et industriel qui sont au cœur de notre dynamique économique et de la diversification de notre économie. Mais, ces résultats montrent que notre reprise sera plus longue et plus douloureuse et que le renversement du cycle dépressif sera plus lent.
De surcroît, comme le dit l’adage, jamais deux sans trois. A ces deux mauvaises nouvelles du début de la semaine s’est rajoutée une troisième à la fin de la semaine passée avec la dégradation de la note de la Tunisie par l’agence Moody’s. Avec cette dégradation, nous franchissons une étape dangereuse et la note de notre pays passe de Ba3 à B1 qui est une note « très spéculative ». Le rapport de l’agence Moody’s évoque plusieurs éléments qui expliquent cette décision dont la dégradation de notre position externe, le déficit public ainsi que le retard dans la mise en œuvre des réformes. Cette décision aura des effets sur notre économie et particulièrement dans notre recours aux marchés internationaux et se traduira par une hausse de la prime de risque exigée par les investisseurs lors de nos prochaines sorties sur les marchés.
Ainsi, trois nouvelles importantes en une semaine qui viennent nous rappeler la fragilité de notre situation économique et les dangers qui guettent notre processus de transition économique. Est-ce pour autant que l’horizon est bouché et que nous devons nous résigner devant le pessimisme ambiant ? Nous pensons qu’en dépit de la gravité de la situation nous devons nous atteler à sortir notre pays et notre économie de la crise profonde que nous traversons. Dans cette sortie de crise nous devons apporter des réponses au double manquement qui a caractérisé l’action publique depuis plusieurs mois : celui de la vision et celui de l’action. Nous devons nous doter d’une vision économique claire et audacieuse pour répondre aux trois défis essentiels de notre économie à savoir : la crise des finances publiques, la reprise franche de l’investissement et les réformes économiques. Mais, la vision aussi audacieuse ne nous permettra pas de redresser la situation économique si elle ne s’accompagne pas d’une capacité d’exécution et de mise en œuvre importante.
47