La mission du Quartet ne s’est pas arrêtée à la formation du nouveau gouvernement. Le plus dur, dans le contexte tunisien au lendemain des assassinats politiques, était de rassembler tous les partis autour d’un même gouvernement. Ainsi, des rencontres ont eu lieu entre quartet, partis politiques et nouveau gouvernement, afin d’offrir à ce dernier un environnement favorable et le soutenir dans cette période de transition. Quels soutiens peuvent-ils offrir et quels rôles peuvent-ils jouer ?
À une situation politique bloquée s’ajoute la vulnérabilité de nos frontières qui ont fait de la Tunisie une passoire pour les armes et les cellules terroristes. La sécurité quotidienne s’est aussi effondrée et le ministère de l’Intérieur peine même à assurer la sécurité du simple citoyen. Les investisseurs ont commencé à quitter le pays et l’économie s’est effondrée tandis que prospérait la contrebande et les marchés parallèles. À la veille de la formation du nouveau gouvernement, le dinar tunisien avait atteint son plus bas niveau et des manifestations à caractère socioéconomique, en protestation contre l’augmentation des impôts et des prix, secouaient la Tunisie allant parfois jusqu’à l’affrontement avec la police et à des révoltes violentes dans les régions. Cependant la situation semble se normaliser graduellement depuis l’arrivée de Mehdi Jomâa et la constitution de son gouvernement, mais cela ne veut pas dire un retour définitif à ola stabilité.
Entre soutien, évaluation et contrôle
Le président de la Ligue tunisienne des Droits de l’Hommes, l’une des composantes du quartet, maître Abdessatar Ben Moussa, avait annoncé avant l’une des rencontres avec Mehdi Jomâa au mois de février, que la réunion avait pour but d’évaluer le rendement du nouveau gouvernement et son respect des engagements pris. Il a aussi évoqué une éventuelle commission de suivi des travaux du nouveau gouvernement, constituée par des représentants du quartet et de partis politiques.
Les revendications présentées lors du Dialogue national, précédant la constitution du nouveau gouvernement, rassemblaient plusieurs points, parmi lesquels: la révision des nominations partisanes au sein de l’Administration et des institutions tunisiennes dénombrées par milliers (partisans de la Troïka) et la dissolution des Ligues pour la protection de la Révolution devenues sources de troubles violents menaçant la société civile et les réunions des partis. L’une des principales revendications fut aussi la neutralisation des mosquées devenues dans plusieurs villes un lieu d’incitation à la haine, voire au meurtre.
La commission a pour mission de suivre et de contrôler l’application de ces deux points, faute de quoi les élections seront impossibles. Le gouvernement de Mehdi Jomâa s’est également engagé à rétablir la sécurité au quotidien, tout comme sur le plan de la sécurité de l’État et du territoire. À cette fin, il faudra neutraliser, unifier et optimiser le rendement des ministères de la Défense et de l’Intérieur. Sans le retour de la sécurité, premier vecteur de l’investissement, il est vain d’espérer le retour d’un climat favorable à la reprise des affaires.
Sur le plan social, enflammé à la veille de la composition du gouvernement de Mehdi Jomâa, l’UGTT devrait calmer les protestations sociales et mettre fin aux grèves afin d’apaiser le climat qui sera ainsi favorable à l’investissement. L’Union pour la Tunisie — front constitué de cinq partis — le Parti Républicain et Ennahdha se sont proposés pour faire partie de la commission effectuant suivi et contrôle et appuyant le bon fonctionnement du gouvernement.
De plus, la commission travaillerait en collaboration avec l’UGTT. Une réunion mensuelle est prévue et des réunions de travail hebdomadaires seront organisées afin de traiter des dossiers brûlants. Dans le but d’optimiser et d’organiser les travaux de la commission, une rencontre a eu lieu le 18 mars dernier entre le chef de file d’Ennahdha, Rached Ghannouchi et le leader du Parti Républicain, Ahmed Néjib Chebbi, durant laquelle ils ont discuté de la création d’un espace de dialogue et d’examen des situations politique et économique.
En matière de soutien, arriver à un consensus est une priorité dans l’instauration d’un environnement sain pour la Tunisie et pour le gouvernement de Mehdi Jomâa. Tempérer les passions de leurs partisans et cultiver une vraie culture d’acceptation de l’autre sortiraient la Tunisie d’un climat oppressant et chargé de violence. Pouvoir se réunir autour d’une même table, participerait à l’aboutissement à des élections offrant une chance égale à tous.
Hajer Ajroudi