Notre pays connaît un taux de croissance du PIB lent et laborieux, faute d’avoir trouvé une véritable “locomotive” pour tirer de façon vigoureuse l’ensemble des secteurs d’activités économiques.
En effet, l’investissement est en panne, les exportations traînent le pas et la consommation intérieure a atteint ses limites et débouche sur une inflation galopante.
Et si l’agriculture et l’agro-alimentaire pouvaient assumer le rôle de moteur de croissance !
Rappelons d’abord que l’agriculture ne représente que 9% du PIB et qu’elle emploie 18% de la population active. Deux conclusions peuvent être tirées de ces chiffres. D’abord, la forte intensité de la main-d’œuvre accaparée par cette activité qui, malheureusement, ne contribue pas assez à la création de la richesse nationale. Ensuite, la faible valeur ajoutée de l’agriculture qui interpelle et suscite des suggestions en faveur de la montée en puissance et du développement de ce secteur vital dans l’économie du pays.
Certes, il y a des bémols à ces constats : l’agriculture fournit aux paysans une autosuffisance alimentaire, ce qui n’est pas négligeable, retient et attache les paysans à leur région et à leurs terres.
En effet, longtemps négligée, sous-estimée et occultée, l’agriculture se révèle à la faveur des défis de la sécurité alimentaire et de la flambée des prix des produits agricoles, comme un enjeu de taille susceptible de favoriser sous certaines conditions, le processus de la croissance économique.
Notre pays dispose d’atouts majeurs qui doivent être quand même valorisés et mobilisés.
Il s’agit du climat favorable aux cultures fruitières et maraîchères de primeurs et d’arrière-saison par rapport à l’Europe, avec une grande proximité, ce qui constitue des avantages naturels considérables pour l’exportation de nos produits.
Il y a également le savoir-faire ancestral de nos paysans qui se conjugue avec un patrimoine riche en matière de produits du terroir.
Cependant, les obstacles et les difficultés ne manquent pas lorsqu’il s’agit de moderniser et développer notre agriculture.
D’abord, la pénurie d’eau et la sécheresse croissante. Ensuite, les difficultés d’accès au financement et à l’assurance contre les catastrophes naturelles. Enfin, l’inexistence de structures appropriées et transparentes pour la collecte des récoltes, la commercialisation et la logistique de transport et d’exportation dans le strict respect de l’hygiène et de la conservation des produits périssables.
Les chiffres avancés par les agriculteurs font mal au cœur et surtout à la raison. 8% seulement des paysans assurent leurs récoltes et 12% seulement accèdent au crédit bancaire. N’ayant pas remboursé la totalité de leurs dettes, 50% sont exclus du système bancaire.
A côté de l’huile d’olive et des dattes qui montent en puissance au niveau du volume de production et du potentiel d’exportation et constituent des pôles majeurs de la prospérité agro-alimentaire, nous devons trouver d’autres niches pour faire prospérer notre agriculture. Non seulement dans le sens de la consolidation de la sécurité et de l’autosuffisance alimentaires, mais pour aller au-delà, dans le sens de la promotion des exportations, de la création de la valeur ajoutée et de l’emploi.
A l’exception des grandes plaines céréalières du Nord-Ouest, Medjez El Bab, Béja, Jendouba et Le Kef, notre pays est celui de la petite propriété et de la micro-exploitation, peu mécanisée et plutôt artisanale et familiale, ce qui n’est pas péjoratif pour un sou, au contraire, il se prête parfaitement à la culture intensive avec des pratiques respectueuses de la biologie, de la protection naturelle, de la fertilité des sols et de la conservation des eaux de pluie.
Cela valorise les produits issus de la culture du sol selon les normes “Bio” (après certification), notamment à l’exportation et sur les marchés européens.
Notre pays a déjà reconverti en bio une partie de ses cultures : oliviers, dattes, agrumes et grenades. Il s’agit d’accélérer cette orientation qui est celle de l’avenir, car les prix sur les marchés européens sont presque le double.
Il y a une autre niche qui mérite d’être mieux exploitée et valorisée, c’est celle des produits du terroir pour lesquels il faudrait adopter une démarche AOP et/ou AOC (produits d’appellation d’origine protégée ou contrôlée). Pourquoi ne pas labelliser tous les produits de terroir ?
Les investissements agricoles ne représentaient que 10% de la totalité des investissements durant la dernière décennie, ce qui est dérisoire, alors que les investissements réalisés par les privés durant les cinq dernières années ont atteint 58% des investissements agricoles et le co-investissement par des étrangers dans l’agriculture a été admis récemment sans autorisation, à concurrence de 66% avec accès à des avantages fiscaux et financiers incitatifs et substantiels.
C’est ainsi que 540 MD ont été investis dans l’agriculture jusqu’à fin 2016 par des étrangers, notamment dans les cultures de légumes géo-thermiques, fruits et élevage bio, légumes et fruits précoces.
Il faut reconnaître cependant qu’il y a beaucoup à faire dans notre pays en matière de stations de conditionnement de fruits et légumes, ainsi que dans l’organisation des circuits officiels de commercialisation des produits agricoles (marchés de gros équipés de chambres froides), mais aussi dans le secteur de la transformation industrielle des produits agricoles et la fabrication de produits alimentaires.
En effet, établir la traçabilité (coordonnées des fermes de production, variétés, dénominations des produits et marque d’origine) grâce à un calibrage et à un conditionnement appropriés avec contrôle d’hygiène et de qualité, s’impose pour valoriser les produits agricoles sur le marché local et à l’export.
Les usines de transformation, jus de fruits, conserves, confitures, ne couvrent pas toutes les régions de production et ne fonctionnent que quelques mois par an, ce qui n’est pas rentable et constitue un gâchis pour l’économie nationale.
Il faut absolument réviser le système grâce à des partenariats novateurs avec de grandes enseignes européennes qui diversifient et améliorent de façon sensible la qualité des produits et ouvrent les marchés extérieurs à nos produits.
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