Le pays au bord de la faillite, le citoyen perdu ne sachant plus à quel saint se vouer, sur le ring de l’ARP, on est passé au pugilat physique, à la Kasbah, on va gérer les affaires courantes et entre Saïed et Ghannouchi, mieux vaut s’abstenir de tout commentaire tellement les relations sont envenimées contrairement aux apparences.
Angoissé, désabusé, déprimé, appauvri, affamé et paniqué, le tunisien regarde, abasourdi, cette scène politique dont les principaux acteurs n’ont d’yeux que pour leurs intérêts propres aussi étriqués soient-ils.
Faut-il croire que ce pauvre citoyen en a pour ses frais, puisque c’est lui qui a permis à ces acteurs de venir jouer devant lui une pièce qui ne parle pas de ses préoccupations ou besoins, les ayant lui-même élus ? La question mérite d’être posée car ce qui se passe est criminel à l’égard de tout le pays. Mais qui en profite au juste ?
Ce qui se passe sur la scène politique est très grave. Cela relève tout simplement, du crime. Le pays n’arrive pas à trouver un brin de stabilité depuis dix années. Aucun gouvernement n’a tenu et comme par hasard, à l’origine de cette instabilité ce sont toujours les mêmes. Ceux venus de nulle part et qui mènent le pays vers l’inconnu, vers un vide exécutif pour perdre encore un temps dont le pays ne dispose plus. Un temps pour d’interminables pourparlers d’abord pour choisir la personnalité qui sera chargée de constituer la nouvelle équipe gouvernementale et par la suite des membres de cette équipe et de la part de chacun dans ce gouvernement.
Jusqu’à la dernière minute, la guerre qui oppose le locataire de Carthage au Cheikh à la double casquette, chef du parti islamiste et président de l’ARP, aura fait abstraction de l’intérêt du pays et de son peuple, malgré les discours de circonstances.
Pour contrer la motion de retrait de confiance au gouvernement et son chef Kaïs Saïed a fait démissionner son poulain. Joli point marqué mais à quel prix? Pour sa part, Fakhfakh, comme pour se venger, limoge tous les ministres nahdhaouis pour les remplacer par ses ministres à lui. Cette démarche n’est pas sans rappeler celle entreprise par son prédécesseur. Comme qui dirait que l’histoire est un éternel recommencement.
Rached Ghannouchi, lui, qui est toujours sous la menace d’une motion de retrait de confiance qui traîne à voir le jour pour des raisons inconnues mais soupçonnables, n’a pas réussi à ,prendre la main pour désigner un candidat pour la Kasbah.
C’est à ,un véritable match de Ping Pong que l’on assiste et qui risque de se poursuivre dans la mesure où la démission de Fakhfakh a ouvert la voie à une nouvelle crise plus grave encore car d’ordre constitutionnel et qui sera difficile à résoudre en l’absence de bon sens et surtout d’une Cour constitutionnelle. Les surenchères ont déjà commencé.
La bataille va porter, désormais sur le timing de qui a précédé l’autre : la démission ou le dépôt de la motion de retrait de confiance de Fakhfakh.
Le pays risque la paralysie par le blocage politique qui pourrait s’installer et qui ne manquera pas d’envenimer encore plus les relations entre Kaïs Saïed et le chef d’Ennahdha.
Le parti islamiste croyait avoir gagné la partie et isolé le chef de l’Etat mais il s’est par la même dévoilé et découvert ses cartes. Il s’agissait pour lui de reprendre le pouvoir et de gouverner. Plus question de rester marginalisé au sein de l’exécutif alors qu’il est la première force politique du pays disposant du bloc parlementaire le plus fourni.
Sauf que à malin, malin et demi. Saïed, ne laisse pas passer l’occasion et se replace à nouveau au centre du jeu et selon l’article 89 de la constitution c’est à lui que revient la désignation d’un nouveau chef de gouvernement dans un délai de moins de deux semaines, soit dix jours. La personnalité désignée aura deux mois pour former une équipe et convaincre le parlement.
Du temps perdu pour un pays en perdition. La partie de Ping Pong entre Carthage et Montplaisir se poursuit.
A qui va profiter la crise? On le saura, peut être dans les jours qui viennent. Ce qui est certain, les perdants, ce sont la Tunisie et les tunisiens. Dommage !
F.B