A la recherche de la croissance perdue

J’ai passé un peu de temps au cours des derniers jours avec Nacer Khmir, notre artiste et metteur en scène, pour évoquer son expérience et sa contribution importante au projet culturel tunisien. Un long moment d’échanges et de discussions où nous avons évoqué sa production cinématographique et la beauté de ses films dont « Le collier perdu de la colombe », réalisé en 1990.
Le titre de ce film m’est revenu en lisant le dernier rapport de l’Institut national des statistiques sur les dernières performances de notre économie au cours de l’année 2017 et qui confirme que la croissance reste introuvable au sein de notre économie. Ce rapport souligne que la croissance a été de 2% au cours du quatrième trimestre de l’année écoulée, ce qui nous ramène à une croissance annuelle moyenne de 1,9%. Cette croissance, même si elle est nettement supérieure à celle enregistrée au cours de l’année 2016 qui n’a été que de 1%, reste faible et nettement en dessous des prévisions officielles qui la situait à 2,5%. La faiblesse de cette croissance est le résultat des faibles réalisations des grands secteurs économiques. Ainsi, le secteur des industries mécaniques qui est le cœur de notre modèle de développement, n’a enregistré une croissance que de 1,4%. La croissance du secteur agricole a été de 2,5%, en dépit d’une bonne pluviométrie.
La faiblesse de cette croissance est le résultat du recul des industries non manufacturières du fait du blocage de la production dans la zone minière et de la production pétrolière et de gaz. La croissance dans ce secteur a été négative de -3,8%, ce qui pose un défi majeur devant le gouvernement pour sortir et du blocage de la transition économique et de la crise interminable dans la région minière et dont l’ombre plane sur notre économie depuis le lendemain de la Révolution.
Les performances économiques de l’année passée n’ont été sauvées que grâce aux performances du secteur des services commerciaux qui a enregistré une performance de près de 4,3%, en grande partie résultant de la bonne dynamique du secteur touristique et du secteur des services financiers qui ont permis à notre économie de parvenir à une croissance moyenne de 1,9% au cours de l’année 2017.
Cette faiblesse de la croissance a eu d’importants effets, dont le plus immédiat est le maintien du chômage à des niveaux élevés. Ainsi, le taux de chômage est passé de 15,3 à 15,5% au cours de l’année 2017.
Les résultats de l’année 2017 et la poursuite de la croissance faible posent de grandes interrogations sur l’efficacité des stratégies adoptées jusque-là en matière de croissance. Les politiques économiques ont jusqu’ici fait le choix de mettre l’accent sur l’amélioration de l’environnement afin d’encourager les entreprises à investir et à retrouver le chemin d’une croissance perdue. Or, les résultats enregistrés montrent les limites de ce choix et la nécessité de sortir de cette croissance faible en mettant l’accent sur une nouvelle dynamique capable de sortir les investisseurs de leur attentisme et de leur léthargie.
J’ai évoqué depuis un certain temps l’idée d’un grand programme d’investissements structurants. J’avais souligné que ce programme aurait plusieurs effets dont les plus visibles seront la relance de la croissance, l’amélioration de notre compétitivité, la diminution de notre retard en matière d’infrastructures et l’exhortation du secteur privé à sortir de sa léthargie.
Les pouvoirs publics doivent s’activer à définir ce programme de grands travaux structurants car il est capable de nous permettre de retrouver la croissance perdue, de relancer la transition économique et de redonner espoir et confiance dans le succès de la transition démocratique.

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