La loi sur la dénonciation de la corruption et la protection des dénonciateurs a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) le soir du mercredi 22 février, après une attente qui n’a que trop duré.
Intervenant dans Expresso de ce jeudi 23 février, Abid Briki, ministre de la Fonction Publique et de la Gouvernance, s’est félicité de cette adoption, fustigeant, par la même occasion, la polémique qui a tourné autour du report de la plénière du mardi 14 février en raison de son déplacement à Dubaï. « Le gouvernement d’union nationale était visé. Il faut signaler que l’Exécutif a apporté des améliorations au projet de loi, et la commission des consensus les ont acceptées », déclare-t-il.
« Dénoncer n’est pas un acte de lâcheté »
Le ministre affirme que dénoncer est désormais devenu un droit fondamental. « Le citoyen a le droit de dénoncer les dépassements en politique, étant donné que c’est lui qui a élu les responsables. Il faut, en finir avec cette conception selon laquelle dénoncer est un acte de lâcheté, une manière de vendre son âme. C’est une conception très répandue dans la conscience populaire« , souligne-t-il.
Abid Briki poursuit en déclarant que la loi sur la dénonciation de la corruption et la protection des dénonciateurs s’inscrit dans le cadre des accords et conventions internationaux auxquels la Tunisie a adhéré. « Il y a un risque de subir des abus après la dénonciation. C’est la raison pour laquelle le texte a été présenté sous forme d’une loi fondamentale, renforçant le principe constitutionnel relatif à la dénonciation de la corruption et la protection des dénonciateurs », explique-t-il encore.
Il considère que la nouvelle loi est équilibrée et qu’elle aura un effet rétroactif. Ainsi, les affaires des dénonciateurs ayant subi des abus avant l’adoption du texte seront étudiées au cas par cas. « C’est une proposition du ministère de la Fonction Publique. Elle permettra de savoir si le dénonciateur a subi des abus ou non dans le passé », ajoute le ministre.
Toute dénonciation abusive sera punie
Abidi Briki met en garde, d’autre part, contre toute dénonciation abusive de la corruption. La loi, selon lui, protège non seulement les dénonciateurs, mais aussi les dénoncés, du moins avant que leur implication ne soit prouvée. « La loi comprend un volet sur la protection des données personnelles, et comme nous le savons, l’accusé est innocent jusqu’à preuve du contraire. Toute dénonciation abusive, basée sur la diffamation, est sévèrement punie par la loi. Les sanctions peuvent être pécuniaires, allant jusqu’à l’emprisonnement », explique le ministre de la Fonction Publique.
Toute plainte doit être déposée auprès de l’Instance Nationale de lutte contre la corruption (INLUCC). C’est l’instance qui sera chargée, avec l’administration, de l’enquête. Dans ce contexte, le ministre appelle chaque citoyen à présenter des dossiers avec des preuves sûres. « Finie l’époque de la peur de dénoncer », insiste-t-il.
Face à la question relative à l’identité des parrains de la corruption, posée par Wassim Ben Larbi, Abid Briki affirme que leur identité est bien connue. « Le problème est d’arriver à suivre les traces de ces parrains de la corruption. Ils sont passés experts en matière d’effacement des traces. J’appelle tous ceux qui ont des preuves sur ces parrains à les transmettre à l’INLUCC », déclare encore le ministre.