Les autorités se veulent rassurantes, malgré l’épidémie de peste des petits ruminants qui sévit dans le pays, il n’y aurait aucun danger pour le consommateur tunisien. Le virus ne se transmet pas de l’animal à l’homme. Mais peut-on encore consommer du mouton tunisien quand on sait que la maladie se manifeste par des diarrhées et des sécrétions salivaires abondantes remplies de germes ? N’aurait-on pas mieux fait de nous trouver une fetwa sur mesure pour nous épargner les dangers et les méfaits sanitaires de la viande de cette bête?
Soyons positifs : il ya les bons côtés de l’Aïd : c’est tout une symbolique, très belle d’ailleurs. C’est l’enfance de tout un chacun chez nous, ce sont les retrouvailles, ce sont les repas cuits et pris ensemble, c’est la fête, et pour les nutritionnistes, les ambiances conviviales sont toujours appréciées. En ce qui concerne la viande de mouton, il est vrai que ces derniers temps, elle n’a pas plus du tout bonne réputation, à cause notamment de toutes ces maladies auxquelles elle est exposée et de sa forte teneur en cholestérol, mais on peut lui trouver de bons côtés si on sait bien l’utiliser, en particulier dans la cuisson. Quelques conseils utiles collectés chez nos nutritionnistes de l’Institut national de nutrition de Tunis.
Mouton et cholestérol
Pour les personnes qui ont déjà un taux de cholestérol sanguin élevé que faire ?
Comme c’est une fois par an l’Aïd el Kébir et on ne peut pas leur dire de ne pas consommer de viande, alors que tous autour se délectent, insistent les spécialistes de la diététique. On va leur conseiller les morceaux les moins gras. Ce sont les morceaux pris dans les parties où l’animal bouge beaucoup. Donc le jarret « la meftoula » et le gigot qui sera préféré à l’épaule. On peut aussi laisser refroidir la viande et la dégraisser tout simplement en retirant le gras, même si elle a été cuite avec. La meilleure cuisson reste à la vapeur avec beaucoup d’herbes fines.
Il est important de ne pas manger de grandes quantités, de ne pas faire d’excès. On n’est pas obligé de consommer tout le mouton en 2 ou 3 jours. On peut congeler la viande a -18degré (moins dix huit), et là on peut la garder même au-delà de six mois, sinon il faut la consommer dans les jours suivant l’abattage.
Il faut bannir certaines habitudes lors des repas de l’Aid, habitudes « mortelles » : il faut éviter de boire toutes ces boissons gazeuses, pour soi-disant digérer. Ceci est infondé, c’est trop de sucre avec trop de gras. Une bonne hygiène alimentaire recommande de boire à la fin des repas et pas pendant, et boire de l’eau ou des tisanes.
Toujours dans le chapitre des mauvaises habitudes tunisiennes : la consommation de graisse animale crue (lya) au moment où on égorge le mouton pour une longévité. Ceci est faux, c’est même au contraire qu’il faut s’attendre.
Les bonnes habitudes, c’est de manger beaucoup de crudités, du fenouil, des radis, des carottes, des salades vertes, des fruits de saison. Toutes ces fibres contenues dans ces crudités de saison vont aider à la digestion.
Dans notre entretien avec les nutritionnistes, certains aliments présents sur toutes les tables de l’Aid, ont eu leur aval et leur forte recommandation. Il s’agit des piments, des poivrons, de l’ail et de l’huile d’olive : ils sont connus pour leur richesse en flavones, qui sont des éléments anti oxydants, donc qui empêche le vieillissement cellulaire, qui ont un effet protecteur. Ca se conserve bien et c’est typiquement tunisien bien entendu comme pour tout il faut en consommer en petites quantités, mais en consommer.
Santé et traditions culinaires
Pour les recettes incontournables, quelques précautions seront à prendre. Nos nutritionnistes s’inquiètent pour la technique d’abattage : après avoir égorgé l’animal, il faut faire saigner la viande pendant 24h, quelques heures à l’air libre puis la mettre au réfrigérateur. On ne la consomme pas le jour même. C’était une ancienne habitude : « on envoyait en pèlerinage le mouton », et elle est bien fondée. La viande sera ainsi plus digeste. Le jour J on va utiliser le reste, c’est à dire les abats, le foie, les tripes.
Pour les grillades
De préférence, on va utiliser le foie, partie noble de l’animal, le premier jour. La viande sera consommée à partir du deuxième jour. Pour les grillades, il ne faut jamais mettre en contact la viande avec le charbon. Il faut toujours la surélevée. Bien entendu il faut éviter de manger la graisse qu’il y a autour de chaque morceau de viande grillé.
Pour le plat typique « klaya »
On peut garder la même recette traditionnelle, mais l’alléger .il ne faut pas utiliser de l’huile et surtout ne pas faire mijoter cette huile. la klaya est assez intéressante puisque elle est composée des morceaux nobles, riche en fer notamment. On peut ne pas mettre de morceaux de graisse ou alors ne pas les manger.
Panse et trippes farcies
Ce plat dit « Osben » serait une préparation très intéressante, selon nos spécialistes, car c’est une très bonne association. il y a des légumes, blettes, épinards, persil, oignons, ail, des céréales, des pois chiches, des abats et des tripes qui en fait, ne sont pas plus grasses que le reste de la viande. Si on peut éliminer la « lya », c’est tant mieux sinon, la laisser pour parfumer mais ne pas la manger.
La viande séchée
Dans nos habitudes, la viande de l’Aid c’est un petit peu pour manger et beaucoup pour donner et conserver. La viande séchée et salée (Kaddid) est une viande qu’on fait sécher au soleil. Si elle est mal séchée, elle est humide et devient propice à une invasion microbienne, même si on a mis beaucoup de sel. La faire sécher sous des sachets en plastiques, pour soi-disant la protéger des mouches , ça fait un effet de serre et c’est aussi dangereux.
Les issues de l’animal
Il s’agit de la tête du mouton et des quatre pattes. Elles sont composées d’une viande gélatineuse, donc difficile à digérer pour certaines personnes, mais c’est une viande peu grasse. L’idéale serait d’enlever la peau et de faire cuire ces issues a la vapeur, et jeter l’eau. C’est d’un goût exquis surtout si on a pris le soin de bien assaisonner avec des fines herbes et de l’ail. Quant à la cervelle, il faut la faire cuire à la vapeur en même temps que la tête, mais pas en beignets, sauf s’ils sont cuits au four.
Bonne fête à tous
Samira Rekik