A fin de sortir de la crise économique et financière dans laquelle nous ont enfoncés les différents gouvernements qui se sont succédé durant six ans, les pouvoirs publics sollicitent le soutien et l’aide des bailleurs de fonds internationaux et des grandes puissances.
Mais alors, quels sacrifices et quels efforts avons-nous fait ou devons-nous consentir pour mériter l’aide de la communauté internationale et relancer l’économie du pays en crise profonde ?
En réalité, pouvoirs publics et populations continuent à se comporter et à vivre comme si nous étions un pays riche et prospère, en pleine expansion économique et dans une grande aisance sociale.
En effet, bien que notre balance commerciale extérieure soit largement déficitaire, nous continuons à importer pour plusieurs milliards de dinars chaque année des produits luxueux, futiles et superflus, dont certains concurrencent des produits industriels tunisiens.
Bien que le budget de l’Etat consacré aux projets de développement soit modeste, soit 5 milliards de dinars en moyenne au cours des cinq années, la capacité de réalisation de notre appareil administratif n’a pas dépassé en moyenne 50%. La complexité des problèmes fonciers et des formalités administratives est devenue un obstacle majeur vis-à-vis de nos actions et programmes d’investissement à cause du manque de volonté et de mobilisation de notre appareil administratif.
Le budget de l’Etat pour 2016 consacre aux salaires de la fonction publique, 13 milliards de dinars, soit environ 50%, ce qui est beaucoup pour un pays en mal de croissance économique avec un budget déficitaire.
Malgré cela, nous empruntons à l’étranger pour financer les salaires et rembourser des échéances de crédit de plus en plus lourdes.
Le pays continue à mener un train de vie fastueux : voitures de luxe, frais de mission et réceptions somptueuses, rémunérations confortables.
Les clubs sportifs continuent à recruter des entraîneurs étrangers payés à prix d’or en devises et à financer des transferts de joueurs coûteux, pour honorer le football spectacle.
Des chanteurs et des orchestres étrangers bénéficient de cachets en devises faramineux pour animer des festivals, organisés un peu partout dans le pays durant tout l’été.
Pourvoir législatif et exécutif, Administration, entreprises et particuliers continuent à vivre au dessus de leurs moyens, alors que nous sommes en guerre contre le terrorisme avec un endettement lourd, des difficultés de liquidités et une crise socio-économique de plus en plus profonde.
Sommes-nous crédibles lorsque nous demandons à la communauté financière internationale d’investir chez nous, alors que nous n’investissons pas nous-mêmes ou pas assez, aussi bien au niveau de l’Etat que celui des entreprises privées.
Les pouvoirs publics ne font rien pour inciter les ménages à épargner, c’est pourquoi le niveau de l’épargne nationale est au plus bas.
En outre, les grandes réformes de structures qu’elles soient économiques ou d’ordre social et culturel sont lentes et timides, il n’y a pas d’empressement ni d’enthousiasme pour aller de l’avant et changer l’ordre établi.
L’Administration doit se mobiliser pour assumer son rôle et sa responsabilité dans le développement du pays.
La lutte contre la corruption et la contrebande manque de volonté politique prouvée et de mesures concrètes et efficaces pour avoir un effet d’annonce sur le climat de l’investissement et les acteurs économiques.
La réforme du système bancaire reste inachevée : certes, il y a eu recapitalisation des banques publiques, mais celle des banques privées reste encore à faire surtout qu’elles connaissent de graves difficultés de liquidités, or la croissance économique dépend en grande partie du dynamique des PME qui ont besoin de financement pour créer des emplois, exporter, moderniser leur outil de production et promouvoir leur expansion.
La réforme fiscale est encore balbutiante, timide et hésitante pour être efficace, alors que l’évasion fiscale est évaluée à plusieurs milliards de dinars chaque année, ce qui nous aurait épargné des crédits extérieurs coûteux à rembourser en dinars dont la valeur s’effondre chaque semaine.
En effet, les professions libérales et commerciales, celles qui gagnent le plus d’argent sont celles qui ne paient que des montants dérisoires au fisc.
Il serait logique et indispensable que les Tunisiens contribuent par leur devoir fiscal au financement du budget de la Nation et à celui de l’investissement, avant de faire appel aux bailleurs de fonds extérieurs. Nous devons donner l’exemple et montrer la voie.
Apparemment le gouvernement a des scrupules pour appliquer une politique d’austérité pourtant nécessaire et urgente.
Il pourrait craindre une levée de boucliers de la part des syndicats des travailleurs dans la mesure où cette austérité ne serait pas bien comprise et partagée par les nantis ou les privilégiés de tous les régimes passés, présents et peut-être futurs ?