Voulant apporter son appui spécifique aux projets innovateurs portés par les jeunes diplômés et les étudiants et répondre aux enjeux de la digitalisation des entreprises, l’Agence de promotion de l’industrie et de l’Innovation (APII) a participé, pendant deux jours, au « Tunisia Digital Summit », un événement, dédié à la transformation digitale et au suivi des nouveautés des technologies. Indépendamment de son impact négatif, la crise sanitaire liée à la propagation du Covid a permis d’accélérer le rythme de la transition numérique du pays et favoriser les échanges numériques entre les différentes structures de l’Etat. C’est le cas d’ailleurs de l’APII où la numérisation des services et des documents s’est imposée en force depuis le premier confinement en 2020, bien que cela existe depuis déjà prés d’une vingtaine d’années.
Organisée en marge de cet événement à l’initiative de l’APII, la seconde édition de TDS Hackathon destinée aux étudiants des écoles d’ingénieurs a permis de connecter directement 6 groupes d’étudiants, les plus talentueux des écoles d’ingénieurs en Tunisie, pour trouver des solutions digitales innovantes dans le domaine des Data Sciences, Data Analysis et Data Visualisation autour de la thématique « Suivi de l’évolution de la pandémie du Covid ». TDS Hackathon a été aussi une occasion pour encourager les jeunes porteurs de projets à utiliser leurs compétences et développer les idées innovantes. Dans une déclaration à Réalités, Kamel Ouerfelli, directeur de l’Innovation à l’APII, a déclaré que TDS Hackathon permet aux jeunes porteurs de projets de trouver des solutions.
Quant à l’APII, son objectif est d’identifier des idées de projets innovants qui peuvent être accompagnés via son réseau de pépinières d’entreprises implantées dans tous les gouvernorats du pays, et qui assure des prestations en matière de formation, d’accompagnement et d’hébergement.
Outre TDS Hackathon, l’APII a organisé deux conférences sur des thèmes différents. La première a porté sur les services digitaux alors que la deuxième a été axée sur le financement des projets innovants. L’objectif est de partager l’expérience de l’APII en matière de digitalisation et de numérisation de ses services avec les différents intervenants.
Ouerfelli a par ailleurs indiqué que l’APII s’est inscrite dans le circuit de la digitalisation depuis l’année 2000 et c’est depuis cette date qu’elle offre des services en ligne. « Cette année, on a créé un site web avec un annuaire des entreprises industrielles classées selon leur secteur d’activité avec une recherche multicritères couplée par un salon virtuel pour visiter l’entreprise en ligne sans devoir se déplacer», a-t-il déclaré, avant de rappeler qu’en 2003, l’APII a également mis en place le service de déclaration d’investissement en ligne et ce, malgré l’absence de toute législation organisant le processus.
Tout en ligne depuis juin 2020
Poursuivant dans ce sens, il a tenu à préciser que la crise sanitaire actuelle liée à la covid-19 a fortement accéléré la digitalisation des services fournis par l’APII notamment en ce qui concerne les déclarations d’investissement en ligne où tout le processus est devenu en ligne. Depuis ce changement, le promoteur remplit le formulaire et paye les frais en ligne et reçoit la déclaration signée électroniquement. Selon lui, cela est devenu possible avec la signature, en juin 2020, d’un décret-loi permettant de reconnaitre les documents électroniques. Et d’ajouter que « la Covid a également poussé l’APII à signer un document portant sur un service de recevabilité des dossiers de constitution en ligne. En vertu de cet accord, les promoteurs ne seront plus obligés de se déplacer pour soumettre leurs dossiers à l’interlocuteur unique de l’APII. Ils déposent le dossier en ligne et l’interlocuteur unique fait aussi la vérification en ligne ».
« Actuellement, le service des déclarations d’investissement sont à 100% assurés en ligne même pour la signature électronique alors que le paiement en ligne représente 45%. Nous avons laissé à ceux qui ne sont pas habitués au paiement électronique de payer avec les autres moyens, mais la tendance s’accélère aujourd’hui puisqu’on traite plus de 1200 déclarations par mois, soit 15 mille déclarations signés en ligne par an», a-t-il assuré.
Kamel Ouerfelli a par ailleurs souligné que l’APII essaye d’apporter un appui aux entreprises tunisiennes pour améliorer leurs compétitivités à travers des programmes d’accompagnement en innovation et des actions en assistance. Elle encourage aussi l’innovation par le biais du concours national de l’innovation, organisé chaque deux ans, par l’APII, et visant l’accélération du rythme de création de startups innovantes initiées par des jeunes diplômés et des étudiants en classes terminales dans les secteurs de l’industrie, de la technologie et de l’informatique.
Interrogé sur le climat des affaires, Kamel Ouerfelli a évoqué plusieurs handicaps dont principalement la loi d’investissement de 2017 qui contient, selon lui, plusieurs articles pénalisant pour l’investissement, comme clui qui oblige l’investisseur à entrer en production après une année de la date du dépôt de la déclaration sinon il sera exclu des avantages de l’Etat. «C’est un élément bloquant surtout pour les grands projets qui ne peuvent pas démarrer au bout d’un an. On est en train de recevoir plusieurs demandes de la part des promoteurs qui revendiquent de prolonger cette date», a-t-il souligné. Aussi, selon lui, certains secteurs comme celui de l’énergie sont exclus des avantages. Ajoutons à cela l’interférence des rôles entre les différentes structures chargées de l’investissement comme l’instance tunisienne de l’investissement (TIA) qui est à priori chargée de concevoir les stratégies pour l’amélioration du climat des affaires mais elle ne le fait pas et demande de traiter les opérations d’investissement qui sont de plus de 15 MDT alors qu’elle n’a pas de représentativité dans les régions, selon ses déclarations.
« On n’a pas pu évoluer… »
Quant à Omar Bouzouada, directeur général de l’APII, il a déclaré que l’APII est là pour soutenir les porteurs de projets dans toutes les étapes, via la formation, l’accompagnement et la facilitation du contact avec les institutions financières et les banques. L’APII appuie également l’investisseur dans l’étape d’enregistrement et de constitution juridique du projet auprès de tous les services rattachés à l’APII. Selon lui, l’APII pourra également soutenir le promoteur en lui facilitant l’octroi des avantages mais aussi l’hébergement dans l’une des 24 pépinières et l’impliquer dans les programmes d’innovation et d’accompagnement pour pénétrer de nouveaux marchés. Selon lui toujours, l’APII doit rester à la pointe de la technologie et faire bénéficier les investisseurs d’un climat favorable aux affaires via la numérisation des services et la facilitation des procédures. « Il faut aujourd’hui soutenir les jeunes porteurs de projets innovants et encourager la nouvelle génération à prendre la relève devant la hausse du chômage et la dégradation de la croissance dans le pays. On a des compétences en Tic et informatique et il faut en profiter pour utiliser l’intelligence artificielle au service de l’entreprise industrielle et par conséquent répondre aux exigences de la révolution industrielle »., a-t-il encore dit.
Par rapport à la digitalisation, il confirme le fait que la Covid a forcé l’APII à accélérer le processus de digitalisation bien que l’Agence a opté pour le processus de numérisation depuis les années 2000 notamment en ce qui concerne les services aux entreprises et les déclarations de constitution.
Les déclarations d’investissement se font 100% en ligne depuis l’année 2020 et des travaux sont actuellement en cours pour mettre en place une plateforme numérique dédiée à la constitution juridique, a-t-il précisé et d’ajouter « nous sommes dans les dernières étapes et le retard vient du fait que nous travaillons avec plusieurs parties. J’espère qu’avant la fin de l’année 2021 la constitution juridique sera à 100% en ligne pour pouvoir concurrencer les pays qui sont classés premiers en termes du climat des affaires et à être dans le classement mondial de Doing Business sur le climat des affaires » tout en rappelant qu’en 2019, la Tunisie a été classée 63ème en termes de constitution d’entreprises, mais actuellement, elle est 19ème.
Par rapport au flux d’investissement, Omar Bouzouada a affirmé que l’année 2020 a été clôturée avec une hausse de 15% des intentions d’investissement mais le taux de réalisation est en stagnation par rapport aux trois dernières années. Cela signifie, selon ses dires, que les investisseurs font toujours confiance dans le climat des affaires en Tunisie mais le problème est qu’on n’a pas pu évoluer comme il faut par exemple par rapport à la digitalisation. « Il faut agir concrètement et rapidement car la Tunisie demeure une destination attractive pour les IDE mais il faut donner des avantages et faciliter les procédures et les mécanismes de financement », dixit Bouzouada.
Khadija Taboubi