Par Alix Martin
Découvertes
Le « Mont de Zeus » puis de « Jupiter », dans l’Antiquité est presque exclusivement constitué de roches sédimentaires calcaires du Jurassique et du crétacé de l’ère secondaire. C’est une montagne « jeune » qui culmine au « Ras El Guessa » à 1295 mètres. Il est complètement dissymétrique : son flanc sud-est tombe pratiquement à pic sur la plaine en superbes falaises de 300 mètres de haut parfois : les plus hautes de Tunisie. Elles tentent souvent les alpinistes chevronnés. Ses pentes nord-ouest s’élèvent lentement depuis le bourg de Mograne. Son orientation : sud-ouest / nord-est le place pratiquement perpendiculairement aux vents humides du nord / nord-ouest. Aussi son versant nord-ouest, bien arrosé, est-il tapissé de forêts et de maquis alors que le versant opposé est sec et rocheux.
Le mont est découpé par de profonds ravins transversaux dans lesquels coulent les Oued Guelb et Delia qui se transforment en torrents impétueux et dangereux à chaque averse.
Les roches calcaires qui constituent le Zaghouan ont été profondément creusées par l’érosion, par l’action chimique des eaux de pluie infiltrées et par les hommes qui y ont foré de multiples galeries de mine.
Pour les débutants inexpérimentés mais souhaitant découvrir, par eux-mêmes, des spectacles inhabituels, les cavités naturelles permettent une initiation sans danger. Il y a encore beaucoup de « cavités », surtout du côté de la station thermale traditionnelle de Hammam Zriba. Nous avons écrit « encore » car, naguère, le Gouvernement craignant les « terroristes » nous a demandé de les lui signaler afin de les obstruer, comme s’il ne valait pas mieux « s’ouvrir » le cœur des montagnards, méprisés et « laissés pour compte » plutôt que de murer des grottes. Si les montagnards ne sont pas complices, les « réfractaires » habitant les grottes sont immédiatement dénoncés !
Ainsi, nous avons, à notre « corps défendant » participé, en partie, à cette campagne « anti-grottes » mais nous n’avons pas tout dit. Allez voir !
En se promenant lentement, au sein de bois de pins d’Alep, de maquis de lentisque, de myrte et de calycotome, accompagné par les chants d’oiseaux, baignés par les senteurs du thym, du romarin et des armoises qui parfument les vêtements pour la journée, discrets comme si on cherchait des orchidées, par exemple, des bruyères ou les fleurs du « Nesri », on découvre des grottes, pas bien profondes certes, mais qui permettent de se familiariser avec ce « monde de l’obscurité », souvent peuplé par des chauves-souris.
Le deuxième échelon est celui de « l’exploration » des anciennes galeries de mine. Beaucoup ouvrent leur gueule béante au sommet du Jebel Stah, au sud du massif. On y a cherché des oxydes métalliques et du gypse que les paysans locaux appellent : « Bellar » : le verre, tant il pouvait se cliver en feuilles minces et transparentes.
Faites attention : c’est un environnement particulier, voire dangereux. Prévenez les gens de votre destination. N’y allez pas seul. Munissez-vous de plusieurs, au moins deux, sources de lumière. Il nous est arrivé d’avoir nos deux lampes « en panne » en même temps et de devoir sortir à tâton, à l’aveugle, dans le noir absolu : on ne voit pas sa main devant son nez ! Equipez-vous d’un casque et observez bien autour de vous le moindre signe d’éboulement. Si c’est le cas sortez immédiatement et allez ailleurs. Ces galeries ne sont plus entretenues depuis l’abandon de la mine, il y a parfois des décennies. Mais la « promenade » est curieuse, pour le moins. Certaines galeries vers Zriba, communiquent avec des failles naturelles, « sportives » à explorer. Certaines de ces dernières laissent s’exhaler des vapeurs humides, chaudes et sulfureuses.
Les grottes
Récemment encore, il existait, à notre connaissance, plus de 40 cavités naturelles. Beaucoup ont été murées mais, si elles sont en majorité de petite taille : quelques dizaines de mètres, il en reste encore au moins une dizaine qui sont splendides. Elles sont connues des spéléologues de Zaghouan et seraient dignes, à notre avis, d’une mise en valeur touristique. Les principales seraient :
La « grotte du diable » situées non loin du camp militaire. Elle a longtemps servi de dépotoir, hélas ! Mais, il est question de la nettoyer, d’abord, puis de l’ouvrir au public. Tant mieux ! Elle n’est visible que sur demande et la permission est assez difficile à obtenir actuellement.
La « nouvelle grotte » a été découverte vers 2007. Elle ne porte pas encore de nom officiel. Elle s’ouvre pratiquement sous le sommet du point culminant du massif. Difficile à très difficile, son accès est dangereux. Le « portage » du matériel : cordes, pitons, mousquetons, etc. … est long et fatigant. Elle est encore en cours d’exploration. Mais déjà, les spécialistes s’en « régalent » : elle pourrait détenir le record de Tunisie de profondeur : plus de 400 mètres et présenter de très belles salles. Une « affaire à suivre » !
La grotte du Jebel Stah est appelée « antépréhistorique » car sa formation est certainement antérieure à la venue des plus anciens hominidés préhistoriques. Son accès est relativement facile. Elle présente les avantages incontestables d’être une « vraie » grotte et de permettre une initiation, sans grandes difficultés, à la spéléologie. Son exploration, en compagnie, des gens compétents des clubs « spéléo » de Zaghouan ou d’ailleurs, Bizerte par exemple, n’exige aucune qualité sportive particulière. Longue d’environ 150 à 200 mètres, elle n’est pas très profonde mais elle offre aux visiteurs de belles salles ornées de magnifiques concrétions, sur lesquelles la clarté des lampes, reflétée par la mince pellicule d’eau qui recouvre tout, allume des éclats et des couleurs : du blanc étincelant, au beige, à l’ocre, à la couleur rouille et amine des ombres fantastiques, mouvantes, presque « vivantes ».
Avant de vous engager dans une aventure nouvelle, sachez d’abord que toutes les cavités offrent un abri à de nombreuses colonies de différentes espèces de chauves-souris. Elles ont besoin de calme, surtout en hiver : les dérangements intempestifs peuvent nuire à leur survie. Ne craignez rien : elles n’attaquent jamais l’homme mais elles peuvent mordre, un doigt par exemple, quand on les captures. Certaines ont la rage mais elles sont bien moins dangereuses qu’un chien enragé !
Ensuite, ayez conscience que la spéléologie est un sport à risque qui exige un matériel adapté et en bon état, un encadrement pour débuter, un accompagnement, ensuite, compétent ainsi que de bonnes assurances. Des « gens », à l’extérieur de ce « monde de l’obscurité » doivent savoir où vous êtes allés, pour combien de temps approximativement et en compagnie de qui.
Moyennant quoi, à quelques kilomètres de chez vous, dans le cadre agréable du Jebel et de la ville de Zaghouan, qui offre de très bons restaurants, se présentent de très belles grottes, offrant, des spectacles somptueux sans exiger des qualités sportives spéciales.
Pour vous y rendre, contactez les clubs « spéléo » de Zaghouan ou la « Maison des Jeunes ». Vous verrez : il n’y a que les premiers pas qui comptent ensuite tout devient beaucoup plus facile et moins inquiétant.
A.M.