Ben Jaâfar: « L’anarchie règne en maitre ! »

Le secrétaire général d’Ettakatol (Forum démocratique pour le travail et les libertés), Mustapha Ben Jaâfar a qualifié la période allant de 2014 à nos jours en Tunisie de véritable foire d’anarchie.
« Nous avons vécu cinq dernières années très difficiles marquées par une anarchie à tous les niveaux, constate-t-il en intervenant ce jeudi 17 octobre sur le plateau de « Radio Med ». C’est ainsi que rien de ce que prévoyait la constitution n’a été réalisé: le tribunal constitutionnel devait voir le jour un an après les élections, mais le voilà toujours inexistant. Le conseil supérieur de la magistrature n’a bénéficié d’un président fixe que ces derniers mois alors que la constitution stipule que ce conseil doit être installé six mois après. Le conseil national du dialogue social, qui a démarré le 14 janvier 2013 n’a toujours pas entamé ses travaux, alors qu’il reste le cadre idéal pour tracer la politique économique et sociale. Cette anarchie-là a conduit à une absence totale de l’Etat, ce qui a freiné la transition démocratique. En 2014, nous avons pourtant laissé un socle assez intéressant par rapport à l’année de la révolution.
Nous pensions que la période 2014-2019 allait nous permettre de passer du transitoire au durable, et donner la priorité à deux grands axes:
1) Achever la transition démocratique
2) Se pencher sur le problème de la lutte contre la pauvreté et des difficultés économiques.

Or, qu’a-ton réalisé de tout cela ?. Rien, ou si peu !« 

* »On nous accusait de trahir la bonne cause »
Mustapha Ben Jaâfar a par ailleurs martelé que « durant la période allant de 2011 à 2014, le parti Ettakattol s’est brûlé les ailes sur l’autel de l’intérêt de la Tunisie. Vous, journalistes avez été trop sévères avec la troika. Je n’étais pas d’accord avec le sit-in Errahil, le pays se trouvant au seuil d’une déflagration. Si nous n’avons pas réussi, c’est parce que beaucoup de gens n’étaient pas convaincus par notre programme. De plus, notre parti a fait l’objet de campagnes de dénigrement puisqu’on nous accusait de trahir la bonne cause en faisant alliance avec Ennahdha. Qui n’a pas voté pour la constitution en ce temps-là ? Les discussions autour de la constitution ont duré deux ans. Dans le souffle révolutionnaire, nous nous souciions d’appliquer la devise: « Plus jamais un président de la République qui détient tous les leviers du pouvoir et dirige tout ». N’oublions pas que cet excès de « présidentialisme » a conduit le pays à la révolution. Nous voulions plutôt que le président de la République soit l’arbitre« .
* »Non, le pouvoir du président de la République n’est pas restreint »
Le leader d’Ettakatol a contesté l’idée reçue selon laquelle la constitution a singulièrement réduit des prérogatives du président de la République.
 « Au contraire, celui-ci peut intervenir chaque fois et dans tous les domaines s’il sait comment s’y prendre, a-t-il souligné. Rien que par l’intermédiaire de la convocation du conseil des ministres, il peut toucher à tout. Le chef de l’Etat doit tenir le cap et rester au dessus des partis. Il n’est pas vrai qu’il dispose de compétences restreintes. Dites-moi ce qu’aurait voulu faire feu Beji Caid Essebsi et qu’il n’aurait pas fait ? Donnez-moi des exemples si vous en avez. Il a désigné les chefs du gouvernement, justement en contradiction avec la constitution qui stipule que le chef du gouvernement doit être le leader du parti qui a gagné les élections. Il a voulu Habib Essid. Près de 160 députés ont donné leur confiance au chef du gouvernement Habib Essid alors qu’il n’avait pas de programme. Il n’y avait alors aucune vision de construction démocratique. Jusqu’à aujourd’hui, nous ne disposons pas de loi sur les partis qui précise leur financement public et les contrôle. L’anarchie règne en maître. Nous avons maintenant 217 partis. Que fait-on avec pour assurer leur contrôle et savoir d’où viennent leurs ressources?« .
Pour conclure, Ben Jaâfar jette un regard pessimiste sur le climat politique de l’heure: « Des gens ne veulent pas de tribunal constitutionnel parce qu’il reste un levier de contrôle. Présentement, il y a également ce qu’on appelle le « tourisme politique », le tourisme entre groupes parlementaires »… Dans la pratique, nous avons constaté dernièrement que les moyens d’information manquent de vision privilégiant un code d’éthique. D’ailleurs, le président du Syndicat des journalistes et la HAICA ont reconnu cet état des lieux ».
H.A.

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