La BFT, banque franco-tunisienne est-elle une banque maudite ? Il semble que oui.
35 ans après, le litige qui oppose l’Etat tunisien à la société Arab Business Consortium Investment (ABCI), reste entier. Un feuilleton sans fin malgré les tentatives de règlement amiable, avortées à chaque fois.
Aujourd’hui, le dossier de ce litige revient à la surface en raison de l’urgence qu’il y a à trouver une solution rapide. Le tribunal arbitral international va rendre incessamment son verdict qui, a fortiori, sera au bénéfice d’ABCI.
Il faut souligner que dans cette affaire, on nage en pleine fiction. Il s’agit d’un feuilleton politco-financier rocambolesque à rebondissements multiples et des enjeux énormes : une opération d’investissement extérieur prometteuse, malgré sa modestie, s’est transformée, au fil des années, en un cauchemar indescriptible – surtout pour l’Etat tunisien – dans la sphère bancaire tunisienne avec un retentissement international. On ne comptera pas les erreurs, les décisions improvisées dictées par le souci de préserver le prestige de l’Etat, les fraudes et les opérations de corruption ayant émaillé le parcours de ce feuilleton de 35 années de poursuites judiciaires, de condamnations, d’accords et d’arbitrages dénoncés au lendemain de leur signature.
Le gouvernement d’union nationale se retrouve, alors qu’il fait face à une situation sociale explosive et une conjoncture économique exécrable, contraint de gérer ce lourd dossier de la Banque franco-tunisienne (BFT), dont le gouvernement de la Troïka avait saboté le règlement.
Le dossier s’invite à l’ARP
Longtemps considéré comme un dossier qui relève uniquement du gouvernement, le dossier de la BFT s’est invité récemment à l’Assemblée des représentants du peuple.
Des questions écrites et orales ont été adressée au secrétaire d’Etat en charge des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières. Il répondra que l’affaire de la Banque franco-Tunisienne (BFT), est un dossier “important et compliqué” et qu’il est actuellement dans sa première phase, pour déterminer les responsabilités.
La deuxième phase de ce dossier concernera le montant des dédommagements que l’Etat tunisien doit payer, s’il est prouvé que l’Etat a commis une erreur dans la signature du contrat avec la partie étrangère. Il émettra le souhait que la facture ne soit pas très lourde.
Le temps presse et la lourde sentence risque de tomber d’un moment à l’autre. Qu’attend-on pour prendre les devants et trouver une issue équitable aux deux parties ?
Le 19 avril 2017, le tribunal arbitral de la banque mondiale a sorti une décision qui contredisait la démarche tunisienne.
Le CIRDI a, en effet, notifié aux deux parties, la société ABCI et l’Etat tunisien, que le protocole d’accord de 2012 et toutes les correspondances échangées pendant la période des négociations amiables ont déjà été exclues, depuis 2013, du dossier du tribunal arbitral du fait que ces négociations n’avaient pas abouti à une solution entre les deux parties. Le tribunal réaffirme ainsi, en 2017, sa position constante que ce protocole d’accord ne sera jamais pris en considération dans sa décision sur la responsabilité de l’Etat.
Par conséquent, la Tunisie ne peut subir aucun préjudice du fait même de ce protocole et la poursuite pénale engagée par la Tunisie et soutenue par l’Exécutif tunisien, sous prétexte de préjudice n’a plus de fondement matériel ou juridique. C’est là le troisième revers pour la Tunisie.
Il y a urgence !
Aujourd’hui, il y a urgence. Encore une fois le chef du gouvernement, Youssef Chahed est appelé à prendre les choses en main et agir dans le sens de l’intérêt de la Tunisie. Il doit prendre ce dossier à bras le corps et tenter de rattraper la possibilité d’une solution et alléger le fardeau du pays en cette période critique à tous points de vues.
Youssef Chahed est à nouveau amené à jouer les pompiers pour éteindre un feu que ses prédécesseurs ont allumé par ignorance, négligence ou même par mauvais calculs. Un feu qui risque de venir à bout de nos finances publiques déjà au rouge.
Le temps presse et il ne faut pas attendre la décision du tribunal arbitral. Sa décision sera irrévocable et aucun recours ne sera plus possible.
Youssef Chahed est aujourd’hui dans l’obligation de prendre rapidement les mesures qu’il faut pour un règlement rapide, équitable qui éviterait au pays de se trouver dans l’obligation de payer de très lourds dédommagements.
Il faut que la raison l’emporte sur l’improvisation.
L.R
(Retour sur une affaire à nul autre pareil dans
Réalités magazine N° 1639 dans les kiosques)