BLOC-NOTES

Par Sami Mahbouli

 

Pour la première fois de leur longue histoire, les Tunisiens ont choisi librement leur chef d’État ; c’est à Si Béji Caïd Essebsi qu’échoient cet immense privilège et ce magnifique couronnement d’une carrière au service de la Tunisie. Compte tenu de l’affection et de l’estime que je lui porte, je n’ai pas besoin d’insister sur la joie que m’a procuré son succès. Il est réjouissant d’observer que le net écart de voix entre les deux candidats ôte à tous les grincheux la moindre possibilité de discutailler sur le  sens du scrutin du 21 décembre : les Tunisiens ne veulent plus d’une présidence de la République au rabais et d’un président fantasque. Sans chercher à l’accabler davantage, Dr Marzouki n’a pas su incarner la fonction présidentielle et a contribué à diviser les Tunisiens. Il était significatif de voir, le soir du scrutin, un délinquant comme « Recoba » chauffer la foule tandis que Marzouki s’affichait à un balcon voisin pour y  prononcer quelques paroles convenues ; à elle seule, cette image désolante pourrait suffire à caractériser un mandat chaotique, mélange d’amateurisme et d’improvisation. Si sa défaite reste honorable, le mérite en revient au parti islamiste qui a mobilisé toutes ses troupes et des moyens colossaux pour faire barrage à Si Béji ; avec un baril à 60 dollars, il n’est pas sûr que les bailleurs de fonds dudit parti  soient satisfaits de ce gaspillage inutile…

 

Ce n’est pas une partie de plaisir qui attend le nouveau Président ; en dépit du travail honorable accompli par le gouvernement de Mehdi Jomâa, la taille des défis a de quoi impressionner mêmes les caractères les plus trempés. Restaurer le prestige de casino online l’État ne se promulgue pas au Journal Officiel surtout lorsque, pendant plus de deux ans, une Troïka formée de guignols, a rabaissé l’autorité publique à son plus bas étiage. Cette restauration passe, entre autres, par le choix d’un gouvernement composé d’hommes non seulement compétents mais également dotés d’une forte personnalité ; si à la moindre campagne de presse, si à la première manifestation hostile ou si pour ne pas déplaire à un syndicat, le futur chef du gouvernement opte pour la retraite en rase campagne, l’État ne se redressera pas et notre pays continuera à galérer au gré des vagues. Si l’on continue à accepter que la loi soit bafouée allègrement dans tous les secteurs d’activités, si l’on persiste à tolérer l’absentéisme des fonctionnaires et la corruption à tout crin, il ne faudra pas s’étonner que notre croissance reste ridicule et notre risque-pays élevé. Je ne doute pas que le Président Caïd Essebsi est conscient des enjeux et saura choisir une équipe gouvernementale capable de traduire sa vision du redressement de l’État.

 

Réussir la transition politique constitue un motif de fierté pour chaque Tunisien ; accéder au statut de démocratie émergente n’est pas à la portée de tous surtout quand on considère les autres expériences du « printemps arabe ». Pour autant, rien ne serait plus dangereux que de se griser de ces fragiles acquis. Pour mémoire, je rappelle que des milliers de Tunisiens suivent des stages de barbarie en Syrie ; à nos frontières, un pays est à l’orée de l’implosion ;  à l’intérieur, d’obscures officines n’ont pas renoncé à polluer l’esprit de notre jeunesse par une culture rétrograde ; la pauvreté qui se répand chez nous reste le plus fertile terreau du terrorisme et les inégalités régionales le meilleur ferment des révoltes futures. L’imposant  chantier du développement économique qui nous attend sera, à ne pas en douter, bien plus difficile à achever que celui de la transition politique.

avocatmahbouli@gmail.com 

 

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