Ça pousse comme des champignons

En ce début du mois d’octobre, la mer est devenue fraîche, la campagne n’a pas encore reverdi, refleuri sous la « caresse » de bonnes pluies abondantes. Alors quoi faire durant le week-end ? Essayez de « monter » à Aïn Draham et d’embaucher des jeunes gens qui offrent, le long de la route, des paquets de champignons comestibles et délicieux.

Les attraits

Même si les plaines sont encore assoiffées, la Khroumirie a déjà été bien arrosée. Les frondaisons, lavées des poussières estivales, brillent d’un vert franc. Ce n’est pas encore la « mauvaise » saison. Durant les journées encore tièdes, un chaud soleil rayonne dans l’azur serein. Toute la végétation, au sortir des touffeurs de l’été, a profité des averses et de l’ensoleillement automnal. Les clochettes mauves des bruyères médicinales tapissent les pentes. Les grandes fougères « aigles » déroulent leurs crosses, aux feuilles très finement découpées, dans la senteur humide des mousses revigorées. Les arbouses commencent à rosir entre les feuilles d’un vert brillant. Les baies des myrtes ont déjà bleui. Elles seront bleu nuit à maturité, en hiver. Les genets d’Espagne, aux fleurs d’or en mai, sont garnis de gousses soyeuses. Plante vénéneuse, elle est encore utilisée comme plante « médicinale », dans les montagnes. L’urginea maritima, n’a pas encore de feuilles mais elle érige la fusée de ses fleurs blanches qui s’ouvrent progressivement du bas vers le haut. Elle aussi a la réputation d’être une plante médicinale. Avec les lentisques aux rameaux et aux baies rouges, myrtes, bruyères, asphodèles, urginea composent des sous-bois qui embaument.

Depuis quelques années, beaucoup de pigeons ramiers : les palombes, à la gorge bleue, se sont sédentarisées. Leurs roucoulements bercent les promenades en forêt, rythmées par le tambourinement des pics, en particulier les pics épeiche et épeichette. Sédentaires, ils portent un petit béret rouge vif. Le pic de Levaillant a un plumage vert chartreuse. Le long des ruisseaux qui murmurent sous les feuilles mortes, la flèche turquoise du martin pêcheur chassera tout l’hiver.

Allez voir et sentir : toute la région baigne dans les odeurs de bois brûlé qui montent des foyers des hameaux avec les écharpes diaphanes des premières brumes. Au-dessus des crêtes boisées, les boursouflures des brouillards précoces grimpent et enflent, en roulant le long des pentes, depuis les plages de Tabarka. Et puis, quand on est arrivé, quoi faire ? Acheter ? Non pas tout de suite : allons  d’abord cueillir des champignons en compagnie d’un jeune de la région.

Les champignons

Ne vous inquiétez pas inutilement. Les mythes populaires ont la vie dure. Avez-vous remarqué que les campagnes de prévention, d’avertissement sur la toxicité des champignons khroumirs n’ont commencé qu’à partir du moment où des gens malins les ont fait cueillir et les ont exportés par tonnes vers l’Europe, réalisant des bénéfices mirifiques ? Et … un jour, tout s’est arrêté. Depuis, on recommence à cueillir, paisiblement, les champignons en Khroumirie.

C’est à la fin « Cèpe … tembre », du moins en automne, que la saison est la plus « riche ». Un petit matériel ni onéreux ni encombrant : de bonnes chaussures, un panier rigide et un couteau pliant pour couper le champignon : ne pas l’arracher en détruisant le mycélium producteur et ne pas le mettre dans le panier avec la terre qui couvre le pied. Les autres seraient souillés.

Ensuite, on ne cueille que les champignons qu’on connaît ou, si ce sont vos premières cueillettes, vous ne récoltez que ceux qui ne présentent aucun risque de confusion avec une espèce toxique. Par exemple, les girolles, jaune vif, au chapeau en entonnoir, sont délicieuses en omelette ou en accompagnement d’un rôti. Les agaric ou rosé des près, semblables aux champignons de Paris n’ont qu’un adversaire l’agaric jaunissant qui jaunit abondamment quand on touche le chapeau et qui sent l’encre au lieu de l’anis comme les autres.

Il faut dégager le pied de tous les champignons jusqu’à la terre pour voir s’il ne sort pas d’un sac blanc appelé la volve. Pour les novices et les non-spécialistes, tous les champignons à volve sont toxiques. Il ne faut pas y toucher. Si vous êtes accompagnés par un spécialiste, faites-vous montrer l’amanite de César : l’oronge, qui ressemble à un œuf dur quand elle est jeune et qui a un beau chapeau jaune orangé plus tard. C’est la seule amanite (à volve !) qui ne présente aucun risque de confusion. Aucun bolet ou cèpe, même ceux qui ont le pied rouge violacé, n’est toxique. Les trompettes de la mort, toutes noires, sont délicieuses. Toutes les lépiotes sont succulentes et parfaitement reconnaissables : la « coulemelle » mesure de 30 à 40 centimètres de haut. Son chapeau a 20 à 30 centimètres de large.

Le lactaire « délicieux » a un chapeau, orné de cercles rouges vineux, qui verdit plus tard. Il exsude un « lait » orangé qui fait peur mais il est vraiment exquis. Le « pied bleu » ne pas être confondu. Les pleurotes au chapeau gris, excentré par rapport au pied, poussent en groupe parfois dans les friches au pied des tiges de chardons secs. On les cultive actuellement comme les champignons de Paris

Où les trouver

Même si un « coin à champignons » ne se donne pas plus qu’un « coin de chasse » ou de « pêche », nous pensons que le plaisir se partage. Prenez la « piste du lieutenant », devenue une route, à droite après le « complexe sportif », au pied d’un hôtel fermé et vous longez à votre droite, des champs incultes. Ils sont limités sur la droite par un mamelon boisé qu’il faudrait visiter de bas en haut et vers l’ouest jusqu’à un hameau. Là, dans ce petit groupe de maisons, vous trouverez souvent des gamins qui vous proposeront soit des champignons soit de vous emmener en cueillir, moyennant une « rétribution ». Des deux côtés de cette route qui va jusqu’à un village un peu plus grand, et même sous les arbres tout autour de ces maisons, vous trouverez des champignons.

On peut aussi en trouver, à droite de la route d’Aïn Draham, après ce qu’il reste de « l’hôtel des chênes », tout autour d’un établissement de vacances et même sur les pentes à l’ouest de « chez Jalel » : la guinguette qui s’est installée sous les arbres, en face des vestiges de « l’hôtel des chênes ». D’ailleurs, on peut en cueillir aussi le long de la route en allant vers l’est et Béni Métir. On fait de belles récoltes, sous les arbres, à gauche de la route menant à Béni Métir, un peu après le « parc à liège » à peu près à la hauteur d’une grande fontaine où les automobilistes lavent leur véhicule, à droite de la route. Vous voyez qu’il y a toujours d’excellentes raisons d’aller à Béni Métir.

Après la cueillette

Bien sûr, la « cuisine » des champignons est aussi variée qu’ancienne. Si l’omelette ou le « sauté » à feu doux sont les préparations les plus simples, les cèpes, en lamelles fines et en salade sont délicieux. Girolles, cèpes, lactaires et « pied bleu » découpés en lamelles cuites au beurre ou à l’huile sans goût, à feu doux, puis mêlés à des miettes de poulet rôti, le tout arrosé d’une sauce blanche ou béchamel, relevée à la noix muscade, roulés dans une feuille de brick, un « mlaoui » fin ou une crêpe, puis saupoudrés de fromage râpé et passés quelques minutes au four, pour faire fondre le fromage, sont délicieux !

Vous pouvez les conserver en les faisant sécher, pendus dans un endroit frais et sec. Les champignons peuvent être congelés crus ou après une brève cuisson (2 minutes) dans l’eau bouillante. On peut aussi les cuisiner partiellement avant la congélation et terminer la cuisson après décongélation.

Allez en Khroumirie pour n’importe quelle raison : randonnée, baignade, chasse, pêche, visite de sites historiques ou cueillette de champignons, vous ne serez pas déçus, surtout, si un jour, vous découvrez des morilles ou des truffes prestigieuses.

A.M

 

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