Cérémonie de célébration de l’An IV de la Révolution: Erreurs de casting

 

 
Difficile entame pour l’équipe des conseillers du Président Béji Caid Essebsi qui ont  cafouillé et quelque peu raté leur premier test. La cérémonie de célébration du 4e anniversaire de la Révolution organisée, le jeudi 14 janvier 2015, au palais de Carthage s’est terminée en queue de poisson.  Pour raison  d’erreurs d’appréciation,  de défaillance de communication et, surtout, de  sous-estimation du caractère brûlant du dossier des martyrs de la Révolution,   en souffrance  depuis quatre années.

Pourtant, cet événement, qui revêt une symbolique particulière,  était attendu et  appréhendé  pour plusieurs considérations objectives. Il marque  la première apparition publique du  nouveau Président élu, dont tout geste et  toute déclaration seront mis sous la loupe et ne manqueront pas de soulever remarques et critiques.  Le faux pas qui a soulevé  l’ire des familles des martyrs, même s’il faut l’imputer beaucoup plus  à l’impréparation des hommes du président qu’à une quelconque autre  intention, a vite suscité une polémique et des commentaires parfois acides. Partis politiques et certains représentants  de la société civile ont vite tiré à boulets rouges sur le Président de la République et crié au scandale. La raison est évidente, ce dossier se prête encore à toutes les formes d’instrumentalisation et de polémiques politiciennes.

A l’évidence, le respect des formes et des symboliques a  son importance dans ce genre d’événements particuliers. L’interruption de la cérémonie et l’ambiance tendue qui a prévalu ont trouvé  leur explication dans une omission. « Nous ne sommes pas venus pour de belles paroles, nous sommes venus pour qu’au moins on rende hommage symboliquement aux personnes que nous avons perdues », ont répété certains membres des familles des martyrs et des blessés de la Révolution.

Cette expression de colère, qui a gagné subitement le palais de Carthage au beau milieu d’une  cérémonie de décoration d’où ils étaient exclus, a été une sorte de réponse à un sentiment de négligence  que  les personnes présentes ont ressenti. En effet, quatre ans après le 14 janvier 2011, cet incident a été  un révélateur que le pays continue à faire face à ses vieux démons et qu’il  ne s’est toujours pas réconcilié avec lui-même.

 

Une urgence : clore ce dossier complexe

Cet avis est corroboré par l’organisation Human Rights Watch, qui estime que  « les efforts de la Tunisie pour faire rendre des comptes en justice aux auteurs d’exécutions extrajudiciaires pendant le soulèvement populaire, il y a quatre ans, ont été anéantis par des problèmes juridiques ou liés à la procédure d’enquête et n’ont pas permis de rendre justice aux victimes ».

Au-delà de toute la polémique qui a éclaté et des malentendus qu’on a voulu dissiper, ce malheureux épisode vient à point nommé, montrer l’urgence de clore ce dossier douloureux et complexe.  La douleur des  familles des martyrs et des blessés de la Révolution reste encore vive. Leur colère et désespoir est légitime dans la mesure où de nombreuses zones d’ombre  persistent sur les auteurs, encore  inconnus à l’origine  de leur drame,  et beaucoup d’approximation a marqué le traitement de ce dossier.

Aujourd’hui, toute la nation  assume une grande responsabilité pour panser les blessures de ces familles et donner un signal clair qui les sortirait du désespoir et du doute. Cela est d’autant plus impérieux que plus tôt on solutionne ce dossier, plus tôt on mettra un terme à  toute  velléité d’exploitation politique des malheurs de ces personnes.

En  dépit de ce contre temps,  le discours de Béji Caïd Essebsi, débité sur un ton quelque peu monocorde, a été une occasion d’affirmer sa volonté d’honorer les engagements qu’il a pris.

 

Engagements

Cela concerne au premier chef, la protection du processus démocratique en Tunisie qui  commande de continuer de s’appuyer sur la logique et la légitimité du consensus national, la garantie des libertés, le respect de la Constitution, la lutte contre la pauvreté, le chômage, l’exclusion et la guerre contre le terrorisme.

Cette tâche, a-t-il averti, ne sera pas de tout repos,  elle exigera « un travail harassant pour régler les problèmes qui furent à l’origine du déclenchement de la Révolution ».

Il a  tenu à rassurer les Tunisiens de son engagement pour consolider les institutions et les lois et d’œuvrer pour la protection de la liberté d’expression  et des instances de la société civile, levant au passage une équivoque en réaffirmant  son soutien et son attachement à la justice transitionnelle en tant que moyen pour rendre  justice aux victimes et demander des comptes aux auteurs de violations pour aboutir ensuite à la réconciliation des composantes de la société.

La Révolution ne s’est pas arrêtée. Elle n’en finit pas de se refléter sous des formes diverses. La Révolution se retrouve dans le texte de la Constitution, dans les  institutions et programmes, dans  un parlement élu, dans  une presse libre ou dans  une société civile dynamique.
Des engagements importants qui n’ont tout de même pas parvenu à contenir ni  la déception, ni l’irritation des familles des martyrs et encore moins les blessés qui ont pris la peine de faire le déplacement à Carthage.

N.O

 

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