Alors que tout le monde attendait un palmarès partagé, ce fut un triomphe sans discussion. «Timbuktu» du réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako a remporté vendredi 20 février 2015 sept Césars dont ceux du meilleur film, de la meilleure réalisation et du meilleur scénario. On ne pouvait espérer mieux pour ce 40e anniversaire des césars, tant ce film a été injustement oublié par le jury du dernier Festival de Cannes. « Il n’y a pas de choc des civilisations, ça n’existe pas. Il y a une rencontre des civilisations« , a affirmé le réalisateur, qui est devenu le premier cinéaste d’Afrique noire à recevoir le César du meilleur réalisateur. « Il faut croire que l’Humanité est capable d’un sursaut face à l’horreur », va-t-il encore dire devant la presse. « Le cinéma joue son rôle dans ce sursaut là et c’est merveilleux« .
Véritable plaidoyer contre l’intégrisme religieux, Timbuktu est la première œuvre mauritanienne à concourir pour l’Oscar du meilleur film étranger qui sera décerné dimanche à Los Angeles.
Derrière ce succès se cache une équipe tunisienne dont l’expérience des uns et la jeunesse des autres a fait la différence ?
Trois tunisiens ont été à l’honneur et dont l’apport a été crucial dans la réussite de « Timbuktu ». Il s’agit du jeune Amine Bouhafa, musicien de talent avec le César de la meilleure musique originale , de Sofiane EL Fani qui a obtenu le prix de la meilleure photographie et de Nadia Ben Rachid pour le montage. Sofian El Fani a dédié son prix à la Tunisie, alors qu’Amine Bouhafa a dédié son trophée « à une jeunesse tunisienne qui a su dire non au despotisme ».
Chef monteuse, Nadia Ben Rachid a une longue expérience avec le cinéaste mauritanien. Ce sont 17 ans de collaboration depuis la petite première œuvre en 1997 avec le court métrage, « Sabriya, la dignité » tourné en Tunisie avec la société de production Nomadis Images. Dans sa filmographie, Abderrahmane Sissako a quatre longs métrages, où Nadia le suit jusqu’à 2014 dans « Timbuktu », après « Vie sur Terre » (1997), « En attendant le bonheur » (2002, prix international de la critique Cannes 2002) et « Bamako » (2006, grand prix du public Paris Cinéma 2006).
Lauréate de nombreux prix dont le prix du montage au Fespaco 1999 pour «La vie sur terre», elle a travaillé notamment comme assistante-monteuse avec Roman Polanski dans «Pirate», «Lune de fiel» et «Frantic», mais aussi avec d’autres grands metteurs en scène tels que Claude Berri et Henri Verneuil.
Avec « Timbuktu », elle a travaillé pour la deuxième fois avec Sofiane (Le challat de Tunis) et le compositeur de musique Amine Bouhafa, (le film documentaire de Mohamed Zran «Dégage»).
Amine Bouhafa, est compositeur de musique de films mais aussi de séries télévisées. Avec « Timbuktu » il signe sa première expérience dans une collaboration étrangère. Dans la musique de ce film, il a fait un mélange subtil entre musique orientale et africaine et musique symphonique et occidentale.
Amine Bouhafa a collaboré notamment à trois séries télévisées de l’Egyptien Adel Adib dans « Bab El Khalkh », « Place on the Palace » et « Jebel El Halel » .
Sofiane El Fani, chef opérateur de l’image dans « le chagrin des oiseaux » avait décroché auparavant le César de la meilleure photographie lors de la 39e cérémonie des Césars. Sa rencontre avec Sissako remonte à l’année 2012.
Sofiane El Fani a travaillé notamment avec Abdellatif Kéchiche dans « La vie d’Adèle » Palme d’Or de Cannes 2013. Sur « Timbuktu » (2014), il est accompagné de deux machinistes ou techniciens de plateau : le chef électro Habib Ben Salem et Amine Messaadi, deuxième caméra.
C’est grâce à cet esprit d’équipe et de liberté que ce film a triomphé au cours de la quarantième cérémonie des Césars du cinéma français.
S.K.