Plusieurs facteurs expliquent cette transformation rapide des habitudes de paiement. La réforme du cadre juridique des chèques, entrée en vigueur en 2024, a considérablement durci les conditions de leur utilisation. Parallèlement, les établissements financiers ont intensifié leurs campagnes de promotion des solutions digitales, avec des offres tarifaires avantageuses pour les paiements électroniques. Cette évolution s’inscrit dans un mouvement plus large où près de 67% des Tunisiens disposent désormais d’un smartphone, selon les dernières données de l’Instance nationale des télécommunications.
Si la tendance vers les paiements dématérialisés semble irréversible, des obstacles persistent. Le taux de bancarisation, bien qu’en progression, ne dépasse pas 45% de la population adulte. De plus, les commerçants des régions intérieures restent réticents à adopter les terminaux de paiement électronique, en raison notamment des commissions perçues par les banques. Cette situation crée une fracture entre les grandes villes, où les solutions digitales se développent rapidement, et les zones rurales où l’économie cash reste dominante.
Cette transition pose des questions complexes aux autorités monétaires. D’un côté, la réduction de l’usage des espèces permettrait une meilleure traçabilité des transactions et une lutte plus efficace contre l’économie informelle, qui représenterait environ 38% du PIB selon certaines estimations. D’un autre côté, l’accélération trop brutale de cette mutation pourrait exclure une partie de la population moins familiarisée avec les outils digitaux. Les prochaines mesures gouvernementales devront donc trouver un équilibre entre modernisation du système de paiement et inclusion financière de l’ensemble des citoyens.