
Le fameux « malade imaginaire » a souvent été une sorte de réflexe pavlovien de l’humour, un fond de tiroir dans lequel on puise faute de mieux. Dany Boon a, sans doute, de bonnes raisons de réaliser Supercondriaque : tout d’abord, vu que le film est français, il a pour lui le peuple qui consomme le plus de médicaments au monde. Puis, encore, une histoire d’amour qui ne peut, en ces temps de crise économique, chômage, précarité… (rayez la mention inutile) que remonter le moral et donner du baume au cœur. Ce pauvre homme, cette pauvre femme, représentants névrosés des tics médicamenteux d’une vie stressante, sont une cible de choix et politiquement correcte en plus ! Et, heureux hasard, Supercondriaque sort au moment où les grippes, angines et toux explosent.
Ce malade paranoïaque est donc campé par Dany Boon. Réalisateur pragmatique, Dany est en phase avec les préoccupations de son public français. Public qui plonge dans les salles obscures à chacun de ses films.
Alors, oui c’est plutôt drôle. Dany Boon fait le pitre avec motivation et ça se voit et ça marche. Romain est donc un angoissé chronique : attraper une maladie c’est un peu prendre un risque et Romain ne veut en prendre aucun. La révélation du film est Alice Pol. Amour de Romain, elle propose une palette d’émotions qui va des moments drôles à d’autres plus dramatiques avec un naturel remarquable. Et puis surtout, le duo Kad Merad / Danny Boon est toujours jouissif.
Pour ce qui est du film, la première moitié est une sorte de stand-up filmé. Dany Boon se donne dans une suite de scènes burlesques, dont l’une se passe dans le métro, qui en valent vraiment la peine. Autre facette du personnage, autre facette dans l’ère du temps, cette tendance des jeunes adolescents qui refusent de passer à l’âge adulte et d’assumer leur rôle social.
La deuxième lecture relative à un hypothétique processus d’intégration, occupe la deuxième moitié du film et c’est là que le bât blesse. Ce changement subit qui éloigne Romain des gels antibactériens, donne lieu à une sorte de théâtre de boulevard. Et là, par miracle, il devient, on ne sait pas trop comment, un tombeur que toutes les femmes s’arrachent. Ce revirement scénaristique fait chuter l’humour et transforme le film en comédie romantique standard. Et là c’est la débâcle scénaristique, le film tout juste sympa devient lourdingue, les bribes de sourires que nous arrachaient le début, sont noyés dans une histoire d’amour bancale et, comble de l’ironie, aseptisée
Supercondriaque reste une comédie française à découvrir en salles pour vous divertir intelligemment. C’est une comédie populaire dans le bon sens du terme : simple et redonnant le sourire, ce qui est déjà beaucoup.
* Supercondriaque, réalisation et scénario: Dany Boon. Acteurs principaux : Dany Boon, Alice Pol, Kad Merad. Durée : 107 minutes
Farouk Bahri