Jeudi 5 juillet, l’Algérie a célébré le cinquantième anniversaire d’une indépendance acquise dans la douleur… non sans que ce pose pour la énième fois l’épineuse question de sa relation avec l’ancienne puissance coloniale : la France.
Député socialiste français, Daniel Goldberg, a franchi un pas de géant… Dans une lettre adressée au président français fraîchement élu, et publiée par l’AFP, il demande que la France saisisse l’occasion du cinquantième anniversaire de l’Indépendance de l’Algérie «pour s’exprimer enfin clairement sur certains des événements les plus douloureux de notre passé commun afin que nous progressions dans la voie d’une réconciliation encore inachevée».
L’allusion est claire. Le député fait notamment référence à l’épisode douloureux de la répression sanglante et violente par les autorités françaises de deux manifestations organisées dans plusieurs villes d’Algérie, notamment à Sétif, le 8 mai 1945, et à Paris, le 17 octobre 1961. Reconnaissance d’abord, excuses officielles ensuite… Les Algériens, qui attendent un signe de l’ancienne puissance coloniale, sont sur la même longueur d’onde. Pour eux aussi, l’heure est à l’apaisement. «Il est important d’avoir des relations normalisées avec la France, et ce que j’entends par normalisées, c’est la défense des intérêts communs», a déclaré à ce propos Nacer Mehal, le ministre algérien de la Communication.
Avant d’ajouter : «Comme la France a pu faire son devoir de mémoire à l’égard de l’Allemagne, je ne vois pas pourquoi on veut nous refuser ce droit de mémoire». Ces déclarations de bonne intention viennent rompre avec la tension palpable depuis 2005. Cette année-là, sous l’impulsion du président de l’époque, Nicolas Sarkozy, a été votée une loi «sur les aspects positifs de la colonisation». De tendues, les relations, entre les deux capitales, étaient devenues conflictuelles. Fait important pour l’Histoire et surtout pour le présent… La gauche s’était élevée contre cette loi. «L’article que nous voulons abroger est une faute politique et une aberration éducative. Il n’aide pas notre pays à regarder lucidement son histoire. Il réhabilite le bon vieux temps de la Coloniale et occulte les violences, les exactions», avait alors déclaré un certain Jean-Marc Ayrault, aujourd’hui Premier ministre.
Y’a-t-il un effet Hollande ?
En Algérie, comme en France, quelques signes sont à l’origine de cet optimisme mesuré. En décembre dernier, le candidat François Hollande s’était rendu à Alger… à l’invitation du Front de libération nationale (FLN). Interrogé alors sur le passé colonial de la France, il avait appelé à effectuer un travail de mémoire, travail qui «permettrait aux deux pays de mieux comprendre le passé pour mieux préparer le futur». Ces intentions sont réitérées quelques mois plus tard. Dans une lettre datant du 26 mars, et, adressée à l’association «Maurice Audin» —en hommage à un jeune professeur de mathématiques, membre du Parti Communiste Algérien, arrêté par la police française en 1957, torturé puis tué mais dont le corps n’a jamais été retrouvé— le candidat socialiste se montrait catégorique. «Il faut que la vérité soit dite. Reconnaître ce qui s’est produit», avait écrit François Hollande. Et de poursuivre «Il ne faut pas nous figer dans une commémoration qui sera forcément différente dans l’évocation, en Algérie et en France». Depuis l’élection présidentielle, les Algériens sont dans l’expectative. Que fera concrètement l’homme —aujourd’hui président— qui a fait un stage de huit mois à l’Ambassade de France à Alger en 1978 et qui se dit «l’ami de l’Algérie»… ? Ils ont eu un début de réponse à l’occasion de leur cinquantenaire. «Nous aurons bientôt l’occasion de traiter ces sujets de vive voix», a écrit François Hollande, à son homologue algérien, Abdelaziz Bouteflika. Selon les média français, la visite interviendrait d’ici la fin de l’année en cours.
D’ores et déjà, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius s’est attelé à sa préparation. Il est attendu dans les prochains jours à Alger.
A.T