Lors d’une assemblée extraordinaire tenue par le Syndicat des pharmaciens officinaux de Tunisie, ces derniers ont décidé à l’unanimité, le non-renouvellement de la Convention avec la CNAM, après son expiration le 08/07/2015. D’ores et déjà, certains pharmaciens n’ont pas attendu cette date pour commencer à refuser de servir les ordonnances des affiliés concernés par ladite convention, soit ceux de la filière du tiers payant. De son côté, la CNAM dénonce cette attitude jugée illégale et affirme que le retour à la table des négociations est encore d’actualité. Mais derrière tout ça, il semblerait, et selon leurs propres aveux, que les pharmaciens exerceraient toute cette pression en vue de récupérer d’autres monopoles bien plus juteux.
Chaque année, et à la même période, celle de la date de renouvellement de la convention sectorielle, on assiste au bras de fer CNAM-pharmaciens d’officine. Par la suite, on finit par trouver les compromis nécessaires et tout rentre dans l’ordre.
« Une administration installée dans de mauvaises pratiques » ?
Les principales revendications des pharmaciens n’ont pas beaucoup changé depuis 3 ans : selon eux la CNAM est « une administration bien installée dans de mauvaises pratiques largement dépassées, une administration jalouse de ce qu’elle considère comme son droit le plus absolu, une administration qui considère le pharmacien comme un redevable qu’on regarde d’en haut et non quelqu’un qui rend service aux citoyens et surtout à la CNAM et qu’on se doit de respecter et surtout un partenaire à part entière qu’il faut associer aux prises de décisions qui le concernent ».
Dans la pratique, les pharmaciens continuent à subir les mouvements d’humeur des responsables et des agents de la CNAM, avec des fois des agressions verbales et des tentatives d’intimidation inacceptables. Ils continuent à faire les frais du dysfonctionnement du mode de gestion du système mis en place par la CNAM. Les pratiques anti-conventionnelles continuent partout. En effet l’article 43 relatif aux litiges n’a jamais été appliqué (plusieurs responsables régionaux opposent un refus catégorique à son application et ils le disent haut et fort), le manuel de procédure prévu n’a pas été signé par la CNAM (Il a été élaboré par le SPOT et déposé à la CNAM depuis novembre 2014), la carte magnétique tarde a voir le jour malgré un engagement ferme du ministère des Affaires sociales (délai promis lors des négociations de l’an dernier : juin 2015 et au plus tard octobre 2015). Le délai de paiement, bien qu’ayant enregistré une amélioration dans plusieurs bureaux, reste bien au delà du délai conventionnel dans d’autres centres.
Sur quoi lorgnent les pharmaciens ?
De ce fait, l’actuelle convention ne répond plus aux attentes des pharmaciens et des citoyens et qu’il est nécessaire de la suspendre. Si les négociations doivent reprendre, elles devraient se faire sur de nouvelles bases. Elles doivent nécessairement inclure plusieurs sujets qui intéressent les pharmaciens dont notamment :
– Le problème des médicaments spécifiques dont la prise en charge par la CNAM est réservée exclusivement aux polycliniques de la CNSS et dont la liste s’allonge d’année en année de façon arbitraire et ce malgré une promesse, donnée au syndicat en 2007 au moment de la signature de la CS, de faire sortir progressivement ces produit vers le circuit officinal. Depuis, rien n’a été fait tout au contraire, puisque d’une valeur de 50 million de dinars en 2007, ils ont atteint en 2014 la somme de 340 million de dinars.
– Le problème de la distribution des médicaments, aux adhérents de la filière publique de la CNAM qui représentent 70% des affiliés, par les pharmacies externes des hôpitaux, entretenant ainsi un système dont personne n’est satisfait et essentiellement les patients qui se plaignent d’un manque chronique de médicaments et auquel les autorités tentent d’y remédier en augmentant continuellement le budget médicaments sans jamais réussir à satisfaire les demandes créant ainsi un gouffre difficile à combler.
Ne pas payer les yeux fermés
Pour la CNAM, interrogée à ce sujet, il ya beaucoup de fausses informations. Officiellement elle n’aurait encore rien reçu à propos de ce non renouvellement de la convention qu’elle estime avoir respectée. Les raisons de cette décision sont jugées exagérées par la CNAM. Les pharmaciens se plaignent de l’accueil, or il existe des bureaux spécifiques pour les prestataires de soins. Les délais de remboursement des sommes dues aux pharmaciens ne dépassent pas les délais conventionnels soit 14 jours. La CNAM a mis en place des commissions paritaires pour intervenir en cas de litige et ces dernières fonctionnent très bien.
Pour les 40 milliards de dette évoqués par les pharmaciens sur les médias, il s’agirait seulement de la somme correspondant aux dossiers en cours d’instruction pour remboursement.
La CNAM estime qu’elle fait tous les efforts nécessaires pour que la convention sectorielle soit respectée, mais il ne faut pas lui demander de payer les yeux fermés.