L’attaque frontale du président et du ministre de l’Intérieur par « certains syndicats sécuritaires » brandit ce morceau choisi : « une Police dont l’allégeance à Dieu, à la nation et à eux seuls exclut la soumission de sa mission à nulles autres personnes, y compris les hauts responsables du ministère qui n’ont pas le droit de lui donner des leçons ou de lui imposer les directives impératives ».
Pareille optique pointe vers une problématique théorique. En effet, opposée au phantasme de la société sans classes ni Etat, la notion de « stratification » prohibe le divorce avec l’observation.
Or, aucune société n’a existé, n’existe et n’existera sans la hiérarchisation où convolent en justes noces, l’ordre et l’obéissance à l’ordre.
L’anarchie commence là où ce couple d’opposition finit. Employeurs et employés ont à voir avec ce fin mot de l’histoire.
Entre autres auteurs, Balandier reprend cette conceptualisation élaborée par les anthropologues anglo-saxons.
Cette même codification n’a jamais cessé de régir le domaine profane et le champ sacré.
Ainsi, l’islam prescrit l’obéissance au dépositaire de l’autorité sauf au cas où il désobéirait aux prescriptions de la divinité. Mais alors, comment décoder le message policier ? Sa facture cligne vers une grille de lecture : il prend sens par sa mise en relation avec une lutte engagée, sans fard, pour la prise du pouvoir.
Le combat principal oppose les bourguibistes, émancipateurs, aux ghannouchistes, pour la plupart vulgaires et passéistes.
Réformateur avant l’heure, avec l’institution du collège Sadiki, le Général Kheireddine amorçait l’opposition tradition/modernité.
Et maintenant, à l’origine du conflit exacerbé était le verbe émis par le chef magouilleur à l’adresse du baroudeur. J’ai nommé Abou Iyadh, le récepteur et Ghannouchi, l’émetteur.
Patience, mon vieux fou, la Police, l’Armée sont contre nous.
Ah la Police ! Appliquée à la société vivante, quelle serait donc l’hypothèse la plus probante ? Au vu de l’enjeu majeur, le gourou islamo-conservateur place, tout au long de son règne, ses fidèles serviteurs. A la guerre comme à la guerre ! Dans ces conditions guerrières, la proclamation policière, à l’évidence outrancière, exhiberait le marqueur du lieu où seraient parvenus, pour une part, nos amis revanchards.
Il s’agit de tirer à bout portant sur les sommets de l’autorité alliée, selon elle-même, à la Police et l’Armée.
Il faut désarçonner le Carthaginois et son ministre de l’Intérieur nommé pour dégager les hommes placés par le gourou maintenant déstabilisé avec sa bande harcelée.
Interviewé le 23 août, Nabil Daboussi, chauffeur pratiquant et peu amoureux d’Ennahdha, me dit : « Pour dominer, il faut avoir la force de son côté ».
La Fontaine émet la même idée : « La raison du plus fort est toujours la meilleure ». Mis à part le critère littéraire, il n’est guère nécessaire d’être un auteur parvenu au sommet de la notoriété pour formuler ce que chacun sait.
Au vu de pareille banalité, Bourdieu fragilise la cloison dressée entre le sens commun et la classique « distance critique ». Celle-ci exprime le même propos, mais de manière compliquée, abstruse, alambiquée.
Aux mots dits par l’interviewé, l’enquêteur n’a, parfois, presque plus rien à surajouter.
De nos jours, peu de citoyens sont échaudés par la décennie livrée à la duperie. Dès lors, pourquoi certains Américains préfèrent-ils prêter l’oreille aux tenants de la fourberie et aux parvenus au Parlement à coup d’oseille ? A la question répondit l’inoubliable Hillary. Elle a partie liée avec le scandale déployé sous le couvert du soi-disant légal.