Conjoncture: Industrie et tourisme au creux de la vague

Pour espérer une reprise tangible de l’activité économique, les premiers mois de l’année donnent d’habitude le bon tempo. Pour le cas de la Tunisie, et en raison de facteurs défavorables, sécuritaires et sociaux essentiellement, la reprise tant attendue n’a pas eu lieu. Bien au contraire, les différents indicateurs se rapportant à l’investissement, à la production et aux activités de services ont enregistré des évolutions négatives. Telle est le cas du secteur du tourisme, du transport aérien, de la production industrielle et des importations des biens d’équipement.

Avec la persistance du risque terroriste dans le pays et les répercussions de l’attentat, du 18 mars 2015, qui a frappé la capitale au cœur, la perturbation du cycle de production par des mouvements sociaux revendicatifs et qui ont paralysé parfois l’activité dans le pays, l’on ne peut pas espérer des résultats meilleurs. Le risque est de voir ce trend se renforcer pour le reste de l’année, ce qui pourrait aggraver davantage la situation économique du pays et les difficultés dans lesquelles ne cessent de se débattre les principaux secteurs productifs.

A cet effet, les résultats économiques que vient de publier la Banque centrale de Tunisie (BCT) à l’issue de la réunion mensuelle de son conseil d’administration, n’ont pas surpris outre mesure.
D’abord, la croissance du PIB au cours du premier trimestre de 2015, a été atone, soit une progression de 1,7%, en glissement annuel et aux prix constants, contre 2,3% le trimestre précédent. La BCT impute cette croissance molle à la poursuite du fléchissement de la valeur ajoutée des industries non manufacturières (-3,7% contre -1,6% au cours du premier trimestre de 2014) et le ralentissement du rythme de la croissance dans les services marchands (1,6% contre 3%) et ce, malgré la hausse enregistrée dans l’agriculture et pêche (7% contre 2,5%).
Le plus inquiétant, c’est le fléchissement de la production industrielle, durant le premier trimestre de l’année courante de 1% en glissement annuel contre une hausse de 0,4% en 2014, sous l’effet de la baisse de la production des industries non manufacturières (-7,3% contre -2,7%) et le ralentissement du rythme de la production des industries manufacturières (1,7% contre 1,8%). Cette même tendance s’est poursuivie au cours du mois d’avril courant.

Tourisme et transport : des indicateurs au rouge
En témoigne le repli des importations des biens d’équipement (-5,3% en glissement annuel contre -2,3% durant le même mois de 2014) et une décélération des importations des matières premières et demi-produits (0,8% contre 4,8%). En outre, les ventes des principaux secteurs orientés à l’exportation ont connu un ralentissement, notamment les industries du textile, habillement, cuirs et chaussures (0,4% contre 3,2) et les industries mécaniques et électriques (6,1% contre 14,6%).
Dans le secteur des services, la tendance baissière a concerné particulièrement le secteur touristique qui a subi de plein fouet l’impact de l’attentat terroriste qui a ciblé en mars le musée de Bardo. la situation difficile par laquelle passe le secteur est reflétée par le fort repli des nuitées touristiques globales (-21,9% et -42,2% en comparaison avec le même mois de 2014 et de 2010, respectivement), des entrées de touristes (-25,7% et -32,7%) et des recettes touristiques en devises (-26,3% et -20,5%).Le transport aérien a payé le prix fort de la crise qui secoue le secteur touristique. Résultat : en avril 2015, le trafic aérien de passagers a observé une baisse de -22% en glissement annuel contre une hausse de 8,7% une année auparavant.
Sur le plan monétaire, il y a lieu de signaler que la balance générale des paiements a dégagé un excédent de 751 MDT, au cours des quatre premiers mois de 2015, contre un déficit de 858 MDT une année auparavant. Ce résultat provient de la consolidation des entrées nettes de capitaux extérieurs notamment sous forme de prêts à moyen et long termes et à une contraction du déficit courant d’environ 25% en comparaison avec son niveau de la même période de 2014.
Au cours de la même période, le déficit courant a enregistré une baisse de 689 MDT pour s’établir à 2.161 MDT ou 2,4% du PIB contre 3,5% au cours de la même période de l’an passé.
A la faveur de l’amélioration du solde de la balance alimentaire, qui a dégagé un excédent de 184,1 MDT, contre un déficit de 616 MDT un an plus tôt, le déficit de la balance commerciale a fait un repli de 902,9 MDT ou 20,1% pour se situer à 3.582,3 MDT, en revanche le déficit de la balance énergétique s’est élargi de 6,7% et ce, malgré la baisse des prix hydrocarbures sur les marchés internationaux.

Concours bancaire en baisse
En même temps, les échanges extérieurs ont été marqués notamment, par une reprise des exportations (6,3% contre un repli de 3,2% un an plus tôt) qui sont contrebalancées par une baisse de 2,4% des importations (contre une hausse de 6% une année auparavant), permettant une amélioration de 6 points de pourcentage du taux de couverture qui s’est établi à 73,1%.
Concomitamment, la balance des services a enregistré une baisse de son excèdent de 133 MDT pour s’établir à 356 MDT, sous l’effet du recul de 13,3% des recettes touristiques par rapport à leur niveau de la même période de l’an passé (-16,6% hors effet change) pour se situer à 751 MDT.
La note de conjoncture de la BCT relève par ailleurs que l’excédent de la balance des revenus de facteurs et transferts courants a diminué de 70.
Quant à l’excédent de la balance des opérations en capital et financières, il a enregistré une hausse significative pour se situer à 2.912 MDT contre 1.992 MDT une année auparavant, suite à la nette consolidation de l’excédent de la balance des prêts-emprunts et autres engagements qui a atteint 2.099 MDT contre 1.563 MDT en 2014 et à la hausse des flux des investissements étrangers de 336 MDT pour atteindre 708 MDT.
Corrélativement, le niveau des avoirs nets en devises s’est élevé, à 13.991 MDT ou 121 jours d’importation contre 13.097 MDT et 112 jours à la fin de l’année 2014.
Il y a lieu de noter que le taux de change du dinar a enregistré, au cours du mois d’avril 2015, une dépréciation de 1,5% contre l’euro. En revanche, il a connu une appréciation vis-à-vis du dollar américain (2,6%) et du yen japonais (1,9%).
Au cours des quatre premiers de 2015, le rythme de la dépréciation du dinar s’est atténué vis-à-vis du dollar américain et du yen japonais (-2,7% pour chaque devise), alors qu’il s’est apprécié de 5,7% contre l’euro.
Enfin, l’encours des dépôts bancaires a enregistré une légère baisse de 0,8% contre une progression de 2,6% durant la même période de 2014, suite au repli de l’encours des dépôts à vue et le net ralentissement du rythme de celui des comptes à terme.
Conséquence, les concours à l’économie ont progressé à un rythme moins rapide que l’année précédente, soit 1,9% au cours des quatre premiers mois de 2015 contre 3,4% un an plus tôt. Cette décélération a touché les crédits à moyen et long termes, alors que les crédits à court terme ont poursuivi leur baisse.

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