C’est une première depuis le 14 janvier 2011 : sous l’impulsion des principaux acteurs médiatiques en Tunisie, à l’instar du Syndicat National des journalistes tunisien (SNJT) et de la Fédération Tunisienne des Directeurs de Journaux (FTDJ), le conseil de la presse a été officialisé jeudi 20 avril 2017, lors d’une conférence de presse, du moins, l’instance provisoire du conseil, en attendant la mise en place de l’organe définitif.
Défendre la déontologie du métier et la faire respecter
Cette nouvelle instance indépendante travaillera sur la régulation du secteur des médias, afin de faire respecter la déontologie du métier et de préserver le principe de la transparence dans la presse. Composé de cinq membres actuellement, l’organe provisoire du Conseil de la presse regroupe le Syndicat des médias relevant de l’UGTT, la FTDJ, le SNJT et la Ligue tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), selon Mohamed Laaroussi Ben Salah, l’un des cinq membres temporaires. « L’instance définitive sera composée de 9 membres : 2 issus de la FTDH, 2 du SNJT, 1 du syndicat des Médias relevant de l’UGTT, 1 de la LTDH, 1 du syndicat des Sociétés Médiatiques, un académicien et une personnalité nationale capable de dresser un état des lieux du paysage politique », déclare-t-il à Réalités Online. Chaque organisation proposera son ou ses candidats. « Qu’ils soient élus ou désignés en interne, cela ne concerne pas l’instance », précise Mohamed Laaroussi Ben Salah, qui rappelle que l’instance provisoire est actuellement composée de Manoubi Marouki, professeur à l’IPSI et journaliste, Habiba Mejri, responsable de la communication au sein du bureau de l’Union Africaine en Ethiopie, Fadhila Bergaoui, ancienne journaliste à La Presse, Khaled Ayari, juriste et ancien président de la Cour de Cassation et, enfin, Mohamed Laroussi ben Salah, issu du journal Assabah et Al Chaab.
« Nous avons mis près d’un an pour désigner les personnes qui composent actuellement le bureau provisoire du conseil de la presse. De fait, le défi était de trouver des compétences qui ne présentent aucun intérêt dans le secteur, et ce n’était pas une mince affaire », explique-t-il encore.
Des objectifs ambitieux, mais qui risquent d’être entravés
Le but est de préparer le terrain adéquat à la constitution du Conseil de la presse définitif, martèle le membre provisoire. « Il [le conseil] est d’ores et déjà opérationnel. Nous établirons un code à respecter et nous ferons respecter l’éthique journalistique sur tous les supports de l’information : presse écrite, télévision et radio. L’État participera à son financement à hauteur de 50%. L’autre moitié sera assurée par le SNJT, la FTDJ, la LTDH et le Syndicat des Médias relevant de l’UGTT », explique-t-il.
Le conseil actuel devrait partager le siège de l’Agence Tunisienne de communication extérieure (ATCE) pour s’installer. « L’État nous a fait cette promesse. Cependant, nous avons des informations stipulant que l’ATCE devrait déménager. Le conseil la suivra-t-il ? Dans tous les cas, en cas d’absence d’un local, le SNJT et la FTDJ se sont engagés à en louer un pour le Conseil de la presse », nous apprend encore Mohamed Laaroussi Ben Salah.
Il souligne, en revanche, la nécessité de fournir à l’instance les moyens nécessaires pour qu’elle puisse bien faire son travail, afin d’éviter le même chemin emprunté par la Haute Autorité Indépendante de la Communication audiovisuelle (HAICA), incapable d’agir efficacement en raison de son statut provisoire. « Notre rôle, pour l’heure, se limitera à la régulation et aux avertissements. Si l’État, ainsi que les autres intervenants, souhaitent faire du Conseil de la presse un organe puissant et efficace, ils doivent fournir les fonds nécessaires. Seulement, il est certain que cette instance ne fera pas que des heureux. Il y aurait peut-être ceux qui tenteraient de lui mettre les battons dans les roues en limitant, à titre d’exemple, leur aides financières », prévient-il.
Dans l’attente de l’instance définitive…
Interrogé, d’autre part, sur l’officialisation du Conseil définitif de la presse, Mohamed Laaroussi Ben Salah souligne la nécessité de savoir si les intervenants accepteront ou non l’existence d’un tel conseil. « On ignore encore si le Conseil sera créé dans le cadre d’une loi fondamentale, mais c’est une hypothèse plausible. Si nous laissons ce projet traîner, il risque de connaître le même sort que la HAICA », affirme-t-il, ajoutant qu’il est difficile, à l’heure actuelle, de donner une date exacte pour la création de l’instance définitive.
« Le conseil provisoire se penchera-t-il sur l’affaire Nessma TV -I Watch ? », face à cette question, Ben Salah affirme qu’il est possible que le Conseil se penche effectivement sur ce dossier, expliquant qu’il faudra, tout d’abord, définir la méthode de travail qui sera adoptée : recevoir des réclamations pour traiter les dépassements dans les médias ou mener des enquêtes pour les repérer. « C’est une triste affaire », dit-il pour qualifier le conflit opposant Nessma à I Watch, et de conclure : « il est important de défendre les droits des journalistes et de leur garantir une indépendance financière qui leur permettra d’exercer convenablement leur métier ».