Son nom officiel est désormais Omicron, la 15e lettre de l’alphabet grec. Le nouveau variant B.1.1.529 du Sars-CoV-2, détecté jeudi en Afrique du Sud, suscite une vive inquiétude dans le monde. Il est jugé « préoccupant » par l’OMS (aux côtés du Delta, qui domine dans le monde, et des variants Alpha, Beta et Gamma) et représente un risque « élevé à très élevé » pour l’Europe, selon le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Alors que les Etats ferment les uns après les autres leurs frontières avec l’Afrique du Sud, 61 passagers d’un vol en provenance de ce pays, et à destination d’Amsterdam, ont été testés positifs au Covid-19. Après la Belgique vendredi, un premier cas de ce nouveau variant a par ailleurs été détecté en Allemagne ce samedi.
Même si des données supplémentaires sont nécessaires, il pourrait présenter un risque accru de contagion par rapport aux autres variants. Se posent aussi des questions sur l’efficacité des vaccins sur ce variant. Tout ceci montre que la crise sanitaire est loin d’être terminée.
*Est-il plus contagieux ?
Omicron présente « un risque accru de réinfection » par rapport aux autres variants, dont le très contagieux Delta, largement dominant dans le monde, selon le groupe d’experts de l’OMS sur la base de données préliminaires. Il faudra « plusieurs semaines » pour comprendre le niveau de transmissibilité et de virulence, a souligné vendredi le porte-parole de l’organisation.
Ses caractéristiques génétiques cristallisent les craintes. « Il présente 32 mutations dans la protéine spike (la clé d’entrée du virus dans l’organisme, NDLR), dont des mutations connues incluant les acides aminés 417, 478, 484, 501, selon les informations de la presse britannique. D’après les autorités sud-africaines, il serait très contagieux », explique auprès de L’Express Hervé Fleury, virologue et professeur émérite au CNRS et à l’université de Bordeaux.
« Les virologues – dont moi – sont préoccupés. Mais je ne crois pas que qui que ce soit puisse conclure que tout est fichu uniquement en se basant sur les données dont on dispose », a écrit sur Twitter l’Américaine Angela Rasmussen. « Celui-ci est inquiétant, et c’est la première fois que je dis ça depuis Delta », a assuré sur Twitter le virologue britannique Ravi Gupta.
*Peut-il détrôner le variant Delta ?
Il est encore trop tôt pour le savoir. Les premiers éléments laissent craindre qu’Omicron en a le potentiel, mais il faut attendre plus de données. « Il se peut qu’un gros événement de super-propagation lié à B.1.1.529 donne faussement l’impression qu’il supplante Delta », a précisé la spécialiste britannique Sharon Peacock, dans Science Media Centre.
*Où a-t-il été détecté ?
Outre l’Afrique du Sud, ce variant a été détecté au Malawi, en Israël sur une personne venue du Malawi, au Botswana, à Hong Kong. Du côté de l’Union européenne, il a été détecté en Belgique. Selon le ministre belge de la Santé, le patient contaminé « venait de l’étranger » et a été testé le 22 novembre. Il venait d’Egypte, avait transité par la Turquie.
Un premier cas suspect a également été détecté en Allemagne chez une personne récemment rentrée d’Afrique du Sud, ont annoncé ce samedi les autorités régionales de l’Etat de Hesse. « Le variant Omicron est, selon toute vraisemblance, déjà présent en Allemagne », a annoncé sur Twitter le ministre régional des Affaires sociales, Kai Klose.
Par ailleurs, 61 passagers en provenance de deux vols d’Afrique du Sud ont été testés positifs au Covid-19 à leur arrivée à Amsterdam, a annoncé ce samedi l’autorité sanitaire néerlandaise, qui analyse les résultats à la recherche du nouveau variant Omicron.
« Ne nous faisons pas d illusion. Il est probablement déjà dans d’autres pays d’Europe en particulier au Royaume-Uni. En France où nous n’avons pas une activité de séquençage très importante, il y est probablement entré et serait sous les radars », déclare auprès de L’Express Hervé Fleury.
*Va-t-il se répandre en Europe ?
L’arrivée de ce nouveau variant intervient alors que l’Europe affronte déjà une flambée des contaminations. Il représente un risque « élevé à très élevé » pour le Vieux Continent, a prévenu vendredi soir le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC). Il note qu’il existe « une incertitude considérable concernant la contagiosité, l’efficacité des vaccins, le risque de réinfection et les autres caractéristiques. »
« Le niveau général de risque pour l’UE et l’EEE (Espace économique européen, Islande, Liechtenstein et Norvège) associé au variant Omicron du SARS-CoV-2 est jugé élevé à très élevé », selon l’ECDC. « Nous jugeons élevée la probabilité de nouvelles arrivées et contaminations (par Omicron) dans l’UE et l’EEE », indique l’agence.
*Quelle est la réponse des pays face à cette menace ?
Le monde se ferme à l’Afrique australe pour freiner Omicron, tandis que l’Afrique du Sud estime être « punie » pour avoir détecté le variant Omicron, selon le gouvernement. Le Brésil, à la suite de nombreux pays nord-américains, européens et arabes, est le dernier Etat en date à fermer vendredi ses frontières avec cette région du monde.
Le Canada et les Etats-Unis ont annoncé interdire l’entrée sur leur sol aux voyageurs en provenance d’Afrique australe. Du coté du Vieux Continent, de nombreux pays européens dont le Royaume-Uni, la France, l’Italie ou la Suisse ont interdit les vols en provenance d’Afrique du Sud et des pays voisins.
L’Union européenne a recommandé de suspendre tous les voyages en provenance d’Afrique du Sud et de six autres pays de la région. « La fermeture des frontières d’Afrique australe est un adjuvant car il entrera probablement ou est déjà entré par d’autres voies », selon Hervé Fleury.
*Que sait-on sur l’éventuelle résistance aux vaccins ?
Il est trop tôt pour savoir si Omicron réduit l’efficacité des vaccins, mais l’hypothèse est redoutée par des spécialistes. « Nul ne sait à l’heure actuelle ses propriétés biologiques et notamment sa neutralisation par des sérums de vaccins Moderna et Pfizer. Ces deux compagnies ont entrepris immédiatement cette vérification. S’il y avait échappement, il faudrait alors un vaccin adapté que seule la technique ARNm peut fournir », souligne Hervé Fleury.
Moderna a déjà annoncé son intention de « rapidement développer un candidat vaccin » pour une dose spécifique à Omicron. Le laboratoire allemand BioNTech, allié à Pfizer, étudie Omicron et a annoncé attendre « au plus tard dans deux semaines » de premiers résultats pour voir s’il peut échapper à la protection vaccinale. Pour l’Agence européenne des médicaments (EMA), il est en tout cas « prématuré » de prévoir une adaptation des vaccins au variant Omicron.
(L’Express)