Véritable casse-tête pour les pouvoirs publics, la contrebande de devises fait des ravages. Entre 1960 et 2014, l’équivalant de 60 milliards de dollars ont été acheminés de la Tunisie vers l’étranger, selon l’expert en économie Abdeljalil Bedoui, qui est intervenu ce jeudi 6 septembre 2019 en marge de sa participation à une conférence de presse organisée par l’Observatoire social tunisien.
Cela équivaut à quelques 162 milliards de dinars avec le cours actuel de devises. L’économiste a aussi noté le rythme effréné de la croissance de ce type de transactions illégales. Alors que 1,6 milliards de dollars circulent annuellement dans les circuits de contrebande avant 2011, on compte désormais 4,1 milliards de dollars selon Abdeljalil Bedoui. « C’est une véritable hémorragie qui bloque la croissance économique. Nous avons besoin d’une vraie volonté politique pour mettre en place une loi d’urgence économique qui va permettre à l’Etat de poursuivre les contrebandiers de devises et de confisquer leurs biens », a-t-il suggéré.
Quelles solutions peut-on appliquer pour lutter contre la contrebande de devises ? Certains appellent à la coercition et à infliger des punitions aux contrebandiers. D’autres, généralement des experts économiques, ont plutôt appelé à instaurer une amnistie avec les contrebandiers pour assurer à l’Etat ne serait-ce qu’un brin des entrées réalisées. Si le rythme annuel de la contrebande de devises équivaut à 4,1 milliards de dollars depuis 2011, nous aurions donc atteint un total de 32 milliards de dollars, soient 88 milliards de dinars.
Il s’agit d’un véritable manque-à-gagner en devises pour l’Etat tunisien, dont les réserves en devises ont chuté vertigineusement pour atteindre les 69 jours d’importation selon la Banque Centrale de Tunisie (BCT). Au lieu de s’attaquer à l’œil du cyclone, les autorités tunisiennes semblent davantage compter sur leur bonne fortune et opter pour les solutions de facilité, étant donné que certains responsables ont beaucoup misé sur les recettes touristiques et sur les prêts du Fonds Monétaire International (FMI). En désespoir de cause, constant que ces deux éléments n’ont strictement rien changé dans la situation, les responsables ont envisagé de lancer un emprunt en devises auprès des tunisiens résidents à l’étranger.