Dans un dossier consacré aux travailleurs migrants qui œuvrent sur les chantiers de la Coupe du monde 2022 au Qatar, The Guardian Weekly revient sur les injustices et abus qu’ils subissent. Et relève le décalage abyssal entre les investissements alloués à cet événement planétaire et les salaires de ceux qui lui donnent vie.
“Le but en or”, titre The Guardian Weekly en une de son numéro à paraître le 26 novembre, consacré aux travailleurs migrants au Qatar, employés en vue de la Coupe du monde 2022. Un trophée figurant un homme enchaîné qui crie son désarroi illustre la couverture.
Attirés par les promesses de salaires, des centaines de milliers de travailleurs, affluant au fil des dix dernières années de plusieurs pays – notamment de l’Asie du Sud – pour participer au mégaprojet de construction de sept stades, d’un nouvel aéroport, de routes, d’un métro et de centaines d’hôtels, affirment avoir été exploités et maltraités, déplore l’hebdomadaire.
“De nombreux travailleurs ont affirmé que leurs journées de travail étaient très longues, certains affirmant qu’ils n’avaient pas eu de jour de congé depuis des mois […]. D’autres ont affirmé avoir vu leurs passeports confisqués […] ou ont été logés dans des chambres surpeuplées dans des camps de travail étouffants”, rapporte The Guardian, qui a interviewé plus de 40 travailleurs dans sept hôtels répertoriés sur le site de la Fifa.
Quant à la rémunération, le constat est tout aussi affligeant. Si quelques réformes ont été mises en place, la majorité des travailleurs interrogés par The Guardian affirment gagner le salaire minimum, soit 1,35 dollar [1,2 euro] de l’heure, alors que la Fifa vend déjà des forfaits d’accueil “à partir de 945 dollars [840 euros] pour un match de premier tour”, et pouvant atteindre “1,1 million de dollars [981 000 euros] pour un forfait de 10 matchs dans une suite privée”.
*500 millions de dollars par semaine
Le contraste est d’autant plus saisissant que les montants investis pour ce grand rendez-vous sportif – qui a lieu pour la première fois dans un pays arabe – sont vertigineux. “En 2017, le ministre des Finances du Qatar a déclaré que le pays dépensait 500 millions de dollars par semaine pour les projets de construction liés à la Coupe du monde”, rappelle le journal dans un second article, titré “Fierté et pauvreté : la fièvre de la Coupe du monde au Qatar tempérée par l’héritage des abus du travail.”
Le média met aussi en avant le contraste dans les perceptions, notamment entre les Qataris, empreints de fierté et d’émotions, et les travailleurs étrangers, partagés entre impuissance et colère.
“Quand je suis arrivé au Qatar, il n’y avait rien ici. Nous avons construit ce pays”, déplore un travailleur asiatique interrogé par le journaliste Pete Patisson à Doha. Près de lui, un Qatari à la retraite se réjouit d’un “exploit”. “Nous sommes le premier pays arabe à l’accueillir. C’est une grande réussite, dit-il. Nous avons fait mieux que d’autres pays qui sont plus grands que nous.”
(Le Courrier international)