Le Royaume-Uni, reconfiné depuis début janvier, fait face aux “pires semaines de la pandémie”, avec des hôpitaux débordés et des décès quotidiens au plus haut. Mais comment le pays en est-il arrivé là ?
Après une première vague déjà destructrice, le Royaume-Uni traverse à nouveau de sombres jours à cause de l’épidémie de coronavirus. Le pays s’apprête même à vivre “les pires semaines de la pandémie”, a prévenu le professeur Chris Whitty, conseiller médical en chef du gouvernement britannique, auprès de la BBC. D’ailleurs, les chiffres ont déjà dépassé ceux du pic de la première vague.
*Des chiffres pires qu’au printemps dernier
Si les contaminations atteignent des hauteurs jamais vues auparavant, il est difficile de les comparer avec la situation du printemps dernier, puisque les tests étaient alors bien moins disponibles. D’ailleurs, le record de nouveaux cas quotidiens a été battu dès le début de l’automne. Mais si ces données n’offrent pas une comparaison pertinente entre les deux vagues, elles permettent tout de même de voir que la situation a complètement dégénéré fin décembre, avec une très forte accélération des nouvelles contaminations quotidiennes. Elles ont dépassé la barre des 53 000 le 29 décembre pour ne plus jamais passer en dessous. Ce chiffre a même atteint les 60 000 début janvier.
D’autres données, en revanche, montrent bien que la situation est actuellement la pire que le pays ait connue. Il y a actuellement plus de 30 000 personnes à l’hôpital à cause du Covid-19 en Angleterre, contre 21 000 lors du pic d’avril 2020.
Quant aux décès liés au coronavirus, ils avoisinaient les 1 000 par jour au printemps dernier, avec un record à 1 200. Pour cette deuxième vague, la barre des 1 000 morts quotidiens a été dépassée le 6 janvier. Le 8, 1 300 personnes ont perdu la vie à cause de la maladie. “C’est une situation effroyable”, a commenté l’épidémiologiste Chris Whitty sur la BBC.
*Le système de santé au bord du gouffre
Derrière les chiffres, c’est tout un système de santé qui se retrouve au bord de l’effondrement. Certains hôpitaux britanniques manquent d’oxygène, d’autres vont se retrouver à court de personnel. Les ambulanciers font face à des services surchargés, et doivent attendre jusqu’à 9 heures pour pouvoir transférer un patient. Ce qui a forcément un impact sur le reste de la chaîne : certains appelants ont dû attendre 10 heures avant d’être pris en charge par une ambulance, rapporte Skynews.
Et l’avenir proche ne s’annonce guère radieux : selon une étude de l’École de l’hygiène et de la médecine tropicale de Londres, qui s’est appuyée sur des données comportementales et épidémiologiques, l’Angleterre risque de compter plus de morts et d’hospitalisés durant la première moitié de 2021 que sur toute l’année 2020 si les mesures les plus strictes ne sont pas mieux respectées.
Mais comment le Royaume-Uni a-t-il pu en arriver à une telle situation ?
*Le variant, Noël ou les deux ?
Le variant, repéré pour la première fois en septembre, pourrait ne pas être innocent dans cette flambée épidémique. Selon les scientifiques britanniques, cette nouvelle version du virus se répandrait 50 à 70% plus vite que l’ancienne. “Étant donné que l’ancienne version a diminué dans toutes les régions vers Noël alors que le variant a augmenté, je pense que le variant explique en grande partie la hausse à laquelle on assiste; Mais il est difficile de démêler complètement la raison de l’augmentation des chiffres”, a expliqué le professeur Neil Ferguson au Guardian.
Par ailleurs, les rassemblements de Noël, qui étaient possibles – dans une certaines mesures – dans plusieurs régions d’Angleterre, pourraient également avoir eu un effet sur les contaminations. Selon la professeure Christina Pagel, membre du groupe consultatif scientifique pour les urgences (Sage), les admissions à l’hôpital sont en train de grimper dangereusement là où il était autorisé de se réunir à plusieurs foyers le 25 décembre. “Vous ne pouvez pas dire avec certitude que c’est Noël ou le nouveau variant, mais c’est sûr que les deux combinés”, a-t-elle commenté auprès du Guardian.
*Des difficultés dès novembre
Les difficultés remontent au mois de novembre, lors duquel une deuxième vague du coronavirus relativement haute a frappé le pays. De quoi faire dire au Premier ministre, Boris Johnson, que le virus se répandait “encore plus rapidement que dans le scénario du pire établi par nos conseillers scientifiques”. Il décidait alors d’établir un deuxième confinement, en vigueur du 5 novembre au 2 décembre. “Il est temps d’agir parce qu’il n’y a pas le choix”, justifiait-il.
Mais, un peu à l’image de ce qu’a fait la France, les écoles sont restées ouvertes et les mesures étaient beaucoup moins strictes que lors de la version du printemps dernier. Deux semaines seulement après la levée du confinement, les contaminations sont reparties à la hausse à Londres et dans le sud-est, forçant le gouvernement à passer la capitale anglaise et quelques comtés au niveau 3 en terme de restrictions – qui implique, notamment, la fermeture des théâtres, musées, cinémas, mais également restaurants et bars, sauf pour la vente à emporter. Le maire de Londres, Sadiq Khan, réclamait des mesures plus restrictives pour endiguer les contaminations, et il a rapidement été exaucé puisque, dès le 20 décembre, sa ville et plusieurs régions du pays sont passées en niveau d’alerte 4, avec la fermeture des commerces non-essentiels, le télétravail privilégié, et l’interdiction de dormir dans une zone hors de ce niveau d’alerte.
Dans son discours du 19 décembre, le Premier ministre annonçait par ailleurs les mesures en vigueur pour Noël : pour les zones en niveau 4, les rassemblement étaient interdits. Ailleurs, il était possible de regrouper trois foyers, mais uniquement le 25 décembre. De son côté, l’Irlande du Nord choisissait de reconfiner dès le 26 décembre.
*Un confinement pas aussi efficace ?
Le 30 décembre, le gouvernement britannique a dévoilé une nouvelle salve de mesures, mais elles ne sont restées en vigueur que quelques jours puisque, dès le 4 janvier, l’Angleterre s’est complètement reconfinée. Cette fois, les mesures sont semblable à celles du printemps 2020, avec les établissements scolaires fermés et des sorties possibles uniquement sous certaines conditions.
Pour autant, ce nouveau confinement pourrait ne pas avoir le même impact en raison de la contagiosité du variant. “On ne sait pas si des mesures similaires et aussi bien respectées qu’au printemps, avec les écoles primaires et secondaires fermées, seront suffisantes pour faire descendre le R0 sous 1 avec le nouveau variant”, a précisé une note du Sage (groupe consultatif scientifique pour les urgences) datant du 22 décembre. L’arrivée du vaccin représente une perspective d’espoir, même s’il faudra du temps avant qu’une majorité de la population en bénéficie.
(Yahoo Actualités)