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Au cours des derniers mois, plusieurs études américaines ont identifié une forme d’immunité « surhumaine » chez certains malades au Sars-CoV-2, qui les protégerait des variants.
On connaît l’immunité naturelle, l’immunité vaccinale, l’immunité collective. Voilà que des chercheurs américains parlent désormais d’immunité « hybride », « pare-balles », ou « surhumaine ». Peu importe son nom, ce type d’immunité offre un niveau d’anticorps particulièrement élevé à certains malades, selon une dernière étude publiée dans Science et relayée par la radio américaine NPR.
*De quoi s’agit-il exactement ?
Littéralement, d’une immunité spectaculaire. Selon plusieurs études américaines récentes, certains patients produisent des niveaux très élevés d’anticorps, mais aussi avec une grande flexibilité, c’est-à-dire une grande possibilité de mutation dans les cellules. Cette immunité conférerait une protection plus puissante contre le virus.
*Qui sont les personnes concernées ?
Il s’agirait, selon la virologue Theodora Hatziioannou, également chercheuse à l’université Rockefeller, des malades qui ont eu une exposition « hybride » au virus. Plus précisément, celles qui ont été infectées par le coronavirus en 2020 puis immunisées avec des vaccins à ARN messager cette année, c’est-à-dire avec Pfizer ou Moderna.
« Les anticorps dans le sang de ces personnes peuvent même neutraliser le Sars-CoV-1, le premier coronavirus, apparu il y a vingt ans », détaille-t-elle auprès de NPR.
Il faut donc d’abord avoir contracté le virus du Covid-19 pour contracter une immunité dite surhumaine : « Après les infections naturelles, les anticorps semblent évoluer et devenir non seulement plus puissants, mais aussi plus larges. Ils deviennent plus résistants aux mutations au sein du [virus] », continue Theodora Hatziioannou. Mais cette réponse n’est pas automatique : avoir contracté le Covid-19 puis avoir reçu l’injection d’un vaccin à ARN messager ne garantit rien.
A l’inverse, l’immunologiste John Wherry, de l’université de Pennsylvanie, estime dans une autre étude que l’immunité « surhumaine » peut concerner un patient simplement vacciné : « Dans nos recherches, nous voyons déjà une partie de cette évolution des anticorps se produire chez les personnes qui viennent d’être vaccinées », dit-il, « bien que cela se produise probablement plus rapidement chez les personnes qui ont été infectées ».
Selon lui, « les personnes qui n’ont reçu que deux doses du vaccin (et aucune infection antérieure) commencent à fabriquer des anticorps plus flexibles – des anticorps qui peuvent mieux reconnaître de nombreux des variantes préoccupantes. Ainsi, une troisième dose du vaccin donnerait probablement un coup de pouce à ces anticorps et pousserait plus loin l’évolution des anticorps ».
*Qu’en est-il de l’immunité contre les variants ?
Plusieurs autres études étayent l’idée que l’exposition à la fois à un coronavirus et à un vaccin à ARN messager déclenche une réponse immunitaire exceptionnellement puissante. Dans l’une d’elles, publiée le mois dernier dans le New England Journal of Medicine, les scientifiques ont analysé les anticorps générés par des personnes qui avaient été infectées par le virus original du Sras – Sars-CoV-1 – en 2002 ou 2003 et qui ont ensuite reçu un vaccin à ARN messager cette année.
Cette immunité croisée est une aubaine pour les patients concernés, qui seraient ainsi immunisés contre la plupart des variants du Covid-19. Paul Bieniasz, virologue à l’université américaine Rockefeller, qui a co-dirigé l’une de ces récentes études, appuie en ce sens : « On pourrait raisonnablement prédire que ces personnes seront assez bien protégées contre la plupart – et peut-être la totalité – des variants du Sars-CoV-2 que nous verrons probablement dans l’avenir. »
Si ces résultats suscitent un certain espoir, les observations sont encore partielles. L’étude publiée dans Science a été menée auprès d’un échantillon de quatorze patients seulement.
(L’Express)