Crise Covid-19: l’Union des Petites et Moyennes Industries adresse une lettre ouverte à Elyes Fakhfakh

Monsieur le Chef du Gouvernement,

Nous constatons que la Tunisie, est, comme le reste du monde, aujourd’hui confrontée à une pandémie d’une gravité inédite qui risque d’entrainer une crise économique tout aussi unique, même si, l’épidémie demeure, pour l’instant, relativement cantonnée. Nous avons noté avec beaucoup de satisfaction que le gouvernement a rapidement réagi avec un plan de riposte coordonné avec une enveloppe budgétaire exceptionnelle de 2,5 milliards de dinars. Nous avons également apprécié que la Banque Centrale de Tunisie soit intervenue afin d’inciter les banques à soutenir les entreprises à faire face aux conséquences du covid-19. La volonté et l’orientation politiques sont donc claires et à la hauteur des défis auxquels notre pays doit faire face. Mais force est de constater, qu’en pratique, ces efforts soient insuffisants. Nous sommes bien conscients que les moyens de notre pays sont assez réduits mais nous sommes convaincus de la nécessité de trouver des solutions exceptionnelles pour des circonstances exceptionnelles. C’est pourquoi les efforts de l’Etat doivent être aussi ciblés que possible.

Pour l’UPMI, la première priorité est la préservation de l’emploi et le paiement des salaires. D’abord parce que nos entreprises ont une responsabilité citoyenne envers leurs employés mais également parce que leurs employés constituent, avec la capitalisation de leur expérience, une composante essentielle de leur compétitivité. Mais la situation actuelle est déjà délicate et les prochains mois seront probablement plus difficiles. Certes, le confinement n’a démarré que depuis une dizaine de jours, mais la plupart des PME tunisiennes souffrent, depuis toujours mais d’une manière plus aigüe au cours des dernières années, de problèmes de trésorerie importants. L’arrêt ou une baisse substantielle de l’activité, même pour une période réduite, peut porter atteinte, dans plusieurs cas, à leur pérennité. En cas d’insuffisance de recettes, il s’agit de prioriser les dépenses. Pour nous, la première de nos priorités est le paiement des salaires. Si cela ne pose pas de problème pour mars, il n’en est pas de même pour les prochains mois. Certes, il est possible d’avoir recours à la solution du chômage technique en coordination avec les services de l’inspection du travail et une indemnité de 200 DT/mois. Mais cette solution ne convient à aucune partie prenante et notamment aux entreprises cherchant à préserver leurs outils de production.

C’est pourquoi l’UPMI propose un « package »avec une contribution simultanée de toutes les parties pour assurer le revenu des employés pendant la durée du confinement :

    • Les entreprises s’engagent à :
      • préserver l’emploi (personnel permanent et personnel contractuel) en leur versant au moins 70% de leur salaire net mensuel (hors primes);
      • Continuer l’exploitation une fois le confinement soit levé et le risque sanitaire dépassé.
  • L’Etat prévoit une série de mesures :
  • prise en charge des cotisations sociales,
  • exonération des impôts directs (IRPP) et indirects (TFP, FOPROLOS…) sur salaire
  • mise en place d’un fond de garantie permettant de prendre en charge des crédits à moyen terme au profit des PME le demandant ; pour couvrir les 70% des salaires nets à verser aux employés, (un mécanisme simple peut être mis en place sur la base des déclarations CNSS) ;

Cette solution permet de répartir le fardeau de la période de confinement sur toutes les parties prenantes. L’adhésion se fera sur une base volontariste. Mais nous sommes confiants, suite à une première consultation de nos adhérents, que la plupart souhaitent y adhérer.

La seconde priorité pour l’UPMI est la continuité de l’activité après le confinement dans une période de crise mondiale. C’est pourquoi il est proposé de mettre en place un fonds de garantie de l’Etat pour l’octroi de crédits à moyen terme très substantiels (plusieurs milliards de dinars) pour aider les PME à passer ce cap. Cette facilité ne concernerait pas les entreprises en difficulté ou connaissant des défauts de remboursement avec le système bancaire pour lesquels des mécanismes ont déjà été prévus et récemment renforcés. Un tel mécanisme nous semble en effet indispensable compte tenu des politiques de financement des entreprises tunisiennes où le crédit fournisseur est assez développé mais la plupart du temps sécurisé par des chèques de garantie. Les problèmes prévisibles en matière de trésorerie risquent, dans ce cas, de causer des faillites en cascades qui deviendraient rapidement incontrôlables compte tenu du cadre juridique des chèques sans provisions.

C’est des pans entiers de notre économie qui se retrouvent menacés.

Tout en demeurant à votre disposition pour toute information supplémentaire, je vous prie d’agréer, Monsieur Le Chef De Gouvernement, l’expression de ma très haute considération.

                 Président de l’UPMI

                  Ahmed Ben Messaoud

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